Faire don d’un portefeuille d’actions à un organisme d’intérêt général permet de bénéficier d’une réduction d’ISF égale à 75% de la valeur des titres. Gagnant à première vue, le contribuable philanthrope s’expose en fait à une taxation à l’impôt sur le revenu, si ses actions sont en plus-values…
Don : quand une réduction d’impôt à 66% rapporte plus qu’à 75%
Chaque année, des milliers de contribuables assujettis l’ISF consentent un don quelques jours avant la date limite de déclaration d’impôt de solidarité sur la fortune. Une façon de contribuer au financement d’organismes d’intérêt général, principalement des fondations reconnues d’utilité publique (Rup). Un acte philanthropique qui n’est pas totalement désintéressé, puisque les sommes données ouvrent droit à une réduction d’impôt de solidarité sur la fortune égale à 75% du versement effectué. Soit jusqu’à 50.000 euros, pour un don supérieur ou égal à 66.667 euros par an. Ce dispositif est communément appelé « ISF dons » ou « don ISF ».
Donation de titres éligibles au don ISF
Les fondations peuvent à ce titre recueillir des sommes d’argent, mais aussi des donations en pleine propriété de titres cotés sur un marché réglementé français (Euronext) ou étranger (LSE à Londres, Frankfurt Stock Exchange en Allemagne, NYSE et Nasdaq aux États-Unis, etc.).
Mais « la plupart des dons s’effectuent en numéraire, par chèque ou virement », observe l’avocat Xavier Delsol, associé au cabinet Delsol Avocats et spécialiste de la philanthropie. La raison est simple : l’avantage fiscal, aussi important soit-il, est sérieusement entamé par l’impact fiscal du don de titres sur l’impôt sur les plus-values.
« Fait générateur d’imposition de la plus-value »
« Si je fais un don de titres pour obtenir une réduction d’ISF, je suis à ce moment-là imposable sur la plus-value théorique, comme si j’avais vendu ces actions », observe l’avocat fiscaliste. « Le don de titres cotés pour bénéficier de la réduction d’ISF est un fait générateur d’imposition de la plus-value, abonde Stéphane Jacquin, directeur de l’ingénierie patrimoniale de Lazard Frères Gestion. Ce n’est pas le cas pour un don ouvrant droit à la réduction d’impôt sur le revenu. »
Cette différence est inscrite dans le marbre : le code général des impôts (CGI) prévoit expressément, à l’article 150 duodecies, que le gain net du donateur est imposé selon les règles des plus-values sur valeurs mobilières, mais seulement pour les dons éligibles à la réduction d’ISF. Ainsi, un don imputable sur l’impôt sur le revenu devient plus avantageux qu’on don imputable sur l’ISF alors que la réduction d’impôt est inférieure : 66% contre 75% !
Démonstration
Prenons l’exemple d’un investisseur redevable de l’ISF et imposable à la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu (45%) et à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) au taux plein de 4%. Il est détenteur d’un portefeuille d’actions, qui a doublé sa mise sur des titres acquis en Bourse à 1.000 euros il y a huit mois. Ces titres valent désormais 2.000 euros, dont 1.000 euros de plus-value. Comme ils ont été acquis dans un délai inférieur à deux ans, la plus-value est taxable plein pot s’il les cède, puisqu’aucun abattement pour durée de détention ne peut s’appliquer.
Cas 1 : don ISF de titres cotés
Ce contribuable veut réduire son ISF et opte pour un don de ses actions à la Fondation de France, pour une valeur de 2.000 euros au moment du transfert de propriété. La réduction d’ISF étant égale à 75% des sommes versées, son avantage fiscal se monte à 1.500 euros.
Problème, au titre de l’ISF (voir supra), un don de titres déclenchera l’année suivante une taxation sur la plus-value au global de 64,5% (45% d’IR + 15,5% de prélèvements sociaux + 4%). Soit une imposition globale de 645 euros. Son gain net s’élèvera ainsi à 855 euros (1.500 – 645 euros).
Montant du don : 2.000 euros
Réduction ISF : 1.500 euros
Imposition globale sur la plus-value : 645 euros
Gain net : 855 euros
Cas 2 : don IR de titres cotés
En choisissant d’imputer sur son impôt sur le revenu son don de titres d’une valeur de 2.000 euros, il économisera 1.320 euros (66% de 2.000 euros). Et ne sera pas soumis à l’impôt sur la plus-value. Dans ce cas, il aurait même pu se permettre de donner des titres d’une entreprise non cotée, chose rigoureusement impossible pour un don affecté à l’ISF. On observe bien ici que la démarche est plus efficace.
Montant du don : 2.000 euros
Réduction IR : 1.320 euros
Gain net : 1.320 euros
Cas 3 : don ISF en cash
Le contribuable opte dans ce cas de figure pour un don d’argent de 2.000 euros. La réduction d’ISF se monte simplement à 1.500 euros.
Montant du don : 2.000 euros
Réduction ISF : 1.520 euros
Gain net : 1.500 euros
En somme, pour maximiser la réduction d’ISF, mieux vaut effectuer un don en numéraire qu’une donation de titres.
Note méthodologique : dans notre exemple, nous n’avons pas tenu compte de la déductibilité partielle de la CSG (5,1%) sur le revenu imposable, applicable lorsque la plus-value est taxable au barème progressif de l’impôt sur le revenu.
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