Pour le calcul de l’IFI 2024, la résidence principale n’est pas considérée comme un bien immobilier comme les autres. Dans la déclaration d’impôt sur la fortune immobilière, elle bénéficie d’un abattement de 30%, qui s’applique dans des conditions bien particulières. Explications.
IFI 2024 et résidence principale : abattement fiscal, emprunt, SCI, les règles à respecter
Abattement de 30% sur la résidence principale pour l’IFI 2024
La résidence principale est un bien immobilier à part pour tout propriétaire : le logement est occupé par la famille qui y accumule les souvenirs. Comme auparavant en matière d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), cette particularité est prise en compte au titre de l’IFI (impôt sur la fortune immobilière) par une disposition prévue dans la loi (article 973 du Code général des impôts) qui permet d’en diminuer la valeur, au travers d’un abattement fiscal. Un geste qui n’est pas neutre, la résidence principale étant souvent l’actif qui pèse le plus lourd dans le patrimoine taxable des assujettis.
Ainsi, le droit fiscal prévoit qu’un « abattement de 30% est effectué sur la valeur vénale réelle de l’immeuble lorsque celui-ci est occupé à titre de résidence principale par son propriétaire », selon l’article 973 du CGI, alinéa 2 (qui reprend la formule auparavant prévue au titre de l’IFI à l’article 885 S du CGI, alinéa 2). En d’autres termes, la maison ou l’appartement familial n’est valorisé dans la déclaration d’IFI qu’à hauteur de 70% du prix qu’il vaudrait s’il était mis en vente sur le marché.
Décote sur l’évaluation de l’immobilier et abattement, à ne pas confondre
L’abattement de 30% sur la résidence principale est une chose, la décote dont peut bénéficier le logement lors de son évaluation en est une autre. Au moment de calculer la valeur de son patrimoine immobilier, il faut d’abord appliquer d’éventuelles surcotes ou décotes à la valeur du bien en fonction de ses qualités et de ses défauts. Puis, lorsque l’évaluation a été fixée, on peut appliquer l’abattement de 30% sur la résidence principale.
Parmi les éléments de décote pour l’évaluation de l’habitation principale, on peut citer (source : L’impôt sur la fortune 2021, théorie et pratiques, de l’ISF à l’IFI, Eric Pichet, Ed. du Siècle, P. 268) :
- éloignement des moyens de transport : -5 à -15%
- copropriété dégradée : -15%
- chauffage électrique : -5%
- environnement bruyant : -15%
- rez-de-chaussée : -10% à -15%
- rez-de-chaussée sur rue : -15% à -20%
- exposition au nord : -10%
- faible luminosité : -10%
- etc.
Résidence principale et emprunt : calcul favorable pour l’ISF, un peu moins pour l’IFI
Crédit immobilier déductible à 100% jusqu’à une certaine limite
Déclarée à 70% de sa valeur dans la déclaration d’ISF, contre 100% pour une résidence secondaire ou un investissement locatif, la résidence principale jouissait d’un autre avantage. L’emprunt ayant servi à financer son acquisition était déductible à 100% du patrimoine imposable : l’intégralité du capital restant dû était à inscrire au passif de l’ISF, même si cette somme excédait le prix du bien, puisque l’abattement de 30% ne s’appliquait pas à cette dette. Le logement familial dont le foyer fiscal est propriétaire pouvait donc en quelque sorte avoir une valeur nette totale négative au sens de l’ISF ! Le patrimoine net taxable s’en trouvait minoré.
Cette règle d’imputation de l’endettement attaché à la résidence principale a été clairement édictée par l’administration fiscale en juin 2013 au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP). Le fisc faisait ainsi la différence entre abattement d’un côté et exonération de l’autre. En effet, la dette ayant servi à l’acquisition d’un bien exonéré (comme la nue-propriété d’un appartement ou une œuvre d’art) ne peut être déduite.
Cependant, au titre de l’IFI, les experts sont partagés quant aux modalités d’imputation de la dette au passif de l’IFI. En effet, l’art 885 G quater du CGI portant sur la déduction des dettes afférentes à des actifs exonérés ou non pris en compte, a été abrogé. Le nouveau texte prévoit, comme l’a constaté Olivier Rozenfeld, président de Fidroit, que « sont déductibles de la valeur des biens ou droits immobiliers […] les dettes […] afférentes à des actifs imposables et, le cas échéant, à proportion de la fraction de leur valeur imposable ». Faut-il en déduire que seule une fraction de 70% de la dette ayant servi à financer l’acquisition de la résidence principale est déductible ?
Les commentaires administratifs du texte au BOFiP le 8 juin 2018 ont permis d’éclaircir ce point : la dette afférente à la résidence principale est déductible à 100% dans la limite de la valeur imposable de l’actif, soit 70% de la valeur vénale du logement. En d’autres termes, selon la situation, la déduction de la dette est soit totale, soit partielle (l’excédent d’endettement non imputé sur la résidence principale ne pouvant l’être sur un autre bien imposable).
Exemples de déduction de l’emprunt afférent à la résidence principale
Calculs effectués pour une résidence principale évaluée à 500 000 euros.
Valeur imposable de la résidence principale : 350.000 euros (70% de 500 000), montant égal au maximum de passif pouvant être déduit
Exemple de déduction de l’emprunt en intégralité
Le contribuable a atteint la moitié de l’échéancier de remboursement de son crédit immobilier, avec un capital restant dû de 200 000 € au 1er janvier 2019. Sa taxe foncière se monte à 2.500 euros.
Calcul du passif déductible :
Montant total des dettes : 202.500 euros
350.000 euros à l’actif > 202.500 euros au passif, les dettes sont déductibles pour leur montant total.
Base nette taxable : 350.000-202.500 = 147.500 euros
Exemple de déduction partielle du crédit
Le contribuable en est au début de son tableau d’amortissement, avec un capital restant dû de 450 000 € au 1er janvier 2019. Sa taxe foncière se monte également à 2.500 euros
Calcul du passif déductible :
Montant total des dettes : 452.500 euros
350.000 euros à l’actif < 452.500 euros au passif, les dettes sont déductibles à hauteur de 350.000 euros.
Base nette taxable : 350.000-350.000 = 0 euro
Le solde non imputé sur la valeur d’actif de la résidence principale (102.500 euros) ne peut pas non plus être imputé sur un autre bien imposable ni possibilité de report sur l’année suivante.
Désavantage pour le concubinage : abattements non cumulables
Même s’ils remplissent des déclarations de revenus séparées, les concubins sont théoriquement dans l’obligation de remplir une déclaration d’IFI ensemble, sauf s’ils sont encore mariés avec leur ex-conjoint.
Dans cette situation dite de « concubinage notoire » et si chacun est propriétaire de sa résidence principale, l’abattement de 30% ne peut s’appliquer qu’une fois et une seule. « En cas d’imposition commune, un seul immeuble est susceptible de bénéficier de l’abattement précité », précise l’article 973 du CGI. Autrement dit, l’un des deux logements doit être pris en compte pour 100% de sa valeur, comme s’il s’agissait d’une résidence secondaire.
Le piège de la détention de la résidence principale via une SCI
D’un point de vue strictement légal, la détention de la résidence principale via une société civile immobilière (SCI) ne fait pas obstacle à l’application de l’abattement de 30%. Mais en pratique, ce n’est pas aussi simple : certaines SCI peuvent bénéficier de l’abattement, d’autres pas. Le président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, Gilles Carrez, a pu en faire l’amère expérience, très médiatisée.
Ainsi, seule la SCI dite d’attribution, qui vise à construire ou acquérir un bien immobilier en vue de le diviser entre ses associés, a droit à l’abattement de 30%. Ce n’est pas le cas de la SCI dont les statuts prévoient qu’elle a pour but de gérer un patrimoine immobilier. « Sont exclus de ce dispositif les titres de sociétés civiles de gestion ou d’investissement immobilier, alors même que l’immeuble détenu par le redevable constituerait sa résidence principale », précisait sans ambiguïté l’administration fiscale. > Lire l’article Les SCI face à l’IFI
Résidence principale et IFI / ISF : l’abattement de 30% n’a pas toujours existé
L’habitude est bien ancrée dans l’esprit des foyers assujettis : pour rien au monde un contribuable assujetti à l’IFI n’oublierait d’appliquer l’abattement de 30% sur sa résidence principale. Mais cette exception au principe de l’IFI, en vigueur dans l’ISF avant sa suppression, n’a pas toujours existé. Cette ristourne n’est en vigueur que depuis l’ISF 1999, grâce à l’instauration d’un abattement sur l’immeuble « occupé à titre de résidence principale par son propriétaire ». Mais à l’époque, l’abattement n’était « que » de 20%. Un taux qui a été majoré après l’élection de Nicolas Sarkozy à 30%, à compter de l’ISF 2008.
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