Evaluation de l’immobilier, passifs déductibles, règles d’imposition, patrimoine issu d’une succession… Les experts de la chambre des notaires de Paris ont répondu aux questions sur la déclaration d’ISF 2017.
ISF 2017 : les réponses des notaires de Paris aux questions des contribuables assujettis
Un peu de répit pour les foyers assujettis à l’ISF. Après trois années mouvementées en pleine période électorale (2011-2012-2013), on peut constater une stabilité de la législation fiscale pour l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), depuis la réintroduction d’un barème progressif en 2013, assorti d’un mécanisme de décote. En revanche, le cycle de baisse des prix immobiliers amorcée en 2012 et achevée en 2015 change la donne pour la détermination de la base nette taxable au 1er janvier 2017. Autant de sujets à l’origine de nombreuses questions des internautes et lecteurs de Toutsurmesfinances.com, aux ont répondu les notaires de Paris.
Les réponses des professionnels de la Chambre des notaires de Paris sont retranscrites ci-dessous. Elles ont été classées en quatre thèmes :
> Evaluation des biens immobiliers
> Passifs et emprunts déductibles
> Patrimoine reçu en héritage
> Modalités de déclaration
Evaluation des biens immobiliers
> Sous-évaluation de la résidence principale
Question de Franck92 : Les prix de l’immobilier ont baissé dans mon quartier depuis la mi-2012. Que dois-je faire sachant que j’ai un peu sous-évalué ma résidence principale durant la dernière décennie ?
Notaires de Paris : Le contribuable doit évaluer ses biens chaque année, la valeur servant de base à l’ISF étant déterminée par le contribuable, sous réserve du contrôle de l’administration.
Les règles d’évaluation applicables sont en principe celles prévues en matière de mutation par décès. Les biens doivent donc être évalués à leur valeur vénale réelle (prix si le bien avait été mis en vente, NDLR) au jour du fait générateur soit le 1er janvier de l’année d’imposition. Pour cela vous pouvez vous rendre dans la rubrique immobilier de notre site www.notaires.paris-idf.fr
> Décote en cas d’indivision et de démembrement
Question de Pierre B. : Une décote sur l’ISF, pour nue-propriété détenue en indivision, peut-elle être appliquée dans le cas où une résidence (secondaire) avait fait l’objet d’une donation de ma mère à mes enfants pour un tiers, les deux tiers étant ma propriété pour laquelle je n’ai pas effectué de donation ?
Notaires de Paris : La détention d’un immeuble en indivision affecte sa valeur vénale. La Cour d’Appel de Paris a validé l’application d’un abattement de 30% sur un immeuble détenu par deux co indivisaires (une mère et un fils) qui n’indiquaient aucune mésentente entre eux (Cour d’appel de Paris 4 décembre 2003).
Il a été jugé que la circonstance que, pour l’établissement de l’ISF, les biens grevés d’un usufruit sont, en principe, comptés pour leur valeur en pleine propriété dans le patrimoine de l’usufruitier n’autorise pas le juge à refuser de tenir compte de la perte de valeur vénale d’un immeuble dont la propriété est démembrée du fait de l’existence d’une indivision portant sur la nue-propriété. En d’autres termes, lorsque la nue-propriété d’un bien est indivise entre plusieurs héritiers, il doit être tenu compte de cet état de droit pour évaluer le bien en pleine propriété.
> Détermination de la résidence principale en cas de déménagement
Question de Dany25 : Que se passe-t-il du point de vue fiscal quand on passe d’une résidence principale A à une résidence principale B, à cheval sur 2 années civiles, A étant encore en vente en 2016 (et inoccupée) et B ayant été acquise en 2015 ? En fait, il s’agit de savoir si on peut appliquer l’abattement autorisé de 30 % sur la résidence principale A, encore en vente au 1er janvier 2017, en plus de l’abattement de 30% sur la nouvelle résidence principale (B). Merci d’avance pour votre éclairage.
Notaires de Paris : Le fait générateur de l’imposition à l’ISF est le 1er janvier de chaque année, par conséquent c’est à cette date. La résidence principale du contribuable est celle qu’il occupe le 1er janvier et seul cet immeuble bénéficie de l’abattement de 30%. Il s’agit d’une question de fait que le service des impôts peut vérifier sous le contrôle du juge de l’impôt.
Passifs déductibles
> Impôts pouvant être déduits du patrimoine taxable
Question de FRAGO : Dans la rubrique Passifs Déductibles peut-on déduire IRPP 2017 ? Taxe d’habitation ? Redevance audiovisuelle ? Taxe foncière ? Emprunts ?
Notaires de Paris : Une dette pour être déductible doit exister au 1er janvier de l’année d’imposition, être à la charge personnelle du redevable et être (ou pouvoir être) justifiée. Par conséquent les impôts dont le fait générateur se situe au plus tard le 1er janvier et qui restent à payer à cette date sont déductibles, ainsi :
Sont déductibles de l’actif taxable à ISF
• l’impôt sur les revenus de l’année précédente ainsi que les cotisations restant à acquitter au 1er janvier sur les revenus des années antérieures.
• La taxe d’habitation ainsi que la contribution à l’audiovisuel public,
• La taxe foncière se rapportant à des immeubles occupés ou possédés par le redevable au 1er janvier.
Si un immeuble est acquis moyennant un emprunt, sont déductibles au titre de l’ISF :
• Le capital restant dû au 1er janvier de l’année d’imposition,
• Les intérêts échus et non payés au 1er janvier,
• Les intérêts courus au 1er janvier.
> Déductibilité de la surtaxe Fillon
Question de Dodo : La contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR, aussi appelé surtaxe Fillon) peut-elle figurer dans le passif de cette année ?
Notaires de Paris : Est également déductible la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus de l’année précédente. Cette contribution existe depuis l’imposition des revenus de 2011 jusqu’à l’imposition des revenus de l’année au titre de laquelle le déficit des administrations publiques sera ramené à zéro.
> Prêt familial déductible ou non ?
Question de bibiche : J’ai accordé un prêt mon fils majeur et marié pour qu’il puisse acquérir sa maison. Puis-je bénéficier d’une déduction et comment procéder ?
Notaires de Paris : Si vous avez accordé un prêt à votre fils, vous vous êtes appauvris « momentanément » de la somme prêtée et par conséquent cette somme ne se trouve plus sur un compte bancaire ou alors vous avez vendu un bien immobilier ou des valeurs mobilières et ceux-ci ne se retrouvent plus dans l’actif votre patrimoine. S’agissant d’un prêt, votre fils est tenu de le rembourser soit périodiquement, soit à terme.
> Dette d’acquisition d’un nu-propriétaire
Question de Robert75 : En matière de passifs déductibles, comment effectuer le traitement de la dette d’acquisition de la nue-propriété d’un bien pour l’ISF 2017 ? Pouvez-vous me donner une explication ?
Notaires de Paris : Les dispositions de l »article 885G quater du CGI, applicables depuis l’ISF 2013, s’oppose à la déduction des dettes contractées pour l’acquisition ou dans l’intérêt de biens qui ne sont pas imposables à l’ISF entre les mains du redevable qui en supporte la charge.
Cette disposition vise notamment les dettes afférentes à la nue-propriété de biens démembrés.
Ainsi, un nu-propriétaire se trouve désormais privé de la possibilité de déduire le capital d’un emprunt contracté pour acquérir ses droits ou financer des travaux dès lors que les biens dont la propriété est démembrée sont compris pour leur valeur en pleine propriété dans le patrimoine de l’usufruitier.
Se trouve également infirmée la doctrine concernant les droits de succession dus par le nu-propriétaire et dont le paiement a été différé. L’administration admettait la déduction de ces droits par le nu-propriétaire alors même que le bien est imposable chez l’usufruitier. Cette solution est désormais caduque.
Cependant, dans quelques cas où l’usufruitier et le nu-propriétaire sont imposés séparément sur la valeur de leur droit, le nu-propriétaire continue de pouvoir déduire les dettes afférentes à la nue-propriété.
Patrimoine reçu en héritage
> Déclaration de l’ISF d’un parent décédé
Question de Ninie : Ma mère est décédée en décembre 2016, elle payait l’ISF, j’ai une sœur et nous avons découvert un gros patrimoine immobilier avec 2 immeubles entiers en plein cœur de Lyon. Dois-je déclarer l’ISF ? Puis-je demander des aménagements ? Et je crois comprendre que je peux défalquer les droits de succession…
Notaires de Paris : Les héritiers doivent déclarer, dès le 1er janvier de l’année suivant celle du décès, dans leur patrimoine imposable à l’ISF, la quote-part leur revenant dans la succession, même si, à cette date, la succession n’est pas définitivement réglée. En contrepartie, ils peuvent inclure dans le passif déductible les droits de succession dont ils sont redevables.
En cas de décès du redevable, les cohéritiers (mais non les légataires) sont également solidaires pour le paiement de l’ISF établi au nom de l’indivision successorale (art 1709 CGI).
> Régularisation de l’ISF payé par le défunt
Question de LesBabas : Dans le cadre d’une succession, je voudrais savoir jusqu’à combien d’années en arrière les héritiers sont susceptibles de régulariser une ISF impayée par le défunt ? J’ai des informations contradictoires: soit 6 années en arrière ! Soit les héritiers ne s’acquittent que de l’année en cours argumentant que le défunt avait ses affaires en mains et que les héritiers ne sont donc pas « responsables » ?
Notaires de Paris : Le délai de reprise de l’administration :
Lorsque l’exigibilité de l’impôt est suffisamment révélée par une déclaration ISF complète, sans que l’administration ait besoin de recourir à des recherches ultérieures, le délai de reprise de l’administration expire le 31 décembre de la troisième année suivant celle du dépôt de cette déclaration.
Pour les redevables ayant respecté l’obligation de mentionner sur la déclaration de revenus le montant de leur patrimoine taxable, ce droit de reprise s’exerce également jusqu’à l’expiration de la 3e année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due.
En l’absence de déclaration, en cas d’omission d’un bien, ou lorsque des recherches ultérieures sont nécessaires, l’action en reprise de l’administration se prescrit à l’expiration de la 6e année suivant celle de l’année d’imposition, ce qui, en pratique fait 7 ans.
Par exception, l’administration peut exercer son droit de reprise jusqu’à l’expiration de la 10e année suivant celle du fait générateur de l’impôt lorsque l’exigibilité des droits dus sur des avoirs détenus à l’étranger sur des comptes ou contrats d’assurance-vie ou dans des trusts n’a pas été suffisamment révélée par les déclarations souscrites par le redevable.
> Evaluation du patrimoine non-déclaré du défunt sur plusieurs années
Suite de la question de LesBabas : Si l’on doit régulariser plusieurs années, le calcul doit être révisé année par année selon les estimations immobilières et les avoirs en banque qui sont différents chaque année? On peut penser que même si le patrimoine entre dans le cadre de l’ISF à la date du décès et lors de la vente du bien par les héritiers, le patrimoine n’entrait peut-être pas dans le cadre de l’ISF dans le passé. Seul un « juste » calcul pourra nous donner le montant exact à régulariser année par année? Merci de nous éclairer sur ce point.
Notaires de Paris : Oui.
Modalités de déclaration
> Base nette imposable
Question de FRAGO : Quelle différence entre base nette imposable et valeur brute du patrimoine ?
Notaires de Paris : La base nette est la différence entre l’actif brut moins le passif
> Déclaration de la pierre sertie d’un bijou précieux
Question de Catherine : Je possède des bijoux anciens de plus de 100 ans. Mais un ami m’a parlé de déclaration à part de la valeur des pierres précieuses se trouvant sur ces bijoux. Que mettre dans ma déclaration d’ISF ?
Notaires de Paris : Selon l’administration, les bijoux ayant plus de 100 ans d’âge ne doivent être considérés comme entrant dans la catégorie des objets d’antiquité et, à ce titre, exonérés de l’impôt que s’ils tirent l’essentiel de leur valeur de leur ancienneté et de la qualité du travail d’exécution et non du prix des pierres, métaux précieux et autres métaux qui la composent. Dans le cas contraire, les bijoux en cause entrent dans le champ d’application de l’ISF.
> Décote ou pas pour une SCI à l’IS
Question de François : Comment déclarer une SCI (société civile immobilière) à l’IS qui détient pour environ 3,5 M euros de valeur estimée par mon agent immobilier ? Ai-je droit à une décote ? Que dois-je inscrire pour la dette d’acquisition ?
Notaires de Paris : Seules les personnes physiques sont assujetties à l’ISF. Les personnes morales ne le sont jamais mais les actions et parts sociales de société sont taxées à l’ISF entre les mains des associés personnes physiques.
> Moyen légal de passer sous le seuil d’imposition
Question de Martin : D’après mes premiers calculs, mon patrimoine se monte à 1,320 millions. Y a-t-il des astuces légales pour affiner ma déclaration et passer sous le seuil d’exonération de 1,3 million ?
Notaires de Paris : Le montant de l’ISF calculé suivant le barème est susceptible d’être réduit en fonction de la réalisation de certaines dépenses ou investissements telle que :
• Réduction d’impôt au titre des investissements dans les PME
• Souscription de parts de fonds d’investissements
• Réduction d’impôt au titre des dons à certains organismes (établissement de recherche ou d’enseignement supérieur ou d’enseignement artistique publics ou privés, d’intérêt général, à but non lucratif ; fondation reconnues d’utilité publique, entreprises d’insertion, associations intermédiaires, ateliers et chantiers d’insertion, entreprises adaptées, groupement d’employeurs bénéficiant du label GEIQ ; l’Agence national de Recherche ; fondations universitaires et fondations partenariales ; associations reconnues d’utilité publique ayant pour objet le financement et l’accompagnement de la création et de la reprise d’entreprises).
> En union libre, ISF ou non ?
Question de Jean-Marc : Divorcé, je vis depuis plusieurs années avec une femme que je ne veux pas épouser. Elle et moi vivons soit chez l’un soi chez l’autre selon nos envies. A nous deux, le patrimoine dépasse 1,5 million d’euros. Allons-nous être rattrapés un jour par le fisc ? Quel est votre conseil ?
Notaires de Paris : Les personnes vivant en concubinage notoire (relations stables et continues entre deux personnes qui vivent en couple) sont elles aussi soumises à une imposition commune.
> Seuil d’imposition et application du barème
Question de Bernard : Est-ce normal de payer l’impôt sur la fortune dès 800.000 euros alors que le seuil d’imposition est, me dit-on, de 1.300.000 euros sachant que mon patrimoine est de 1.370.000 euros ?
Notaires de Paris : Seules les personnes physiques imposables au 1er janvier de l’année d’imposition sont tenues de déclarer leur patrimoine.
Sont donc concernées les redevables dont la valeur nette du patrimoine taxable, majoré de celui de leur conjoint, partenaire lié par un PACS ou un concubin notoire et celui des enfants mineurs dont ils ont, l’un ou l’autre, l’administration légale des biens est au moins égale au seuil d’imposition soit 1.300.000 euros.
Pour atténuer l’effet de seuil (taxation dès 800.000 euros alors que le seuil d’imposition est de 1.300.000 euros), une décote est prévue pour les patrimoines dont la valeur nette taxable est égale ou supérieure à 1.300.000 euros et 1.400.000 euros.
Ces modalités de taxation résultent de l’article 13-IA et D de la loi 2012-1509 du 29 décembre 2012 qui a rétabli à compter de 2013 un barème progressif par tranches.
Pour d’autres questions-réponses, rendez-vous sur la rubrique dédiée sur le site des notaires de Paris-Ile-de-France. Cliquer ici
Session de questions réponses organisée par Olivier Brunet
Nos offres sélectionnées pour vous :