ISF : ISF PME, plafonnement, ce qui change au 1er janvier 2017

Par Olivier Brunet

Assouplissement de la réduction d’impôt ISF PME, dispositions anti-abus sur le plafonnement de l’ISF et l’exonération fiscale au titre des biens professionnels… Ce qui change en 2017 sur l’ISF suite aux mesures prises par le gouvernement dans les lois de finances.  

Réduction ISF PME
Limitation des frais de défiscalisation ISF
Plafonnement de l’ISF

Exonération au titre des biens professionnels
Exonération de 75% pour les salariés et mandataires sociaux

Réduction ISF PME : la condition de détention de 5 ans assouplie

Jusqu’à présent, le bénéfice de la réduction d’impôt dite ISF PME, accordée en contrepartie de l’investissement au capital d’une PME ou d’une start-up, était soumis à une condition de détention de 5 ans. Faute de respecter ce délai incompressible, l’investisseur pouvait s’exposer à une remise en cause de l’avantage fiscal, sauf quelques exceptions (licenciement, invalidité, décès, annulation des titres pour cause de liquidation judiciaire, etc.).

Désormais, un nouveau cas de dérogation à ce délai de détention est prévu en cas de cession des titres à l’issue d’une période de 3 ans après leur souscription, sous condition de réinvestissement. L’assouplissement est notable puisqu’il s’applique « quelle que soit la cause de cette cession », que l’on soit l’actionnaire majoritaire ou un associé minoritaire.

Le remploi des fonds devra porter sur le produit de cession (« le prix de vente des titres cédés, diminué des impôts et taxes générés par cette cession ») et non sur le prix de souscription. Le réinvestissement devra être intégral et s’effectuer dans un délai maximum d’un an à compter de la cession, par la souscription de titres de sociétés également éligibles au dispositif ISF PME. Naturellement, aucune réduction d’impôt supplémentaire ne sera accordée au titre de ce réinvestissement.

Défiscalisation ISF-PME : plafonnement des frais

Le décret n° 2016-1794 du 21 décembre 2016 (paru le 22 décembre au Journal Officiel) fixe un niveau maximal de frais et commissions directs et indirects pouvant être prélevés par les intermédiaires intervenant dans le cadre d’une opération de défiscalisation au titre de l’ISF PME.

Les frais et commissions prélevés dans le cadre du versement mais aussi plus tard (frais de gestion, conseil, etc.) sont soumis à un plafonnement global égal à 30% des sommes versées, qu’ils soient facturés directement au souscripteur ou indirectement, par facturation à l’entreprise bénéficiaire de l’investissement.

Les frais facturés aux entreprises financées sont soumis à un sous-plafond de 5% du versement. Enfin, les frais ne peuvent pas dépasser 12 % du versement au cours des trois premières années suivant le versement. Ensuite, à compter de la quatrième année, un plafond de 3% par an s’applique.

Ces plafonds s’appliquent à tout investissement direct et assimilé (holding ISF, mandat de gestion, plateformes d’investissement participatif) réalisé depuis le 23 décembre 2016, ainsi qu’aux souscriptions effectuées dans des FIP ou FCPI ISF agréés depuis cette même date.

Plafonnement de l’ISF 2017 : nouveau dispositif anti-abus

Le gouvernement a prévu, à l’article 7 de la loi de finances pour 2017, une mesure visant à lutter contre les abus destinés à maximiser les effets du plafonnement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) à 75% des revenus de l’année précédente. Déférée devant le Conseil constitutionnel par les parlementaires Les Républicains, la disposition a été jugée conforme à la Constitution.

En application de la législation fiscale en vigueur, l’utilisation du plafonnement permet d’annuler le montant de l’ISF si les revenus, au sens du plafonnement de l’ISF, sont nuls. Une possibilité parfois mise à profit dans le cadre de stratégies d’optimisation fiscale basées sur la capitalisation des revenus (ceux-ci ne sont pas distribués) au travers de sociétés holding patrimoniales soumise à l’IS (impôt sur les sociétés) contrôlées par le contribuable assujetti à l’ISF. Dans son exposé des motifs, le ministère des Finances vise explicitement – même si le texte de loi ne le prévoit pas formellement – l’association des procédés de capitalisation des revenus à un financement du train de vie par l’utilisation du cash, de l’épargne disponible et plus particulièrement par l’ouverture de lignes de crédit in fine.

Précisément, le texte de loi vise à permettre à l’administration fiscale de réintégrer la part de dividendes d’une société opérationnelle, remontée dans une société holding, correspondant à une diminution artificielle des revenus pris en compte pour le calcul du plafonnement. Cette faculté peut s’exercer « si l’existence de cette société et le choix d’y recourir ont pour objet principal d’éluder tout ou partie de l’impôt de solidarité sur la fortune ».

Toutefois, selon plusieurs spécialistes en fiscalité du patrimoine, l’imprécision de la rédaction du texte pose question. Comment définir l’objectif à titre « principal » d’éviter l’impôt ? De plus, le texte fait, selon un expert, « double emploi avec l’article L.64 du livre des procédures fiscales », qui définit la procédure de l’abus de droit fiscal. Avant cette nouvelle disposition dont la portée est très symbolique, le fisc disposait donc déjà d’un moyen pour déjouer les manœuvres en apparence régulières ayant pour but d’éluder l’impôt.

A noter : afin d’éviter de laisser trop de place à l’arbitraire, le Conseil constitutionnel a formulé une « réserve d’interprétation » de la loi, en vertu de laquelle l’administration fiscale devra faire la démonstration que les revenus réintégrés dans le calcul du plafonnement des revenus sont « assurés directement ou indirectement » par la société holding contrôlée par le contribuable.

La mesure sur le plafonnement de l’ISF prévoit implicitement une entrée en vigueur immédiate. Elle s’applique donc au titre du calcul et de la déclaration de l’ISF 2017.

Restriction de l’exonération au titre du régime des biens professionnels

Le Code général des impôts (CGI) stipule que les biens professionnels ne sont pas pris en compte dans le patrimoine taxable à l’ISF, si le contribuable occupe une fonction de direction effective et rémunérée, et si la participation dans la société représente au moins 25% des droits de vote ou choix si la valeur des titres est égale au minimum à 50% du patrimoine brut imposable à l’ISF du détenteur. Cette exonération d’ISF se limite cependant à la seule fraction de la participation correspondant aux actifs nécessaires à l’activité (article 885 O ter du CGI). Ainsi, le patrimoine privé n’aurait pas à se trouver dans le patrimoine professionnel pour échapper à l’ISF.

La nouvelle rédaction de la loi prévoit d’exclure du régime des biens professionnels la valeur des parts ou actions de la société correspondant à des actifs non nécessaires à son activité détenus dans des filiales ou des sous-filiales.

Avec cette disposition, le gouvernement veut faire coup double. Il entend d’abord faire échec à une jurisprudence récente favorable aux contribuables (Cour de cassation, arrêt n° 14-19598 du 20 octobre 2015) selon laquelle l’exclusion du champ de l’exonération au titre des biens professionnels ne pouvait s’étendre aux actifs non nécessaires à l’activité, logés dans des filiales et sous-filiales. En outre, le secrétaire d’Etat au Budget Christian Eckert a précisé l’esprit de la loi en affirmant en séance publique à l’Assemblée nationale qu’il s’agissait de lutter contre les pratiques de « petits malins » qui « placent des biens non professionnels au sens de la loi dans des filiales de filiales » en vue de les « soustraire à l’ISF ». « Je ne peux pas citer de cas précis, mais sachez qu’on trouve par exemple des bateaux », a-t-il déclaré.

Le texte de loi précise que les contribuables agissant de bonne foi ne feront l’objet d’aucun redressement fiscal.

Précisions sur le droit l’exonération d’ISF de 75% pour les salariés et mandataires sociaux

Le salarié ou mandataire social (président du conseil d’administration, administrateur, président ou du membre du conseil de surveillance, directeur général, membres du directoire) d’une entreprise peut bénéficier d’une exonération partielle d’ISF à hauteur de 75% de la valeur des titres qu’il détient dans la société, sous réserve d’y exercer son activité principale et de conserver ses parts pendant au moins 6 ans.

Cependant, la loi ne précisait pas la notion d’activité principale, ce qui est désormais chose faite. Le texte précise ainsi que :
– l’activité principale doit correspondre à une fonction effectivement exercée par le redevable
– cette activité doit donner lieu à une rémunération normale « au regard des rémunérations du même type versées au titre de fonctions analogues dans l’entreprise ou dans des entreprises similaires établies en France »
– les jetons de présence perçus par les mandataires sociaux sont pris en compte
– la rémunération doit représenter plus de 50% de ses revenus soumis à l’IR (impôt sur le revenu) hors revenus non professionnels
– lorsque l’exonération s’applique à des parts ou actions détenus dans plusieurs sociétés, la condition de rémunération normale est appréciée « dans chaque société prise isolément ». Dans ce cas, la somme des rémunérations perçues est prise en compte pour la détermination du seuil de 50% des revenus professionnels.

Là encore, le gouvernement prétexte la lutte contre des « comportements frauduleux visant à bénéficier de l’exonération sur la base d’une activité professionnelle fictive et non rémunérée ». Autre objectif, réécrire la loi afin de clarifier une rédaction source « d’incertitudes et donc de contentieux ». On peut évoquer à cet égard un jugement récent de la Cour de cassation. La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire en France a jugé que l’absence de perception d’une rémunération n’était pas incompatible avec la notion d’activité principale (5 janvier 2016, arrêt n° 14-23681), en contradiction avec la position de l’administration.

Références :
ISF PME : article 37 de la loi de finances rectificative pour 2017, article 885-0 V bis du CGI
Plafonnement ISF : article 7 de la loi de finances initiale pour 2017, article 885 V bis du CGI
Biens professionnels : article 29 de la loi de finances rectificative pour 2017, article 885 O ter du CGI
Exonération partielle : article 29 de la loi de finances rectificative pour 2017, articles 885 I quater et 885 O bis du CGI

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