Un don familial d’une somme d’argent à un descendant affecté à l’acquisition d’un logement neuf ou à des travaux de rénovation énergétique de la résidence principale bénéficie d’une exonération temporaire dans la limite de 100.000 euros par donateur. Durée, conditions d’affectation, bénéficiaires, formulaire à remplir… Tout sur l’abattement exceptionnel de droits de mutation à titre gratuit instauré pour contribuer à la relance de la construction de logements.
Abattement exceptionnel en faveur d’un don familial
Un nouvel abattement fiscal exceptionnel et temporaire sur certains dons familiaux de sommes d’argent a été instauré par l’article 71 de la loi de finances pour 2025, publiée le 15 février au Journal officiel.
Il s’agit d’exonérer de droits de mutation à titre gratuit (DMTG) les dons d’argent consentis en pleine propriété en faveur de certains membres de la famille dans la limite de 100.000 euros par donateur au profit d’un même donataire (= personne qui reçoit) et jusqu’à 300.000 euros par bénéficiaire, et sous réserve d’affecter les sommes reçues à l’une des utilisations imposées par le législateur.
Cet abattement exceptionnel a été institué en pleine crise de l’immobilier et en particulier de la construction de logements. Il vise à favoriser :
- la construction de logements neufs
- la rénovation énergétique des logements
Le dispositif est en vigueur pour les dons consentis entre le 15 février 2025 et le 31 décembre 2026, le 15 février correspondant au lendemain de la promulgation de la loi (date d’entrée en application prévue par le texte)
La mesure est similaire à celle en vigueur pour les dons consentis entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021 (qui prévoyait un champ plus large, les dons pouvant alors être affectés au financement en fonds propres de jeunes entreprises en création ou de moins de 5 ans).
Abattement de 100.000 euros prévu à l’article 790 A bis du CGI
L’abattement exceptionnel de 100.000 euros de droits de mutation à titre gratuit par donateur sur les dons familiaux de sommes d’argent consentis en pleine propriété est prévu à l’article 790 A bis du CGI (Code général des impôts), modifié par la loi n°2025-127 du 14 février 2025 (article 71).
Le dispositif n’a pour l’heure fait l’objet d’aucun commentaire au BOFiP, le bulletin officiel des finances publiques (recueil des commentaires de la loi par l’administration fiscale).
Bénéficiaires du nouvel abattement sur les donations
Les bénéficiaires des dons de sommes d’argent exonérés de fiscalité (appelés donataires dans le texte de loi) sont définis par le texte de loi. La liste des bénéficiaires, limitative, est la suivante :
- enfant
- petit-enfant
- arrière-petit-enfant
- neveu ou nièce en l’absence de descendance.
Il s’agit clairement de gratifier les jeunes générations, l’exonération temporaire ne pouvant bénéficier ni à un conjoint, ni à un partenaire de Pacs, ni à un ascendant, ni aux frères et sœurs.
En pratique, il résulte des conditions d’utilisation du don (qui exigent d’être propriétaire de sa résidence principale ou de la faire construire) que le donateur est une personne majeure, même si le texte n’interdit pas expressément les dons aux personnes mineures.
Le bénéficiaire doit en outre utiliser assez rapidement les sommes ainsi reçues (délai de 6 mois, voir ci-dessous) et respecter les règles d’utilisation prévues par la loi.
Donation exonérée de somme d’argent : une double limite, par donateur et par bénéficiaire
L’exonération dont bénéficient les donations effectuées au titre de l’article 790 A bis du CGI est limitée :
- à 100.000 euros par donateur à un même donataire (bénéficiaire)
- à 300.000 euros par donataire (qui peut recevoir des dons provenant de plusieurs personnes donatrices)
Ainsi, une personne souhaitant gratifier à la fois ses enfants et petits-enfants pourra donner 100.000 euros à chacun en franchise d’impôt dans ce cadre.
Par ailleurs, le plafond de 100.000 euros s’applique quel que soit le lien de parenté entre le donateur (celui qui donne) et le donataire (celui qui reçoit).
Cette limitation est spécifique aux dons de sommes d’argent effectués au titre de l’article 790 A bis du CGI ; elle diffère des règles habituellement applicables toujours en vigueur. Classiquement, les abattements sur les donations et les dons de sommes d’argent tiennent compte du lien de parenté.
Cela signifie, dans le cas présent, que deux grands-parents n’ayant qu’une petite-fille pourront lui donner chacun 100.000 euros en franchise d’impôt au titre des dons de sommes d’argent exonérés prévus à l’article 790 A bis du CGI (soit 200.000 euros en tout, ce qui est inférieur au plafond de 300.000 euros par donataire).
Donation exonérée entre le 15 février 2025 et le 31 décembre 2026
L’exonération de droits de mutation à titre gratuit prévue à l’article 790 A bis du CGI est temporaire : elle porte sur les dons de sommes d’argent consentis entre le 15 février 2025 et le 31 décembre 2026, sous condition d’affectation et dans la double limite :
- de 100.000 euros par donateur au profit d’un même bénéficiaire
- de 300.000 euros pour un même bénéficiaire
Conditions d’utilisation des sommes d’argent par le donataire
L’utilisation du don est strictement encadrée par la loi. Les sommes d’argent doivent être affectées :
- soit à l’acquisition d’un logement neuf ou d’un appartement acquis sur plans en Vefa (vente en l’état futur d’achèvement),
- soit à la réalisation de travaux et dépenses éligibles à la prime MaPrimeRénov’ effectués en faveur de la rénovation énergétique de la résidence principale dont le donataire est propriétaire, et affectés à ladite résidence principale
Le donataire doit conserver le bien pendant cinq ans à compter de la date d’acquisition ou d’achèvement des travaux :
- comme résidence principale s’il s’en réserve l’usage
- pour le louer à usage d’habitation principale en cas de mise en location (dans ce cas, le bail ne peut pas être conclu avec un membre du foyer fiscal du bénéficiaire)
Il résulte de ces règles les exclusions suivantes :
- le don ne peut pas être affecté aux travaux de rénovation d’une résidence secondaire
- le logement ainsi acquis ou rénové ne peut être revendu immédiatement, le logement devant rester affecté à l’habitation principale pendant les cinq années suivant
Délai d’utilisation du don exonéré
Le donataire doit utiliser les sommes d’argent reçues « au plus tard le dernier jour du sixième mois suivant le versement», selon le texte de loi.
Exemples d’application de ce délai d’utilisation de six mois (plus le mois en cours) :
- date du versement le 15 février 2025 : utilisation au plus tard le 31 août 2025
- date du versement le 1er mars 2025 : utilisation au plus tard le 30 septembre 2025
- date du versement le 30 avril 2025 : utilisation au plus tard le 31 octobre 2025
- date du versement le 20 mai 2025 : utilisation au plus tard le 30 novembre 2025
- date du versement le 10 juin 2025 : utilisation au plus tard le 31 décembre 2025
- date du versement le 24 juillet 2025 : utilisation au plus tard le 31 janvier 2026
- date du versement le 2 septembre 2025 : utilisation au plus tard le 31 mars 2026
- date du versement le 14 octobre 2025 : utilisation au plus tard le 30 avril 2026
- date du versement le 22 novembre 2025 : utilisation au plus tard le 31 mai 2026
- transfert d’argent le 8 décembre 2025 : utilisation au plus tard le 30 juin 2026
Démarches et formulaire Cerfa pour bénéficier du don exonéré
Le don peut être réalisé par le donateur par chèque, par remise d’espèces ou par virement bancaire, sans obligation de passer devant notaire.
Pour bénéficier de l’exonération, le donataire (personne bénéficiaire du don) devra remplir un formulaire de déclaration la déclaration n°2735-SD en deux exemplaires et l’adresser au service de l’administration fiscale chargé de l’enregistrement du domicile du donataire.
Aucun délai de dépôt n’est précisé ni par le texte de loi, ni par la notice du formulaire de déclaration.
La personne qui reçoit n’est pas tenue de joindre des pièces justificatives à son formulaire, mais doit les conserver « à la disposition de l’administration », selon les termes du texte de loi.
Don familial rapportable à la succession
Le don familial effectué au titre de l’article 790 A bis du CGI est rapportable à la succession du donateur.
Cela veut dire qu’au décès du donateur :
- les sommes reçues par chaque héritier sont réévaluées au jour du décès
- la valeur du partage entre héritiers au jour du décès doit être égale, en réintégrant les dons et donations effectués par le donateur de son vivant
Conséquence : en présence de deux héritiers et en cas d’affectation du don à l’acquisition d’un logement dont la valeur s’est envolée, l’héritier bénéficiaire devra verser une soulte (somme versée en compensation) à l’autre héritier pour que le partage de la succession soit équitable.
Cumul de l’abattement exceptionnel avec les abattements de droit commun
L’abattement exceptionnel de 100.000 euros est cumulable avec les abattements fiscaux usuels suivants :
- abattement de 100.000 euros pour donation en ligne directe (parents aux enfants vivants ou représentés)
- abattement de 31.865 euros pour donation au profit d’un petit-enfant
- abattement de 5.310 euros pour donation au profit d’un arrière-petit-enfant
- abattement de 7.967 euros pour donation au profit d’un neveu ou d’une nièce
- abattement de 31.865 euros pour don familial de somme d’argent d’une personne âgée de plus de 80 ans au profit d’un enfant, petit-enfant, arrière-petit-enfant ou à un neveu/nièce à défaut de descendance si le bénéficiaire est majeur, âgé d’au moins 18 ans.
Pour rappel, chacun des abattements ci-dessus est valable pour une période de 15 ans.
Non-cumul avec tout autre avantage fiscal et MaPrimeRénov’
Le droit à l’abattement exceptionnel ne peut se cumuler avec un autre avantage fiscal auquel le donataire (celui qui reçoit) aurait pu espérer prétendre au moment d’affecter les fonds reçus.
Le texte de loi énumère dans une liste les avantages fiscaux suivants ne pouvant être cumulés avec l’abattement exceptionnel :
- crédit d’impôt pour la services à la personne
- déduction de charges au titre des revenus fonciers ou de tout autre revenu catégoriel
Ces limitations sont conformes au principe selon lequel une même opération ne peut générer deux avantages fiscaux.
De la même manière, lorsque le don est affecté à des travaux de rénovation énergétique de la résidence principale, le bénéficiaire n’a pas le droit de bénéficier en plus de l’aide financière MaPrimeRénov’ (interdiction expressément prévue par le texte de loi).