Total, Orange, Air Liquide, EDF… La distribution de dividendes annuels aux actionnaires est courante chez les plus grandes entreprises françaises. Ce mode de partage des résultats existe aussi dans les TPE-PME, selon des règles d’attribution communes à toutes les sociétés de capitaux, prévues par le Code de commerce. Explications.
Dividende, définition
Le dividende est, en principe, une somme versée pour chaque action détenue par un actionnaire lorsque la société est bénéficiaire. Autrement dit, le dividende est une fraction du bénéfice distribuable attribuée au prorata du nombre d’actions que le porteur de parts a en sa possession. Il est toutefois possible de répartir différemment les dividendes selon des dispositions prévues dans les statuts de l’entreprise.
Le dividende est l’un des droits dont bénéficie l’actionnaire, parmi lesquels le droit de vote et le droit à l’information sur la vie de l’entreprise et ses résultats économiques. Le dividende est parfois qualifié à ce titre de droit financier.
En fonction de sa stratégie et de la structure de son bilan, une entreprise peut moduler l’affectation de son résultat d’une année sur l’autre entre mise en réserves, pour être en capacité de réinvestir, et distribution aux actionnaires pour contenter ces derniers. Le dividende peut ainsi atteindre jusqu’à 100% du résultat distribuable mais peut aussi être nul pendant plusieurs années. En l’absence de bénéfice, la société peut éventuellement prélever le dividende sur les réserves accumulées au fil des ans.
Les actionnaires ayant droit au dividende
Pour percevoir les dividendes d’une société, un actionnaire doit être associé lors de la tenue de l’assemblée générale ordinaire (AGO) d’approbation des comptes, qui décide de la fixation des dividendes.
Ainsi, un actionnaire présent au capital au moment de l’AGO aura droit au dividende même s’il ne l’était pas durant l’exercice qui a permis de générer un bénéfice distribuable.
Inversement, un associé qui vend ses titres avant la réunion des actionnaires en AGO n’aura droit à aucun dividende.
Le cas particulier des actions cotées
Dans le cadre d’un investissement en Bourse, le droit à la distribution se déclenche lorsqu’un actionnaire est propriétaire d’actions à la date d’arrêté des positions (on parle alors de « record date »), qui correspond soit à la veille du détachement du dividende soit à la veille de la mise en paiement.
+ d’infos > Comment investir en Bourse dans les actions à dividendes en 2021-2022
Modalités de versement d’un dividende
Fixation du dividende
Le montant du dividende est proposé par l’organe de direction de l’entreprise (conseil d’administration, directoire, gérant) puis soumis à l’approbation des actionnaires réunis en AGO. Généralement, l’assemblée se réunit d’avril à juin et le dividende est mis en paiement de mai à août, pour les entreprises dont l’exercice fiscal est calé sur l’année civile.
La mise en paiement des dividendes doit avoir lieu dans un délai légal maximal de neuf mois après la clôture de l’exercice, selon l’article L232-13 du Code de commerce, soit, en règle générale, le 30 septembre de chaque année au plus tard.
Majoration du dividende : la prime de fidélité
En principe, le droit à dividende est proportionnel au nombre d’actions détenues. Il est toutefois possible d’y déroger en accordant un dividende majoré aux actionnaires les plus fidèles ayant opté pour un mode de détention d’actions spécifique, le nominatif administré ou le nominatif pur. Cette majoration est plus connue sous le nom de « prime de fidélité ».
La majoration est plafonnée légalement à 10% du dividende. Ce bonus peut donc être compris entre 0 et 10% du dividende normal, la fixation du taux relevant d’une assemblée générale extraordinaire (AGE). Pour y avoir droit, l’actionnaire doit avoir conservé ses parts pendant au moins deux années pleines à la clôture de l’exercice et jusqu’à la date de mise en paiement du dividende.
Les détenteurs d’actions de sociétés cotées ont droit à une prime de fidélité dans la limite d’une détention de 0,5% du capital de l’entreprise émettrice par actionnaire. Certaines entreprises sont connues pour accorder une prime de fidélité à leurs actionnaires, comme Air Liquide, l’Oréal, Groupe Seb…
Acompte sur dividendes
Sous certaines conditions, une société peut distribuer des acomptes sur dividendes avant l’approbation des comptes de l’exercice. Le versement de plusieurs acomptes préalables à la ratification des comptes annuels est même possible. Le dividende mis en paiement après le vote de l’assemblée générale devra tenir compte des acomptes versés antérieurement.
Exemple : Orange a versé un acompte sur dividende de 0,30 euro par action le 15 décembre 2021 pour un dividende total de 0,70 euro en attente d’approbation par l’AG. Le solde fera l’objet d’une mise en paiement à concurrence de 0,40 euro par titre, sous réserve du feu vert des actionnaires, à la fin du printemps 2022.
Le versement des acomptes sur dividendes est encadré par la loi : il ne peut avoir lieu que si la société a réalisé un bénéfice, d’après un bilan établi au cours ou à la fin de l’exercice et certifié par un commissaire aux comptes (CAC).
Plusieurs sociétés du CAC 40 ont l’habitude de distribuer des acomptes sur dividendes : Total, Orange, Engie (ex-GDF-Suez)…
Dividende en actions
Généralement, un dividende est payé en espères ou en numéraire (versement d’argent sur le compte bancaire de l’actionnaire). Mais l’assemblée générale peut opter pour un paiement partiel ou total en actions selon des modalités prévues par la loi. Dans le cadre d’un paiement de dividendes en titres, les actions ne peuvent être attribuées à un prix inférieur à leur valeur nominale.
La fixation du prix des actions ainsi attribuées diffère selon que la société soit cotée en Bourse ou non, d’après les dispositions légales en vigueur.
Pour une société cotée sur un marché réglementé, le prix d’émission est généralement décoté par rapport au prix de marché, sans pouvoir être inférieur à 90% de la moyenne des cours cotés des 20 séances de Bourse précédant le jour de la décision de mise en distribution, diminuée du montant net du dividende.
Pour une société non cotée, le prix d’émission est fixé au choix de la société :
- soit par division du montant de l’actif net calculé à partir du bilan comptable le plus récent par le nombre de titres
- soit sur avis d’expert désigné en justice à la demande du conseil d’administration ou du directoire
Ces principes sont également applicables aux acomptes sur dividendes.
En pratique, l’AG vote d’abord une résolution sur l’affectation du résultat puis une autre sur l’option pour le paiement du dividende en actions. L’option peut être exercée différemment d’une société à l’autre et d’une année sur l’autre pour une même société, selon les dispositions votées par l’assemblée générale.
Dans certains cas, chaque actionnaire ne peut qu’exercer l’option pour un paiement à 100% de son dividende en actions. Dans d’autres, une répartition entre cash et titres peut être proposée, par exemple pour la moitié des droits à dividende lui revenant en actions et l’autre en numéraire. Généralement, cette option n’est exerçable que pendant quelques jours. Au-delà de la date butoir ou à défaut d’exercice de l’option, le dividende est payé uniquement en numéraire.
Ce choix est valable pour un dividende ou un acompte sur dividende. Ensuite, le compteur est remis à zéro : l’actionnaire reste libre de choisir entre paiement en numéraire ou en actions.
Attention !
Parfois, le montant des dividendes pour lequel est exercée l’option peut ne pas correspondre à un nombre entier d’actions. Deux possibilités se présentent alors au choix de l’actionnaire :
- recevoir le nombre entier d’actions immédiatement inférieur, complété d’une somme en espèces appelée « soulte »
- recevoir le nombre entier d’actions immédiatement supérieur en versant la différence en numéraire. Ce versement doit s’effectuer le jour de l’exercice de l’option.
Paiement des dividendes de sociétés cotées
Les modalités de distribution des dividendes sont particulières pour les sociétés cotées. Pour percevoir le dividende, il faut tenir compte des délais de transmission des ordres de Bourse et du transfert de propriété des parts, sachant que sur la Bourse de Paris le dénouement des transactions intervient à J+2 après l’exécution de l’ordre.
La chronologie est la suivante :
- Date d’arrêté des positions ou « record date » : date à laquelle l’actionnaire doit détenir les actions pour avoir droit au dividende, au solde du dividende ou à l’acompte sur dividende. Dans certains cas, cette date intervient la veille de la date de mise en paiement du dividende, dans d’autres, la veille du détachement du dividende. On parle parfois de date d’enregistrement des titres. L’arrêté intervient à la clôture de la séance de Bourse en question.
- Date de détachement : date à partir de laquelle le cours de Bourse est minoré du montant du dividende. Cette minoration s’applique durant toute la période du détachement, de l’ouverture de la séance du jour de la date de détachement jusqu’à la clôture de la veille de la date de mise en paiement. On dit alors que les actions se négocient « ex-dividende », « ex-droit », ou coupon détaché.
- Date de mise en paiement : date d’émission du virement correspondant au montant du dividende par la société cotée, soit directement aux actionnaires soit via le teneur de compte.
Les actions acquises sur le marché durant la période de détachement ne donnent pas droit au dividende en attente de mise en paiement. Cette phase ne dure pas plus de deux jours.
De même, l’achat de titres juste avant le détachement du dividende ne garantit pas le versement d’un dividende : si le transfert de propriété (on parle aussi de règlement-livraison des titres pour l’acheteur) n’est pas intervenu au moment de la « record date », c’est le vendeur qui percevra le dividende.
En savoir plus > notre article sur les dividendes 2022 du CAC 40
Pay-out, rendement, 2 indicateurs de mesure du dividende
L’importance d’un dividende versé par une société cotée à ses actionnaires peut être mesurée de différentes manières. On distingue deux principaux indicateurs, le pay-out ratio et le taux de rendement.
Pay-out ratio
Comme son nom l’indique, le pay-out ratio est un pourcentage : il exprime la part du bénéfice de l’année écoulée distribuée aux actionnaires sous la forme d’un dividende. On parle aussi de taux de distribution. Les financiers utilisent généralement par commodité l’expression de pay-out.
Ce ratio peut être calculé de deux façons : il s’agit soit de la quote-part du dividende global (avant répartition aux actionnaires), soit de la quote-part du dividende par action, auquel cas le pay-out représente une part du bénéfice net par action (BNPA ou BPA).
Taux de rendement
Cet indicateur est directement corrélé au prix d’une action, donc de son parcours boursier s’il s’agit d’un titre coté en Bourse : il exprime alors la valeur relative du dividende par rapport au cours de Bourse ou au prix de l’action. Une même action cotée peut donc afficher un rendement substantiellement différent d’une année sur l’autre et même en l’espace de quelques jours, selon la date de référence utilisée pour calculer le taux de rendement.
Un taux de rendement très élevé peut ainsi être trompeur : il peut être la conséquence d’une forte baisse du cours de Bourse.
A noter :
Quand une société cotée verse des dividendes réguliers, voire en hausse, sur une période longue, on parle de valeur de rendement.
Fiscalité des dividendes : PFU ou barème progressif
Régime d’imposition des dividendes en 2021-2022
Tout dividende perçu depuis 2018 est soumis par défaut à l’imposition au PFU (prélèvement forfaitaire unique à 30% sur les revenus du capital), également connu sous le nom de flat tax.
Ce taux d’imposition à 30% se décompose de la façon suivante :
- PFU au taux de 12,8%
- prélèvements sociaux au taux de 17,2%.
Au moment de leur versement, les dividendes font l’objet d’une retenue à la source (ou acompte) sous la forme d’un prélèvement au taux de 12,8% appelé prélèvement forfaitaire obligatoire (PFO). Si le montant de l’acompte est supérieur à l’IR effectivement dû par le contribuable, ce dernier a droit l’année suivante à une restitution du trop-payé.
Les prélèvements sociaux (CSG, CRDS, prélèvement social), également retenus à la source.
Sur option exercée au moment de la déclaration de revenus, le contribuable peut être soumis au barème de l’impôt sur le revenu (IR ou IRPP) sur ses plus-values et revenus du capital, dividendes compris. Attention, cette option est globale : elle concerne tous les revenus dans le champ du PFU. Des simulations de calcul doivent être effectuées avant de choisir cette option ou de conserver l’imposition au PFU.
Attention ! Si le régime fiscal actuel s’applique aux dividendes perçus au plus tard le 31 décembre 2021, on n’est pas assuré de bénéficier du même régime fiscal au titre des revenus perçus durant l’année 2022, en cas d’éventuel changement législatif consécutif aux échéances électorales.
Bon à savoir
Sous conditions de revenus, il est possible de demander une dispense d’acompte.
Abattement sur les dividendes
L’impôt sur le revenu est dû après application d’un abattement fiscal de 40% lorsque le contribuable n’opte pas pour la flat tax. Grâce à ce mécanisme, pour un dividende brut de 100, une base de 60 est prise en compte pour le calcul de l’impôt sur le revenu.
En revanche, lorsque l’imposition choisie est le PFU, la base imposable est égale au dividende brut (sans abattement), soit une base 100 pour un dividende de 100.
PEA et PEA PME pour minimiser l’impôt
Les dividendes tirés de titres logés dans un plan d’épargne en actions (PEA, PEA-PME) ne sont pas soumis à l’impôt ni aux prélèvements sociaux en l’absence de retrait du plan. Cette exonération est plafonnée pour les titres non cotés.