Comment fonctionne le droit à l’oubli qui facilite l’accès au crédit

Par Solenne Dimofski

Le droit à l’oubli, inscrit dans la convention Aeras, permet aux anciens malades atteints de pathologies graves d’avoir un accès facilité au prêt immobilier et conso. Passé un certain délai sans rechute, ils n’ont en effet plus besoin de mentionner leur maladie lors de la souscription d’une assurance emprunteur. Explications.

Le droit à l'oubli

1.Qu’est-ce que le droit à l’oubli ?
2.Qui est concerné par le droit à l’oubli : grille de référence
3.Le droit à l’oubli et la convention Aeras
4.Comment fonctionne le droit à l’oubli ?
5.Obligations des assureurs

Qu’est-ce que le droit à l’oubli, définition

Avant l’instauration du droit à l’oubli les personnes ayant souffert de pathologies graves, comme un cancer par exemple, accédaient difficilement au crédit. En effet, les établissements bancaires exigent que le prêt fasse l’objet d’une assurance emprunteur. Ainsi, en cas de décès ou encore d’invalidité, les mensualités restantes sont couvertes par l’assurance. Mais problème : lorsque les anciens malades parviennent à souscrire une assurance de prêt, c’est souvent au prix de surprimes et d’exclusions nombreuses.

Afin de ne plus les pénaliser et ainsi de leur éviter « une double peine », la loi de modernisation de notre système de santé a instauré la notion de droit à l’oubli pour les anciens malades.

Le principe est le suivant : si au bout d’un certain nombre d’années après la guérison, l’emprunteur n’a pas fait de rechute, alors il n’est pas obligé de mentionner son ancienne maladie dans le questionnaire de santé à remplir obligatoirement lors de la souscription d’une assurance emprunteur. Concrètement, cela signifie non seulement qu’il paie au tarif standard son assurance emprunteur mais plus globalement qu’il bénéficie d’un accès facilité au crédit. Ce qui n’était pas le cas auparavant, les banques se montrant frileuses à l’idée d’accorder un prêt à des personnes ayant déjà souffert de ce type de problèmes de santé.

En résumé, le droit à l’oubli, c’est la possibilité pour un ancien patient désireux de souscrire un crédit, de ne pas mentionner sa maladie lorsqu’elle est survenue et a été guérie bien avant la demande de prêt.

Qui est concerné par le droit à l’oubli : grille de référence

Le droit à l’oubli est accordé aux personnes ayant été atteintes de certaines pathologies graves. Une grille dite « de référence » établissant un tarif d’assurance emprunteur standard pour les maladies de bons pronostics a été mise au point par le ministère de la Santé en collaboration avec l’Institut national du Cancer (INCa) et les assureurs. Dans la première grille établie en février 2016, sont concernées par le droit à l’oubli les pathologies suivantes :

• L’hépatite C
• Le mélanome de la peau
• Le cancer du testicule
• Le cancer de la thyroïde
• Le cancer du sein
• Le cancer du col de l’utérus

Ces maladies sont dites de bons pronostics car elles présentent les meilleurs taux de guérison. Comme l’a ainsi rappelé la ministre de la Santé, la survie à 5 ans du cancer du sein se monte par exemple à 87%.

Cette liste n’est pas figée. La loi prévoit une réactualisation annuelle de cette grille de référence, sur proposition de l’INCa, qui tient compte des avancées et progrès médicaux.

Le droit à l’oubli s’applique aussi bien aux crédits à la consommation qu’aux prêts immobiliers.

Le droit à l’oubli et la convention Aeras

La convention Aeras pour « s’Assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé » signée en 2006 permet d’obtenir une assurance emprunteur pour les particuliers atteints ou ayant souffert d’une maladie grave. Mais jusqu’à l’introduction du droit à l’oubli, si le particulier avait accès à une assurance et donc au crédit, c’était dans des conditions bien différentes d’une personne en bonne santé, créant ainsi de fortes inégalités entre les emprunteurs. Ainsi, il est mentionné dans la convention Aeras que la durée maximum d’un prêt immobilier est telle que l’âge de l’emprunteur doit arriver à échéance avant son 71e anniversaire et que son montant ne doit pas dépasser 320.000 euros. Pour ce qui est de la souscription d’un crédit à la consommation, son montant ne doit pas dépasser 17.000 euros, l’âge de l’emprunteur en fin de prêt, 50 ans, et la durée de remboursement, 4 ans.

Le droit à l’oubli a été introduit par avenant à la convention Aeras, cet ajout ayant été voté dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé. C’est une avancée considérable pour les anciens malades sachant que désormais ils n’ont plus besoin d’informer l’assureur de leur état de santé passé. De quoi profiter de conditions d’emprunt standards.

Comment fonctionne le droit à l’oubli ?

L’objectif pour l’emprunteur est d’avoir accès à des conditions d’emprunt similaires aux personnes qui ne souffrent pas de cancer ou d’hépatite C, autrement dit sans surprimes et sans exclusions de garanties (décès, nouveau cancer, …). C’est la grille de référence, incluse dans la convention Aeras, qui pose les modalités pratiques du droit à l‘oubli comme l’ont rappelé l’Association française de l’assurance (AFA) et la Mutualité Française lors de la publication de la grille : « Cette grille définit les conditions permettant d’assurer au tarif normal, et pour l’ensemble des garanties décès, invalidité et incapacité, les personnes ayant eu certaines affections en se fondant sur la connaissance des risques et sur les progrès de la science. »

Dans tous les cas, le droit à l’oubli bénéficie à l’ensemble des anciens malades :

• 10 ans après la fin du protocole de traitement et en l’absence de rechute pour les anciens malades diagnostiqués après leurs 18 ans. A noter que ce délai a été diminué dans le cadre de la loi santé de 15 à 10 ans face aux doléances des associations et professionnels de santé.
• 5 ans après la fin du protocole thérapeutique pour les patients ayant souffert du cancer avant 18 ans.

Pour les autres pathologies guéries moins de 10 ans auparavant, le gouvernement a préféré l’instauration d’une grille de référence plutôt qu’un délai fixe.

A compter de la fin du traitement et en l’absence de rechute, il sera désormais possible d’accéder à l’assurance emprunter sans surprime ni exclusion à partir :

• D’un an pour les cancers in situ du sein, du col de l’utérus et les mélanomes de la peau

• De 3 à 6 ans pour les cancers des testicules et de la thyroïde en fonction de leur stade, du type de traitements et des facteurs de risques.

• De 5 à 8 ans pour les cancers du rein en fonction de leur stade, du type de traitements et des facteurs de risques.

• De 1 à 8 ans pour les cancers du côlon et du rectum en fonction de leur stade, du type de traitements et des facteurs de risques

• De 6 à 8 ans pour les lymphomes hodgkiniens

• 3 ans pour la leucémie aiguë promyélocytaire

• 48 semaines après la fin du traitement pour l’hépatite C, à condition de ne pas être infecté simultanément par le virus du Sida ou de l’hépatite B.

Pour d’autres pathologies, les conditions d’acceptation se rapprochent de l’assurance emprunteur standard, mais des surprimes peuvent être appliquées. Ces dernières sont plafonnées. La prise en charge de l’assurance emprunteur dépendant du type de traitement et des facteurs de risques.

Voici les maladies concernées ainsi que le délai pour que ce plafonnement des surprimes s’applique :

• 2 ans pour une infection par VIH en fonction du stade et du traitement

• 48 semaines après la fin du traitement pour l’hépatite virale chronique

• 4 ans à compter de la chirurgie pour l’astrocytome pilocytique. Tout dépend de l’âge auquel le diagnostic a été posé

• 5 ans à compter du diagnostic pour plusieurs types de leucémie

• Aucun délai pour les personnes atteintes de la mucoviscidose mais la durée du prêt ne doit pas dépasser 10 ans

• D’aucun délai à 5 ans de délai pour l’adénocarcinome de la prostate. Les conditions varient en fonction du traitement et de la surveillance de la maladie

La grille précise peut être consultée sur le sie de l‘Areas

 

Obligations des assureurs

Un décret paru au Journal officiel impose aux assureurs de remettre à tous les emprunteurs un document d’information sur lequel est inscrit :

• Les conditions et les délais dans lesquels les candidats à l’assurance ne sont pas tenus de déclarer leurs antécédents médicaux
• Les conditions et les délais dans lesquels les candidats à l’assurance ne pourront se voir appliquer une majoration de tarifs ou une exclusion de garanties
• Les modalités de consultation de la grille de référence

En cas de manquement, que ce soit la délivrance d’informations ou le non-respect du droit à l’oubli, des sanctions ont été prévues par le gouvernement. Tout emprunteur peut ainsi porter réclamation auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), l’instance chargée de veiller au respect du droit à l’oubli.

 

Nos offres sélectionnées pour vous :

ARTICLES CONNEXES
Menu