Qu’est-ce que le taux d’usure ? Définition
Le taux d’usure, également appelé « seuil de l’usure » ou « taux de l’usure », désigne le taux d’intérêt maximum que les banques et autres établissements de crédit peuvent appliquer lors qu’ils octroient un prêt. Selon sa définition – donnée par le Code monétaire et financier (article L3123-5) et le Code de la consommation (articles L314-6 à L314-9) -, il correspond au taux maximum légal au-delà duquel un organisme prêteur ne peut pas accorder un financement, sous peine de sanctions.
Le taux d’usure constitue un plafond pour le taux annuel effectif global (TAEG, qui remplace le TEG depuis 2016), le taux d’intérêt « tout compris » d’un crédit qui prend en compte l’intégralité des frais liés à la souscription d’un crédit (le taux d’intérêt nominal, les frais de dossier, les coûts d’assurance et de garantie obligatoires). En d’autres termes, si au moment du prêt, le TAEG du crédit excède le taux de l’usure en vigueur (fixé au début du trimestre en cours), le prêt est considéré comme usuraire.
IMPORTANT : comme l’avaient réclamé les professionnels du crédit, qui alertaient depuis plusieurs mois sur le risque de blocage de l’accès au crédit immobilier, le taux d’usure avait été relevé, de manière temporaire, tous les mois entre le 1er février 2023 et le 31 décembre 2023 (et non jusqu’au 1er juillet 2023, comme initialement prévu). La formule de calcul du taux d’usure était, en revanche, restée inchangée durant cette séquence. La revalorisation du taux d’usure a repris une fréquence trimestrielle à compter du 1er janvier 2024.
En vertu de l’article L313-3 du Code de la Consommation, « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers (33%), le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit pour des opérations de même nature comportant des risques analogues ».
Le taux d’usure s’applique à tous les crédits contractés par des particuliers, des associations et des collectivités locales.
ATTENTION : le ministère de l’Économie précise que pour les professionnels – entreprises et particuliers agissant pour leurs besoins professionnels (entrepreneurs individuels) -, seuls les découverts en compte sont soumis au respect du taux d’usure. En revanche, le taux d’usure s’applique pour les sociétés civiles immobilières (SCI), rangées par la Banque de France dans la classification « Prêts aux personnes morales n’ayant pas d’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale ».
En conséquence, il n’existe pas un mais plusieurs seuils de l’usure. En fonction de la catégorie de prêt (crédit à la consommation, prêts à taux fixe ou variable, découvert en compte, crédit renouvelable…), ces seuils peuvent varier en fonction du montant emprunté et de la durée de remboursement du crédit.
Le taux de l’usure propre à chacun des types de prêt est fixé par la Banque de France à la fin de chaque trimestre pour le trimestre suivant. Le seuil de l’usure étant fixé par la loi, les banques ne sont donc pas libres de fixer librement les taux de crédit auxquels elles prêtent de l’argent dans le cadre d’un financement.
Comme son nom l’indique, le taux de l’usure est exprimé en pourcentage (%).
À quoi le taux d’usure sert-il ?
Le taux d’usure vise, d’abord et avant tout, à protéger les particuliers contre les risques de pratiques abusives d’établissements de crédit et de sociétés de financement qui leur proposeraient d’emprunter à des taux excessivement élevés. « Des taux d’intérêt trop élevés pourraient placer l’emprunteur dans une situation financière difficile, et, à plus grande échelle, déstabiliser l’économie globale », explique le ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique sur son site Internet.
Le taux d’usure joue donc un rôle de régulateur, dans la mesure où il limite le risque de surendettement des emprunteurs – notamment les plus modestes -, et donc celui qu’ils ne soient plus en mesure de régler les arriérés.
Comment le taux de l’usure est-il calculé ?
C’est la Banque de France qui met à jour tous les trois mois le taux d’usure applicable à chaque catégorie de prêt. Pour réaliser son calcul, elle se fonde sur la moyenne des taux de crédit effectifs pratiqués au cours du trimestre précédent pour chaque catégorie de prêt, à partir des données collectées auprès des établissements de crédit et banques français (l’opération se fait sur la base des dossiers acceptés).
Ensuite, à la Banque de France majore d’un tiers la moyenne des TAEG accordés au cours des trois mois écoulés par les établissements de crédit. De facto, le taux effectif ainsi obtenu est supérieur de 33% au TAEG moyen observé au cours du trimestre précédent.
Les seuils de l’usure, calculés à la fin de chaque trimestre civil pour application le trimestre suivant, font l’objet d’une publication (sous forme d’un avis) au Journal officiel. Ils sont également consultables sur le site Internet de la Banque de France. L’information doit aussi être mise à disposition du public par l’établissement prêteur, soit par affichage dans la banque, soit sur un dépliant à jour.
Révision du taux d’usure chaque mois entre le 1er février 2023 et le 31 décembre 2023
La Banque de France avait proposé, le 20 janvier 2023, un « ajustement technique » du taux d’usure, pour une durée limitée. Entre le 1er février et le 31 décembre 2023, les taux d’usure ont été publiés tous les mois – et non plus tous les trimestres, sur la base de la moyenne des taux pratiqués lors des trois mois précédents. Cette mesure, entérinée par un arrêté paru au Journal Officiel du 27 janvier 2023, était entrée en vigueur pour les taux applicables au deuxième trimestre (entre le 1er février et le 1er juillet 2023), avant d’être prolongée.
La mesure de révision mensuelle, engagée « à titre exceptionnel pendant la période de plus forte remontée des taux (d’emprunt immobilier, NDLR) », visait à mieux « lisser » les relèvements du taux de l’usure, expliquait la Banque de France. Elle était notamment revendiquée depuis plusieurs mois par les professionnels de l’immobilier (en premier lieu les courtiers), qui reprochaient aux taux d’usure de bloquer l’accès au crédit pour certains dossiers liés à l’acquisition d’un bien immobilier (voir plus bas). Ils espéraient que cette revalorisation mensuelle permette de coller un peu mieux à la réalité des taux de crédit sur le marché.
Cette révision mensuelle du taux d’usure, qui a pris fin le 1er janvier 2024, a concerné l’ensemble des catégories de taux d’usure (crédits à la consommation, crédits immobiliers…).
ATTENTION : l’accélération temporaire du rythme de révision du taux d’usure n’a pas engendré de modification du calcul trimestriel du taux d’usure durant la période où elle s’applique. En clair, la formule de calcul du taux d’usure, définie par la loi (voir plus haut), n’a pas changé.
Immobilier, consommation… À chaque crédit, un taux seuil d’usure
Il y a autant de taux d’usure que de types de crédits accordés par une banque ou un établissement de crédit. En d’autres termes, il n’y a pas un unique taux d’usure qui s’applique à tous les prêts, mais plusieurs taux de l’usure en fonction du type de prêt.
Les taux d’usure varient non seulement en fonction des différentes catégories de prêt, mais aussi en fonction de la durée du crédit et du montant emprunté. Les catégories pour lesquelles s’appliquent un taux d’usure sont :
- les prêts immobiliers (crédits immobilier à taux fixe ou variable, prêt relais immobilier)
- les crédits à la consommation (crédits auto, crédits personnels, etc.)
- les prêts consentis aux personnes morales n’ayant pas d’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale (les SCI, notamment)
- les prêts accordés aux professionnels particuliers agissant pour leurs besoins professionnels (l’usure s’applique uniquement les découverts en compte)
Les seuils de l’usure propres à chaque catégorie de prêt sont fixés à la fin de chaque trimestre pour le trimestre suivant par la Banque de France.
Les taux d’usure 2024 par catégorie de prêt
Les taux indiqués ici sont fixés dans un avis publié dans le Journal Officiel en date du 27 septembre 2024.
Prêts immobiliers : seuils de l’usure au 1er octobre 2024 et historique 2023-2024
Pour les crédits immobiliers et les prêts pour travaux d’un montant supérieur ou égal à 75.000 euros, les taux d’usure fixés trimestriellement fluctuent pour la plupart en fonction de la durée de l’emprunt. Ce n’est pas le cas des prêts immobiliers à taux variable (le taux d’usure concerne le capital restant), ni des prêts relais (accordés pour une période courte, ils servent à financer l’achat d’un nouveau bien avant même la vente du précédent).
Le tableau ci-après indique les taux d’usure qui s’appliquent du 1er octobre 2024 au 31 décembre 2024 (quatrième trimestre 2024), ainsi que ceux qui étaient en vigueur au trois premiers trimestres 2024 (janvier, février et mars), ainsi que durant les mois de novembre et décembre 2023 (période de diffusion mensuelle des taux).
Crédits à la consommation : taux d’usure au 1er octobre 2024 et historique 2023-2024
Avec la loi Lagarde et l’arrêté du 22 mars 2011, les catégories de prêts à la consommation sont scindés en trois catégories :
- les prêts d’un montant inférieur ou égal à 3.000 euros
- les prêts d’un montant supérieur à 3.000 euros et inférieur ou égal à 6.000 euros
- les prêts d’un montant supérieur à 6.000 euros
Un seuil de l’usure, calculé chaque trimestre par la Banque de France, s’applique pour chacune de ces catégories.
Le tableau ci-dessous fixe les taux d’usure applicables au quatrième trimestre 2024 (entre le 1er octobre et le 31 décembre 2024) pour un prêt à la consommation plafonné à 75.000 euros accordé à un particulier pour une période de trois mois à douze ans, selon le montant emprunté. Le tableau indique, pour rappel, les taux appliqués au cours des deux premiers trimestres 2024, ainsi que pendant les mois de novembre et décembre 2023 pour cette catégorie de prêt (mois au cours desquels s’appliquait toujours, à titre temporaire, la revalorisation mensuelle des taux d’usure).
Crédit immobilier : quid du refus de prêt à cause du taux seuil d’usure ?
Hausse rapide des taux immobiliers, taux d’usure trop bas : « l’effet ciseau »
Il est courant de rencontrer des refus liés à un dépassement du seuil de l’usure lors d’une demande de prêt immobilier. Cela est notamment dû à ce que l’on appelle « l’effet ciseau » : en cas de remontée des taux de crédit immobilier (ce qui a été le cas de manière fulgurante entre le printemps 2022 et l’automne 2023, après qu’ils ont connu pendant deux ans des niveaux extraordinairement bas), le taux d’usure en vigueur au moment de l’étude du dossier d’un candidat à l’emprunt augmente moins vite que les taux d’intérêt en cours. Conséquence : emprunter s’avère de plus en plus difficile, même pour certains dossiers qui auraient été financés sans problème dans un contexte de taux bas.
« Le taux d’usure, qui est censé protéger les emprunteurs des taux abusifs que pourraient fixer les banques, se retourne contre eux », analysait fin 2022 pour ToutSurMesFinances Olivier Lendrevie, alors président du réseau de courtage en crédit immobilier Cafpi. Pour la plupart des courtiers, le problème relève d’un défaut structurel lié à la formule de calcul traditionnelle du seuil de l’usure.
« Les taux d’usure sont fixés pour chaque trimestre par la Banque de France à partir des taux moyens d’emprunt constatés sur les crédits décaissés au trimestre précédent, eux-mêmes correspondant à des décisions prises le trimestre antérieur. Au final, ce mécanisme induit ainsi un retard de six à neuf mois entre la hausse des taux de marché et sa répercussion sur le taux d’usure », décryptait Olivier Lendrevie.
Pour pallier cette difficulté, les professionnels du secteur immobilier (les courtiers, notamment) plaidaient pour une réforme en profondeur du mode de calcul du taux d’usure. Certains avaient proposé de réviser l’usure chaque mois pour être plus proche de la réalité du terrain (cette option se confronte à la complexité administrative pour faire remonter rapidement les données concernant les taux d’intérêt appliqués durant cette période par les banques). La Banque de France a répondu temporairement à cette revendication en actant un ajustement mensuel des taux d’usure entre le 1er février 2023 et le 31 décembre 2023 (voir ci-dessus).
Autre solution qui avait été avancée pour réformer le taux d’usure : sortir l’assurance emprunteur (la couverture du crédit immobilier qui prend en charge les mensualités de remboursement en cas d’arrêt de travail, d’invalidité, de décès, voire de perte d’emploi involontaire) du calcul du seuil de l’usure.
Exemple de calcul d’un refus de crédit immobilier pour dépassement d’usure
L’exemple utilisé ci-après permettait d’illustrer un refus de crédit immobilier en juillet 2023, du fait d’un dossier bloqué par l’établissement prêteur, après l’instauration de la revalorisation mensuelle du taux d’usure (applicable entre février et décembre 2023). Les données qui y figurent ont été fournies à la rédaction de ToutSurMesFinances, à titre purement indicatif, par le courtier en crédit immobilier Vousfinancer.
- Profil de l’emprunteur : un célibataire 46 ans, touchant 3.300 euros de revenus net par mois
- Son projet : l’achat d’une résidence principale pour un montant de 250.000 euros, avec 10% d’apport
- Le taux du prêt : 4,4% sur 25 ans
- Le taux d’usure (juillet 2023) : 5,09% sur 20 ans et plus
- Assurance groupe : 0,45%
- Frais de caution Crédit logement : 3.105 euros
- Frais de dossier : 1.250 euros
Le TAEG sortait à 5,15%, alors que le taux d’usure était à 5,09%. Conclusion : le dossier ne passait pas.
Obtenir un crédit en dépit du dépassement du taux d’usure : les solutions
Que faire si son prêt immobilier est refusé à cause du seuil de l’usure ? Plusieurs leviers peuvent être activés pour espérer contourner le dépassement du taux d’usure.
Parmi les solutions pour faire baisser le taux de l’usure de son prêt immobilier (sans garantie de certitude de l’obtention d’un crédit ne dépassant pas le seuil de l’usure) :
- tenter de retravailler le taux du prêt auprès de l’établissement prêteur (compliqué en période de taux de crédit élevés)
- changer d’assurance emprunteur, notamment par le biais d’une délégation, en mettant en concurrence les assurances de prêt immobilier
- augmenter la durée du prêt pour faire baisser les mensualités (mais avec le risque de voir le taux immobilier accordé grimper)
- augmenter son apport personnel en utilisant un produit d’épargne
- réduire les frais de dossier de la banque
- pour ceux qui empruntent en couple, diminuer la quotité d’assurance
- rechercher des conditions de prêt plus favorables auprès d’autres établissements de crédit ou dans une autre région
- opter, dans le cas d’une recherche de financement de parts de SCPI, pour un crédit à la consommation affecté à l’acquisition de parts de SCPI, dont le taux d’usure est plus élevé que celui applicable au crédit immobilier
En dernier recours, l’ultime solution (assez risquée) consiste à attendre une hypothétique hausse du prochain taux de l’usure. Ce dernier étant réévalué par trimestre, cela revient à espérer que le nouveau taux fixé par la Banque de France soit plus favorable à l’emprunteur pour mener à bien son projet. Il convient donc de connaître le seuil de l’usure en vigueur, afin de savoir si on en est éloigné et dans quelle mesure.
Les sanctions en cas de non-respect des taux d’usure
Que risque un organisme qui consent un prêt qui ne respecte pas le taux d’usure ? L’article L341-50 du Code de la consommation dispose que la pratique d’un taux usuraire – lorsque le taux annuel effectif global (TAEG) du prêt est supérieur au taux de l’usure – est un délit passible de sanctions pénales. Le prêt qui dépasse le seuil de l’usure encourt une peine d’emprisonnement de deux ans et/ou 300.000 euros d’amende.
À NOTER : ces sanctions pénales s’appliquent uniquement aux prêts immobiliers et aux prêts à la consommation.