Travail de nuit : conditions, durée, salaire, contreparties

Par Jean-Philippe Dubosc

La loi « El Khomri » a instauré un cadre strict sur les conditions de travail de nuit. Définition, rémunération, contreparties, tout savoir sur la législation appliquée aux travailleurs de nuit.

La loi du 8 août 2016 « relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels » a profondément réformé le travail de nuit. Un chapitre entier de ce texte, plus communément appelé « loi Travail » ou « loi El Khomri » (en référence à la ministre du Travail de l’époque Myriam El Khomri), est consacré à la question.

SOMMAIRE

Définition du travail de nuit

Durée du travail de nuit

Rémunération du travail de nuit

Statut des travailleurs de nuit

Contreparties au travail de nuit

– Le repos compensatoire

– La prise en compte de la pénibilité

– Le refus du travail de nuit

Recours exceptionnel au travail de nuit

Travail de nuit en intérim

Définition du travail de nuit

Tout travail effectué au cours d’une période d’au moins 9 heures consécutives, comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures du matin, est considéré comme du travail de nuit. La période de nuit commence au plus tôt à 21 heures et s’achève au plus tard à 7 heures. Des dérogations existent pour certaines activités.

Dans les médias (presse, radio, télévision), l’industrie cinématographique (production, salles de cinéma), les spectacles vivants (théâtre, danse, cirque…) et les discothèques, la période de travail de nuit est d’au moins 7 heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures.

Dans les commerces situés dans les zones touristiques internationales (ZTI) et, à ce titre, autorisés à être ouverts en soirée, elle est d’au moins 7 heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 7 heures si elle débute après 22 heures.

Durée du travail de nuit

La durée quotidienne de travail de nuit ne peut pas dépasser 8 heures consécutives. La durée hebdomadaire ne peut, elle, excéder 40 heures par semaine en moyenne sur une période de 12 semaines consécutives.

Un accord d’entreprise ou d’établissement, une convention ou un accord de branche professionnelle peuvent porter cette durée maximale à 44 heures (toujours sur 12 semaines consécutives), si l’activité le justifie. Des dérogations peuvent être accordées de la même manière pour la durée quotidienne de travail de nuit.

Rémunération du travail de nuit

Le travail de nuit donne droit à une compensation salariale. Ni la loi El Khomri, ni le Code du travail ne prévoient de dispositions précises en matière de rémunération. C’est l’accord de branche ou l’accord d’entreprise ou d’établissement qui fixe le montant des primes de nuit.

En l’absence de tels accords, l’employeur détermine les compensations financières après consultation des délégués syndicaux. A compter de 11 salariés, il doit également solliciter l’avis des délégués du personnel (DP) et, à partir de 50 salariés, du comité d’entreprise (CE).

Statut des travailleurs de nuit

Sont considérés comme travailleurs de nuit, les salariés qui accomplissent de manière régulière et au moins deux fois par semaine un minimum de 3 heures de travail de nuit ou qui effectuent au moins 270 heures de travail de nuit durant une période de 12 mois consécutifs.

Une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement peuvent fixer d’autres durées minimum. Dans tous les cas, les mineurs sont interdits de travail de nuit. Les salariées enceintes peuvent demander à ne plus travailler la nuit.

Contreparties au travail de nuit

Outre la majoration salariale (qui n’est pas toujours systématique), le travailleur de nuit bénéficie de certaines compensations.

Le repos compensatoire

Des jours de repos peuvent être octroyés en contrepartie du travail de nuit. Leur attribution et leur nombre sont déterminés par la convention collective ou l’accord de branche dont dépend l’entreprise.

La prise en compte de la pénibilité

Le travail de nuit fait partie des 10 risques professionnels pris en compte dans le cadre du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P). Instauré depuis 2015, le C3P permet aux salariés dont les conditions de travail sont jugées difficiles de cumuler des points.

120 heures de travail de nuit dans l’année permettent ainsi d’acquérir 1 point de pénibilité. Un salarié peut cumuler au maximum 4 points par an s’il est exposé à un seul risque et 8 points par an s’il est « poly-exposé ».

Les 20 premiers points doivent être utilisés (sauf pour les seniors) pour suivre une formation de reconversion à un métier moins pénible. Les 80 points restants donnent accès à un temps partiel payé comme un temps plein ou à un départ anticipé à la retraite (60 ans au plus tôt).

Le refus du travail de nuit

Un salarié qui travaille le jour peut refuser de passer à un travail de nuit si ce changement est incompatible avec des obligations familiales, comme la garde d’un enfant ou la prise en charge d’une personne dépendante. Ce refus ne peut pas constituer une faute ou un motif de licenciement. Dans tous les cas, le passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit implique une modification du contrat de travail qui nécessite l’accord du salarié.

Recours exceptionnel au travail de nuit

La loi El Khomri est très claire : le recours au travail de nuit doit être, en théorie, « exceptionnel ». Il est toléré uniquement s’il est justifié par « la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale ».

Par ailleurs, le recours au travail nocturne doit prendre en compte « les impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ». Tout salarié qui travaille la nuit bénéficie ainsi d’une surveillance médicale particulière.

Concrètement, il doit passer une visite d’information et de prévention, réalisée avant sa prise de poste par le médecin du travail. Et ce dernier doit être consulté par l’employeur « avant toute décision importante relative à la mise en place ou à la modification de l’organisation du travail de nuit. »

Travail de nuit en intérim

Les travailleurs intérimaires qui travaillent la nuit jouissent des mêmes droits que les salariés en contrat à durée indéterminée (CDI) ou en contrat à durée déterminée (CDD). La législation du travail de nuit s’applique à eux de la même manière.

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