Pour les familles aisées avec enfants à charge, l’impôt à payer en 2014 sur les revenus 2013 va augmenter au-delà de certains seuils. La faute à la baisse de l’avantage fiscal retiré du plafond du quotient familial, raboté de 2.000 euros par demi-part pour charge de famille au titre de l’imposition des revenus de 2012 à 1.500 euros au titre des revenus 2013. A partir de 70.248 euros de revenu imposable, une famille avec 2 enfants (soit 3 parts fiscales) subit les effets du nouveau plafond, seuil qui passe à 81.781 euros pour un couple avec 3 enfants (4 parts). En moyenne, les 1,3 million de familles visées vont voir leur facture fiscale grimper de 780 euros en 2014, selon un rapport du député PS Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Ne plus compter l’enfant majeur à charge
Mais il existe un moyen d’esquiver ce coup de rabot. Comment ? En utilisant une faculté parfaitement légale, dont les conditions sont définies à l’article 156-II-2 du CGI (Code général des impôts). Le rattachement au foyer fiscal étant défavorable pour de nombreuses familles à cause du nouveau plafonnement, l’idée est de renoncer au bénéfice du quotient familial et d’opter pour un autre dispositif plus avantageux, dans certains cas de figure, en optant pour le détachement de vos enfants du foyer fiscal et en leur versant une pension alimentaire. Pour cela, il faut que le ou les enfants concernés soient âgés d’au moins 18 ans. Pourquoi ne plus rattacher ces enfants majeurs ? Parce que les pensions alimentaires versées à des enfants majeurs « sont déductibles du revenu global de leur débiteur », comme l’indique l’administration fiscale au Bulletin Officiel des Finances Publiques-Impôts (Bofip). Or le plafond des pensions alimentaires versées aux enfants majeurs « est resté inchangé à 5.698 euros », comme l’observe Christine Valence-Sourdille, ingénieur patrimonial chez BNP Paribas Banque Privée.
« Compte tenu de ce nouvel abaissement du quotient familial, il peut être plus avantageux pour les contribuables qui ont des enfants majeurs de déduire une pension alimentaire plutôt que de les compter à charge », observe Stéphane Jacquin, directeur de l’ingénierie patrimoniale de Lazard Frères Gestion. La pension alimentaire déductible de 5.698 euros permet aux contribuables imposés dans les tranches supérieures de l’impôt sur le revenu (30%, 41% et 45%) de bénéficier d’un avantage en impôt « supérieur à l’avantage procuré par une demi-part de quotient familial », poursuit-il.
Pension alimentaire déductible valable avec 2 enfants majeurs
L’avantage maximal en impôt se monte ainsi à 1.709 euros dans la tranche à 30% (5.698 euros x 45%), à 2.236 euros dans la tranche à 41% et à 2.564 euros dans la tranche à 45%. A comparer aux 1.500 euros par demi-part de quotient familial. Le différentiel peut s’avérer particulièrement intéressant pour une famille avec 1 ou 2 enfants majeurs. Christine Valence-Sourdille a ainsi comparé l’impôt dû par une famille de cadres mariés ou pacsés avec deux enfants majeurs optant soit pour le rattachement au foyer fiscal, soit pour le détachement assorti du versement d’une pension. Ce couple gagne un revenu net imposable de 200.000 euros.
« En 2014 sur leurs revenus 2013, ils vont payer 52.071 euros d’impôts en ayant les deux enfants majeurs à charge. S’ils détachent leurs deux enfants et leurs versent une pension alimentaire, ils vont pouvoir la déduire pour chacun à hauteur de 5.698 euros. En procédant ainsi, l’impôt 2014 à payer sur les revenus 2013 est de 50.399 euros », a-t-elle calculé. Résultat des courses : 1.672 euros d’économie d’impôt.
Faut-il pour autant opter systématiquement pour le versement d’une pension alimentaire ? Pas forcément. Cette optimisation fiscale est même vaine pour les familles nombreuses. « Il faut faire attention avec 3 enfants. Dès lors que vous détachez le premier, vous perdez non pas une demi-part mais une part entière de quotient familial », avertit Mme Valence-Sourdille. Autrement dit, le plafond correspondant auquel le foyer fiscal renoncerait ne serait pas de 1.500 euros pour cet enfant mais de 3.000 euros, puisqu’avec trois enfants, le troisième compte double au titre du quotient familial (1 part entière au lieu d’une demie), de même que l’avantage fiscal associé. En règle générale, avec 2 enfants, vous pouvez privilégier le détachement. Avec 3 enfants, n’en prenez pas la peine.
Conditions à respecter
Autre limite, le versement de la pension alimentaire doit être manié avec précaution. Comme le prévoit l’article 156 du code général des impôts, « un contribuable ne peut, au titre d’une même année et pour un même enfant, bénéficier à la fois de la déduction d’une pension alimentaire et du rattachement ». Une vigilance qui doit être de mise en particulier l’année où votre aîné devient majeur. « L’année où l’enfant atteint sa majorité, le contribuable ne peut à la fois déduire une pension pour cet enfant et le considérer à charge pour le calcul de l’impôt », précise encore le CGI.
Autres conditions, la pension « n’a un caractère alimentaire que si le créancier de la pension est dans un état de besoin et que si son débiteur est en état de fournir les aliments », précise le Bofip, article 208 du Code civil à l’appui. Autrement dit, pour pouvoir être déduite, la pension alimentaire doit se justifier par la situation de l’enfant majeur. Et ce dernier ne doit pas omettre de déclarer cette pension dans sa déclaration de revenus. C’est le prix à payer pour cette toute relative indépendance.