La simplification de la fiscalité des particuliers en France doit-elle passer par une remise à plat de la CSG déductible ? C’était l’idée défendue par le secrétaire d’Etat au Budget Christian Eckert, lorsqu’il était député. Qui serait visé ? Faut-il craindre une hausse d’impôt ? En quoi consiste le calcul de la CSG déductible ? Quel est son taux ? Définition et éclairages.
CSG non déductible ou déductible, explications
CSG déductible, la définition et les termes du débat
CSG déductible, comment ça marche ?
La déductibilité de la contribution sociale généralisée (CSG) consiste à retirer des revenus imposables une partie de cette CSG déjà prélevée par ailleurs. C’est la raison pour laquelle on parle de déductibilité partielle de la CSG puisque cette dernière comporte une part déductible et une part non déductible.
En d’autres termes, cette CSG déductible correspond à une part de la CSG non soumise à l’impôt sur le revenu pour éviter l’imposition de revenus qui n’ont jamais été touchés.
Le fait de pouvoir déduire fiscalement une fraction de la CSG relève de la loi. Cette disposition est codifiée à l’article 154 quinquies du CGI (code général des impôts).
A noter
Le taux de CSG déductible varie selon la nature des revenus.
CSG déductible : un emballement médiatique à l’heure du ras-le-bol fiscal
Bien que démentie par l’intéressé, l’information selon laquelle l’ex secrétaire d’Etat au Budget Christian Eckert, rapporteur général du Budget à l’Assemblée nationale au moment des faits (en début d’année 2014), aurait suggéré « de rendre non déductible à l’assiette de l’impôt sur le revenu (IR) la totalité de la CSG acquittée sur les salaires » s’est répandue comme une trainée de poudre sur Internet et les réseaux sociaux après avoir été relayée par les médias. Un emballement médiatique dû au fait qu’une telle mesure pourrait entraîner une augmentation mécanique de l’impôt des contribuables. Qu’en est-il vraiment ? De quoi parle-t-on ? Explications sur la CSG déductible, illustration parfaite de la complexité de la fiscalité en France.
CSG déductible de l’impôt, un faux-ami
Est-ce que la CSG est déductible de l’impôt sur le revenu (IR ou IRPP) ?
Non, c’est un raccourci. La confusion est entretenue par des médias généralistes… mais aussi par la Cour des comptes elle-même dans certains rapports (exemple : rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, 17 septembre 2013, page 134, note de bas de page). La CSG est en fait déductible du revenu imposable, de l’assiette de l’impôt sur le revenu. Autrement dit, cette part de CSG déductible minore le revenu imposable mais pas directement le montant de l’impôt sur le revenu. La diminution d’impôt sur le revenu est une conséquence de la déductibilité de la CSG.
Paie-t-on deux fois l’impôt pour un même revenu ?
Oui et non. Un revenu brut est d’abord soumis à la CSG. Puis le revenu net de cotisations est soumis à l’impôt sur le revenu. L’ancien député PS Pierre-Alain Muet, fervent défenseur de la fusion CSG-impôt sur le revenu, estime d’ailleurs qu’il existe deux impôts sur le revenu en France. Mais les bases d’imposition (les experts parlent d’assiette) ne sont pas comparables.
Plus ubuesque encore, la part de CSG non déductible revient à inclure des sommes non perçues dans l’assiette de l’impôt sur le revenu. Ce qui fait dire à l’ex-rapporteur général socialiste du Budget Christian Eckert sur son blog que « la CSG (7,5%) prélevée sur les salaires est en partie soumise à l’impôt. Seuls 5,1% ne sont pas imposables. Ainsi, les Français payent déjà de l’impôt sur des sommes non perçues », estime-t-il. D’où les propos entendus dans certains médias selon lesquels on « paie un impôt sur l’impôt ».
D’où vient la déductibilité de la CSG ?
Lors de l’instauration de la CSG au 1er février 1991 par le gouvernement de Michel Rocard, la CSG était initialement non-déductible. Le raisonnement d’alors consistait d’une part à rendre la CSG en quelque sorte progressive en valeur puisque chacun y était soumis au même taux en fonction de ses revenus et d’autre part à ne pas toucher à l’assiette de l’impôt sur le revenu.
La déductibilité de la CSG a été instaurée en 1997 au travers de l’article 94 de la loi de finances du 30 décembre 1996, sous le gouvernement d’Alain Juppé, à l’occasion du relèvement de 1 point de la CSG. La CSG pouvait être déduite au motif qu’elle remplaçait une cotisation maladie qui était elle-même déductible. Depuis, les autres suppléments de CSG ont été rendus déductibles (1998, 2004).
Quels revenus sont concernés par la déductibilité de la CSG ?
La CSG déductible concerne tous les revenus soumis au barème de l’impôt sur le revenu : salaires, traitements des agents de la fonction publique, pensions de retraite et rentes viagères, bénéfices agricoles (BA), bénéfices industriels et commerciaux (BIC), bénéfices non commerciaux (BNC), revenus du patrimoine et de placements (revenus fonciers, dividendes, revenus d’assurance vie en cas d’imposition au barème de l’IR), plus-values mobilières.
3 taux différents de CSG déductible
Quels sont les taux de CSG et de CSG déductible ?
Tout dépend de la nature des revenus. Il existe plusieurs taux de CSG différents et plusieurs taux de CSG déductible :
– Salaires, traitements indiciaires des fonctionnaires : CSG de 7,5%, dont 5,1% de CSG déductible
– Pensions de retraite, d’invalidité : CSG de 6,6% à taux plein, dont 4,2% de CSG déductible
– Allocations de préretraite : CSG de 7,5%, dont 4,2% de CSG déductible
– Allocations chômage : CSG de 6,2% à taux plein, dont 3,8% de CSG déductible
– Indemnités journalières de Sécurité sociale : CSG de 6,2%, dont 3,8% de CSG déductible
– Revenus du capital : CSG de 8,2%, dont 5,1% de CSG déductible
Au début du quinquennat de François Hollande (au 1er janvier 2013 précisément), la fraction de CSG déductible sur les revenus du capital (1 % à l’origine) a été ramenée de 5,8% à 5,1%, une diminution revenant à aligner le taux de la déductibilité de la CSG sur les revenus du patrimoine à celui applicable aux revenus d’activité.
Pour quels revenus la CSG est-elle non déductible ?
La CSG n’est pas déductible des revenus lorsque ces derniers sont taxés à un taux proportionnel ou forfaitaire, telles que les plus-values immobilières ou les revenus d’assurance vie en cas d’option pour le prélèvement forfaitaire libératoire (PFL).
CRDS et autres prélèvements sociaux : un traitement différent
La contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS, taux de 0,5%) applicable à l’ensemble des revenus et les autres prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine ne sont pas déductibles du revenu imposable. Cette non-déductibilité existe depuis la création de la CRDS en 1996.
Ainsi, le taux global des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine se monte à 15,5%, dont 5,1% de CSG déductible.
Réforme de la CSG déductible : pourquoi, comment ?
Pourquoi réformer la CSG déductible ?
Parce que ce système de la CSG déductible… était voué à disparaître dès son instauration ! Le gouvernement Juppé de l’époque s’était fixé un objectif « d’arriver, à terme, à une déductibilité totale de la contribution sociale généralisée ». La CSG déductible est aujourd’hui sous le feu de multiples critiques : celles d’experts comptables qui déplorent une complexité de gestion, une illisibilité du bulletin de paye et des coûts induits, celles de certains députés PS, classés à l’aile gauche du parti. Ils dénoncent en fait une CSG dégressive puisque plus les revenus sont importants, plus l’impact de la CSG déductible est avantageux alors qu’un foyer non imposable n’en bénéficie pas.
A l’opposé, certains avocats fiscalistes et spécialistes de la gestion de patrimoine pointent l’impossibilité d’imputer la CSG déductible en cas de chute de revenus d’une année sur l’autre après la perception d’un produit exceptionnel comme une plus-value de cession d’une entreprise. En effet, la déduction s’opérant dans ce cas sur les revenus de l’année suivant l’encaissement de la plus-value, cette déductibilité est sans effet puisque le cédant ne gagne plus assez d’argent pour imputer la part de CSG déductible sur ses revenus imposables.
Autre problème cette fois pour les finances publiques, si on décide d’augmenter la CSG déductible, le rendement de l’impôt sur le revenu s’en trouve diminué. C’est la raison pour laquelle toutes les nouvelles contributions sociales sur les revenus du capital instaurées depuis 2004 ont porté sur la création de prélèvements sociaux non déductibles autres que la CSG.
Quelles sont les pistes de réformes présentées par Christian Eckert ?
L’ancien député PS de Meurthe-et-Moselle a présenté sur son blog deux scenarii, parmi d’autres :
Scenario 1
Mettre fin à la déductibilité de la CSG, ce qui aurait pour conséquence mécanique une hausse des impôts dont M. Eckert suggère d’annuler les effets « par une baisse du taux de la CSG ou des tranches du barème de l’impôt, notamment en bas du barème ».
La non-déductibilité totale de la CSG serait particulièrement pénalisante pour les hauts revenus au travers d’une augmentation des revenus imposables eux-mêmes soumis à des taux d’imposition supérieurs (41% ou 45%). « La déconnection des deux impôts par la non-déductibilité intégrale de la CSG de l’impôt sur le revenu a été proposée par le conseil des impôts, en 1995 et en 2000 », comme l’a rappelé récemment la Cour des comptes.
Scenario 2
Rendre la CSG entièrement déductible. Dans ce cas, la baisse de recettes fiscales pour l’Etat « pourrait être compensée par une hausse du taux de CSG ou une hausse des taux d’imposition ». Pour l’ex-parlementaire, le résultat « serait neutre, voire bénéficierait aux salariés suivant les niveaux décidés ».
Sans mesure de compensation, une CSG déductible à 100% aurait pour conséquence de bénéficier surtout aux ménages soumis aux tranches d’imposition les plus élevées sans avantage aucun pour les foyers non-imposables.
Les enjeux politiques et fiscaux de la réforme
Combien d’impôt sur le revenu en plus ou en moins ?
Selon un rapport de la Cour des comptes rendu publique rendu public en septembre 2013 basé sur des données de la DLF (direction de la législation fiscale), la suppression de la CSG déductible augmenterait les recettes de l’impôt sur le revenu d’environ 10 milliards d’euros. Soit autant d’impôt en plus pour les foyers fiscaux imposables !
La simplification inverse, consistant à rendre la CSG totalement déductible (soit les 2,4 points de CSG qui ne le sont pas encore aujourd’hui) représenterait une perte d’environ 5 milliards d’euros d’impôt sur le revenu pour l’Etat à comparer à une recette de 71,75 milliards en 2016.
Peut-on craindre une augmentation d’impôt induite ?
Le gouvernement de Manuel Valls ayant enterré l’idée d’une remise à plat de la fiscalité des ménages engagée par celui de son prédécesseur à Matignon, Jean-Marc Ayrault, la question d’une hausse d’impôt causée par une suppression de la déductibilité de la CSG n’est clairement plus d’actualité. Conscient du ras-le-bol fiscal, l’exécutif a préféré baisser l’impôt sur le revenu des ménages les plus modestes durant quatre années consécutives, en 2014, 2015, 2016 et 2017, au profit des classes moyennes et modestes.
Avant ce changement de cap, le gouvernement comme les députés PS avaient exclu toute augmentation globale des prélèvements obligatoires. L’incertitude résidait sur le dosage : si elle avait été décidée, une réforme de la CSG et de sa déductibilité aurait-elle été neutre pour chacun des foyers concernés ou y aurait-il eu des gagnants et des perdants ? Dans Le Parisien, M. Eckert avait répondu par une déclaration sans ambiguïté selon laquelle « la réforme doit se faire à prélèvements constants, sans faire de perdants ».
Des propos qui n’engagent pas Emmanuel Macron, Edouard Philippe et leur ministre du Budget Gérald Darmanin, dans le cadre de la hausse de la CSG et de la baisse des cotisations sociales salariales prévues au 1er janvier 2018. On notera cependant que le nouveau gouvernement aurait fait le choix de rendre le relèvement de 1,7 point de CSG totalement déductible du revenu imposable, afin de ne pas léser des ménages modestes, qui dans le cas contraire seraient devenus imposables à l’IR ou à la taxe d’habitation.
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