En indivision, le paiement de la taxe foncière est à la charge… de l’indivision

Par Thibault Fingonnet
SEO & traffic strategist : Camille Radicchi

Qui paye la taxe foncière sur un bien immobilier détenu en indivision ? Tant que l’indivision subsiste, il n’est pas possible d’échapper à l’impôt foncier, à moins que l’un des coindivisaires remplisse les conditions d’exonération.  

Le divorce n’exonère pas un indivisaire du paiement de la taxe foncière

En indivision, qui doit payer la taxe foncière ?

La loi n’énonce aucun principe général relatif au paiement de la taxe foncière sur un immeuble ou sur un terrain en indivision : le Code général des impôts (CGI) est muet à ce propos, en dehors de certains cas d’indivision successorale (indivision issue du décès de l’ancien propriétaire).

Pour être fixé, on peut se référer :

  • soit à la position exprimée par l’administration fiscale au BOFiP (Bulletin officiel des finances publiques) ou dans les réponses ministérielles aux députés ou sénateurs
  • soit à la jurisprudence, la justice s’étant prononcée à plusieurs reprises sur différentes situations spécifiques pour régler certains contentieux.

D’une manière générale, le fisc indique que « lorsqu’un immeuble est en indivision, l’imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties est établie au nom des indivisaires » (Source BOFiP BOI-IF-TFB-10-20-10, §20).

En d’autres termes, il y a imposition collective : chacun est imposable à hauteur de sa quote-part dans l’immeuble détenu en indivision.

Exemple pour un appartement à Paris estimé à 1 million d’euros codétenu par trois indivisaires à 50% pour le premier et à 25% pour chacun des deux autres, dont l’impôt foncier total se monte à 5.000 euros.

La taxe foncière se monte ainsi :

  • à 2.500 euros pour l’indivisaire prépondérant (50% de 5.000 euros)
  • à 1.250 euros pour chacun des deux autres (25% de 5.000 euros)

Paiement de la taxe foncière en indivision, modalités pratiques

En cas de détention d’un bien immobilier ou d’un terrain à plusieurs en indivision, un seul et unique avis de taxe foncière est émis par l’administration fiscale, à un seul destinataire. Autrement dit, les indivisaires ne reçoivent pas d’avis d’imposition séparée selon leur quote-part.

En présence d’un nombre réduit de propriétaires indivis ou coindivisaires (jusqu’à trois), chaque nom figure sur l’avis de taxe foncière correspondant dans le cadre « Vos références » (1ère page). L’avis est envoyé à l’indivisaire dont le nom arrive en premier dans l’ordre alphabétique.

Lorsque l’indivision est composée d’au moins quatre indivisaires, seul le nom de l’indivisaire dont la part est prépondérante est identifié. Dans ce cas, la présence d’autres propriétaires en indivision est mentionnée par les termes « et consorts » ou « et copropriétaires » ou encore « et autres titulaires de droit », sans mention du nom de chacun.

Dans tous les cas, cela ne signifie pas que seul le destinataire de l’avis doit payer seul la taxe foncière : chacun dont payer une fraction de taxe foncière, proportionnellement à sa part détenue dans l’indivision (lire le chapitre Taxe foncière en indivision : quelle solidarité entre propriétaires indivis ?).

Que veut dire « prop indivis » sur l’avis de taxe foncière ?

Certains propriétaires de biens en indivision reçoivent un avis où figure la mention « PROP/INDIVIS » dans le cadre « Vos références ». Ce terme désigne le ou les autres propriétaires titulaires d’un droit sur le bien au titre de l’indivision.

Cela signifie que chaque personne désignée sur l’avis doit payer sa quote-part de taxe foncière, correspondant à sa part d’indivision.

Cette mention « PROP/INDIVIS »existe lorsque l’indivision est composée au maximum de trous propriétaires indivis.

Taxe foncière en indivision : quelle solidarité entre propriétaires indivis ?

Au BOFiP, l’administration fiscale énonce clairement que « l’imposition collective n’implique pas l’obligation solidaire de chacun des copropriétaires au paiement de la totalité de la cotisation de taxe foncière ». Le fisc précise en outre que « la répartition des impôts entre les membres d’une indivision est une question relevant du droit privé qui n’est résolue en aucun cas par le libellé de l’avis d’imposition ».

Ces positions ont plusieurs conséquences pratiques.

En premier lieu, les propriétaires indivis doivent s’entendre sur la répartition de la taxe foncière, l’impôt n’étant pas uniquement à la charge de celui qui reçoit l’avis. S’ils ne parviennent pas à s’entendre, ce sera à la justice de trancher sur saisine de l’un des coindivisaires.

Ensuite, l’administration fiscale ne peut pas mettre la taxe foncière à la charge d’un seul propriétaire indivis au nom des autres. Dans sa décision du 17 novembre 2005, la Cour administrative d’appel de Douai énonce ainsi que « l’obligation de payer la taxe foncière incombant à un propriétaire indivis ne saurait excéder ses droits dans l’indivision ». Un principe réitéré par le Conseil d’État dans un arrêt rendu le 20 octobre 2016 (arrêt CE n° 388940).

Taxe foncière et indivision successorale

Souvent, l’indivision résulte du décès du propriétaire. Que se passe-t-il dans ce cas d’indivision successorale au regard de la taxe foncière ?

Les principes généraux évoqués ci-dessus s’appliquent une fois que le transfert de propriété est effectif. Mais il y a lieu de s’intéresser également aux situations dans lesquelles la mutation cadastrale n’a pas été effectuée (autrement dit tant que l’attestation de propriété n’a pas été publiée au service de publicité foncière, en charge de l’enregistrement des informations sur les biens immobiliers et l’identité de leurs propriétaires).

Selon l’article 1403 du CGI, « tant que la mutation cadastrale n’a pas été faite, l’ancien propriétaire continue à être imposé au rôle, et lui ou ses héritiers naturels peuvent être contraints au paiement de la taxe foncière », peut-on lire dans le texte de loi. En d’autres termes, en cas d’indivision entre les héritiers, le Trésor public établit un avis d’imposition au nom du propriétaire défunt. Et ce sont ses héritiers qui sont tenus de payer la taxe foncière proportionnellement à leur part dans l’indivision.

Indivision et exonération de taxe foncière

Exonération de taxe foncière (pour personnes modestes, âgées, titulaires de l’Aspa ou de l’AAH) et indivision ne sont pas incompatibles, en tout cas quand la propriété est en indivision avec d’autres personnes que son conjoint.

Le cas particulier de l’exonération de taxe foncière sur un immeuble détenu en indivision est traité au BOFiP (BOI-IF-TFB-10-50-40 §160).

Il y est indiqué que « lorsqu’un immeuble indivis est habité exclusivement par les copropriétaires, la circonstance que l’un de ces derniers seulement remplisse les conditions requises pour obtenir l’exonération ne fait pas obstacle à ce que l’intéressé en bénéficie ».

Cependant, l’exonération concerne uniquement le propriétaire indivis éligible « dans la limite de la quote-part d’impôt lui incombant, à condition qu’il ait la disposition privative d’un logement dans l’immeuble indivis ».

Enfin (source réponse ministérielle Fischer n° 11875, JO du Sénat du 18 mars 2010, page 691), dans la circonstance où l’indivision concerne le conjoint survivant et les héritiers du défunt le fisc admet « que l’exonération totale soit accordée au conjoint survivant, quels que soient ses droits sur le logement, à condition qu’il occupe seul ce logement et remplisse les autres conditions posées par l’article 1391 du CGI », soit un âge minimum de 75 ans au 1er janvier de l’année de l’imposition et dans la limite du plafond d’exonération.

Taxe foncière et indivision après un divorce

Un divorce ne suffit pas à remettre en cause une indivision, en tout cas au regard de la taxe foncière. C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 13 janvier 2016. Dans l’affaire traitée, un couple détenait un terrain en indivision, sur lequel il a fait construire sa maison. Suite à un divorce, Monsieur a continué d’occuper le bien, sans que l’indivision ne soit remise en cause, et a pris en charge le paiement intégral de la taxe foncière. Dans le cadre de la procédure judiciaire, il a demandé la restitution d’une partie des sommes versées (12.796 euros), au motif que son ex-épouse est redevable d’une partie de l’impôt foncier en tant qu’indivisaire. Une requête rejetée par la Cour d’appel de Basse-Terre qui a jugé que le paiement revient à l’occupant d’un bien indivis.

La Cour de cassation s’est donc opposée au jugement d’appel. Les juges du fond ont en effet rappelé que « l’impôt foncier (…) incombe à l’indivision jusqu’au jour du partage en dépit de l’occupation privative ». Autrement dit, la taxe foncière n’est pas réclamée à l’un ou à l’autre propriétaire mais bien à l’indivision qu’ils ont constituée. Un divorce ne remet pas en cause ce fonctionnement tant que l’indivision existe : seule sa fin peut permettre à l’un des deux ex-époux de ne plus avoir à s’acquitter de l’impôt local. De même, il n’existe pas de solidarité entre les indivisaires pour le paiement de la taxe foncière, chacun étant tenu de payer la part qui lui revient et pas un euro de plus.

Pour rappel, la personne qui occupe seule un bien détenu en indivision, comme l’ex-mari dans cette affaire, doit verser une indemnité d’occupation aux autres indivisaires. En revanche, la loi ne prévoit pas d’ajustement concernant la fiscalité dans ce cas de figure et ne permet aucune exonération de taxe foncière pour un propriétaire en indivision qui n’habite pas le logement.

Nos offres sélectionnées pour vous :

ARTICLES CONNEXES
Menu