Ces préjugés sur la retraite battus en brèche

Par Jean-Philippe Dubosc

Baisse des pensions, papy-boom, inégalité hommes-femmes…, les idées reçues sur la retraite sont nombreuses. La plupart se révèlent, après vérification, fausses.    

La retraite moyenne a augmenté de 1,2% en euros contants entre 2013 et 2014

– Les retraites ne baissent pas
Contrairement à ce que l’on a coutume de dire, le montant moyen des pensions ne recule pas en France. Il progresse même d’année en année. D’après l’enquête annuelle de la Drees (*) publiée le 28 avril 2016, la retraite totale moyenne de droit direct (hors les pensions de réversion versées aux veufs et veuves) s’est élevée à 1.322 euros bruts par mois en 2014, en hausse de 1,2% en euros constants (c’est-à-dire en prenant en compte l’inflation) par rapport à 2013. A titre de comparaison, elle se situait à 1.029 euros bruts par mois en 2004.
Cette augmentation continue s’explique par ce que les économistes appellent « l’effet de noria ». Compte tenu de la hausse des qualifications et du développement du statut de cadre, le niveau des salaires, qui sert de base de calcul à la pension, a tendance à progresser. Par ailleurs, certains droits à la retraite, notamment les trimestres octroyés gratuitement au titre de la maternité ou de l’invalidité, ont été améliorés au fil des ans. Résultat : les nouveaux retraités perçoivent en moyenne des retraites plus élevées comparés à leurs aînés.

– Le nombre de nouveaux retraités n’augmente pas forcément
Le déficit des régimes est souvent justifié par l’arrivée massive à la retraite des « papy-boomer », cette génération née après la Seconde guerre mondiale, un tiers plus nombreuse que les autres classes d’âge. Si le phénomène du « papy-boom » est réel, ses effets ne sont pas continus. Ainsi, toujours selon la Drees, 702.000 assurés, tous régimes confondus, ont liquidé leurs droits à la retraite en 2014. Soit 7,4% de moins qu’en 2013 (758.000 personnes).
La baisse a été encore plus forte en 2012 (- 11%) et en 2011 (- 12%). Ces résultats, qui peuvent surprendre, résultent du report progressif de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans d’ici 2017 instauré par la loi Woerth de 2010. Ces effets devraient s’estomper avec le temps. A moins qu’une nouvelle réforme repousse de nouveau l’âge légal…

– Les inégalités entre les hommes et les femmes se réduisent
Le montant moyen de la pension des retraitées a atteint 1.007 euros bruts par mois en 2014, contre 1.660 euros bruts par mois pour leurs homologues masculins. Si l’écart est important (39,3%), il diminue d’année en année. Ainsi, le « gap » s’élevait à 45,4% en 2004.
L’augmentation du taux d’activité chez les femmes ainsi que la hausse de qualification de la population féminine expliquent cette réduction. « En outre, l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) mise en place en 1972 leur permet, sous certaines conditions, d’acquérir des droits à pension au titre de l’éducation des enfants », souligne la Drees. Il n’empêche, l’écart de pension entre hommes et femmes devrait encore atteindre 25% en 2060, selon les projections du Conseil d’orientation des retraites (COR). En cause : les différences salariales entre les sexes qui persistent.

– Les Français sont plus nombreux à cotiser plus que demandé
Les actifs ont compris qu’ils étaient condamnés à cotiser, et donc à travailler, plus longtemps afin d’augmenter les recettes des régimes de retraite et combler leur déficit. La réforme Touraine de 2014 a ainsi allongé la durée de cotisation dans les régimes de base de 41,5 à 43 ans d’ici 2035 et l’accord Agirc-Arrco du 30 octobre 2015 prévoit un malus temporaire de 10% sur les pensions complémentaires pour les salariés qui partent à 62 ans.
Loin de renâcler, les Français vont même plus loin. Une part de plus en plus importante d’entre eux cotise au-delà de la durée de cotisation exigée. 13,4% des salariés sont partis à la retraite avec une surcote en 2014, contre 12% en 2013. Le pourcentage s’élève même à 31,9% chez les agriculteurs (30,8% en 2013). Les efforts sont, il est vrai, généralement payants : le gain moyen de pension lié à la surcote atteint 320 euros par mois chez les fonctionnaires civils d’Etat !

(*) Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des Affaires sociales.

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