AVIS D’EXPERT – Les Français sont nombreux à travailler outre-Manche. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne va peser sur les rentes qu’ils se constituent via le fonds de pension de leur employeur britannique. Sauf s’ils optent pour un transfert des sommes dans un produit viager français, comme l’expliquent Guillaume Hublot et Nicolas Médan, associés de KMH Gestion Privée.
Retraite : « Suite au Brexit, les expatriés français ont intérêt à transférer en France leur fonds de pension britannique »

Pour leur retraite, les salariés britanniques cotisent à des fonds de pension. C’est aussi le cas des expatriés français qui travaillent outre-Manche. Lorsqu’ils reviennent vivre en France, ces derniers ne peuvent plus alimenter leur fonds de pension britannique. En revanche, ils en gardent la jouissance.
Quand les anciens « expats » partent à la retraite, leur fonds britannique est débloqué et ils perçoivent une rente viagère (c’est-à-dire versée jusqu’à leur décès) à hauteur de leurs cotisations. Cette rente peut être conséquente, notamment pour les Français qui ont travaillé plusieurs années à la City.
Pour eux, mais aussi d’une manière générale pour nos compatriotes qui ont effectué une grande partie de leur carrière de l’autre côté de la Manche, le « Brexit » a des conséquences directes pour leur retraite. A la suite du vote en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), la livre sterling a perdu près de 15% face à l’euro.
Certains économistes prédisent même une parité entre les deux devises. Si tel est le cas, les rentes servies par les fonds de pension britanniques étant libellées en livres, les anciens expatriés français revenus vivre en France vont voir leurs rentes futures ou actuelles se déprécier de 30% !
Eviter le risque de change
Pour éviter une perte importante de pouvoir d’achat, ils ont donc intérêt à transférer au plus tôt leur fonds de pension dans l’Hexagone. Ainsi, leurs rentes seront versées en euros. Il n’y aura plus de risque de change.
Depuis 2006, le fisc britannique a mis en place la norme « QROPS » (pour Qualified Recognised Overseas Pension Schemes) en vue de permettre le transfert, en dehors du Royaume Uni, des sommes placées sur les fonds de pension constitués sur le sol anglais. L’opération doit toutefois respecter de nombreuses règles.
En France, le réceptacle financier qui respecte le mieux les conditions imposées par la norme QROPS est le plan d’épargne retraite populaire (Perp). Ce placement propose, à compter du départ à la retraite, le versement de rentes viagères. Il prévoit également, comme l’exige la norme QROPS, une sortie limitée en capital (à hauteur de 20% de l’encours). Si le transfert des sommes du fonds de pension dans un Perp est conseillé, il faut savoir que l’opération n’est pas aisée.
Une procédure longue et complexe
Tout d’abord, la procédure peut s’avérer longue. Le transfert nécessite une analyse du plan de pension du titulaire. Si l’intérêt du transfert est établi, il faut comparer les différentes possibilités, de manière à répondre au mieux aux attentes du bénéficiaire. Enfin, une fois la préconisation finale élaborée, les documents de transfert sont remplis, signés et adressés à la compagnie britannique en charge de la gestion des fonds. Celle-ci dispose d’un délai de six mois pour analyser à son tour la demande, principalement au regard du réceptacle. La compagnie doit ordonner le transfert ou motiver son refus.
Par ailleurs, l’établissement proposant la solution de remplacement doit s’engager à communiquer aux autorités fiscales britanniques le nom et l’adresse du bénéficiaire ainsi que la date, le montant et la nature du paiement effectué, pendant les dix années suivant le transfert. Il s’agit là pour le gouvernement anglais de contrôler que l’épargne constituée au titre de la retraite continuera à être utilisée en tant que telle. En cas de rupture des engagements, les sanctions peuvent être lourdes. Une peine fiscale pourra être infligée, représentant de 40% à 55% des sommes constituées.
Dernier écueil : compte tenu de la nouveauté du dispositif, de sa complexité et des obligations à respecter, peu d’assureurs français proposent le transfert. Seuls six Perp sont, pour l’heure, compatibles avec la norme QROPS. Dans tous les cas, la connaissance des acteurs impliqués dans le processus est fondamentale. Il convient de constituer un dossier irréprochable, mais aussi de de veiller à ne pas délivrer de pièces inutiles qui pourraient ralentir davantage la procédure. L’accompagnement d’un expert spécialisé s’avère particulièrement utile.
A propos des auteurs
Guillaume Hublot est diplômé supérieur du notariat et docteur en droit. Durant quatre ans, il dirige le service d’ingénierie patrimoniale de l’étude notariale parisienne Oudot et Associés. Il fonde par la suite la société de gestion privée KMH à Lyon avec son associé Nicolas Médan. Il poursuit une activité doctrinale et intervient fréquemment comme conférencier sur les thèmes de l’organisation du patrimoine et de sa transmission.
Nicolas Médan a été directeur des partenariats pour une compagnie d’assurance luxembourgeoise, puis directeur de clientèle privée pour l’un des plus anciens courtiers indépendants de Paris. Au cours de ces expériences, il a pu développer une expertise dans la création et la gestion de fonds, ou de contrats dédiés, expertise qu’il met quotidiennement au service de KMH, qu’il fonde avec Guillaume Hublot en 2007.
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