Exonération de taxe habitation : suppression d’un impôt jugé injuste par Macron
Le projet de suppression de la taxe d’habitation pour 80% des Français d’ici à 2020 a été annoncé sur RMC et BFMTV, en date du 24 février 2017, par Emmanuel Macron, alors candidat à l’Elysée, prétextant un impôt « injuste ». Ce que l’actuel président de la République avait confirmé le 13 juillet dans une interview accordée à Ouest France. « La réforme de la taxe d’habitation se fera en trois ans », avait-il affirmé.
Cette promesse de campagne destinée à relancer le pouvoir d’achat s’est muée en engagement présidentiel intégré à la loi de finances pour 2018 (LFI) mis en application par étapes de 2018 à 2020. Le texte de loi a été présenté le 27 septembre 2017 et publié au Journal officiel le 30 décembre 2017 (articles 5, 6 et 7) sur Légifrance, après sa validation par le Conseil constitutionnel. Entre temps, le périmètre de la mesure a été affiné : la suppression concerne uniquement la taxe d’habitation sur les résidences principales (THRP) et pas la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l’habitation principale (THRS).
L’exécutif a assuré que le manque à gagner pour les collectivités locales ferait l’objet d’une compensation à l’euro près par l’État. La suppression de la taxe a ainsi pris la forme d’un dégrèvement, qui voit l’État se substituer au contribuable.
Lors de la remise du rapport sur la fiscalité locale le 9 mai 2018, le gouvernement a dans un premier temps indiqué que la suppression complète de la taxe d’habitation devait intervenir au plus tard d’ici à 2021. Finalement, le 12 juin 2019, l’ancien Premier ministre Édouard Philippe a annoncé que la suppression totale de la taxe d’habitation sur les résidences principales s’effectuerait également sur 3 ans, soit de 2021 à 2023. D’ailleurs, les contribuables qui la paient encore ont bénéficié d’une baisse de taxe d’habitation en 2021 à hauteur de 30%. Une baisse complémentaire interviendra à l’automne 2022, avant la suppression totale prévue en 2023.
Ce calendrier de suppression a été confirmé par l’actuel Premier ministre Jean Castex, le 17 juillet, sur France 2, fermant la porte à la possibilité d’un report de l’exonération de taxe d’habitation pour les plus aisés, évoquée par Emmanuel Macron le 14 juillet 2020, pendant son entretien télévisé sur TF1 et France 2.
Suppression de la taxe d’habitation pour tous de 2021 à 2023
La suppression de taxe habitation pour tous les Français au titre de la résidence principale, c’est pour quand ? C’est seulement depuis 2019 que les contribuables sont fixés. Cette réforme doit être progressivement mise en œuvre jusqu’en 2023. Observateurs et opposants politiques à Emmanuel Macron n’ont pas manqué de souligner que la suppression totale de taxe d’habitation interviendrait un an après l’élection présidentielle de 2022.
Le gouvernement a acté la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales pour l’ensemble des contribuables après 2020. Des dispositions légales ont été prises en ce sens dans le cadre de la loi de finances pour 2020 (à l’article 16), dont le vote définitif est intervenu en décembre 2019.
La suppression de la taxe d’habitation en 2023, et donc la baisse de taxe d’habitation en 2021 et 2022, s’applique à tous les contribuables ne bénéficiant pas déjà de l’exonération totale depuis 2020, y compris à ceux qui sont imposables à l’impôt sur la fortune immobilière.
Baisse, puis suppression totale de la taxe d’habitation, sur 3 ans
Le gouvernement a engagé la seconde phase de la réforme, dont l’application interviendra après l’achèvement de la première, consistant à supprimer la taxe d’habitation pour 80% des ménages. « Pour les 20% de Français restants, la suppression se déploiera sur les trois années suivantes », a annoncé l’ancien Premier ministre Édouard Philippe lors de sa déclaration de politique générale, à la tribune de l’Assemblée nationale, le 12 juin 2019.
Le dispositif prévu à l’article 16 de la loi de finances pour 2020 instaure un processus par étapes similaire à celui suivi pour 80% des foyers, une nouvelle exonération est instaurée pour les 20% de ménages qui la paient encore, de la façon suivante :
- exonération de 30% en 2021 (baisse de taxe d’habitation)
- exonération de 65% en 2022 (baisse de taxe d’habitation)
- suppression totale en 2023 (plus de taxe d’habitation sur la résidence principale)
Cette suppression par étape, échelonnée sur trois années, vise notamment à en lisser l’effet pour les finances publiques, tout en concourant à l’objectif affiché par l’exécutif de ne pas financer la réforme par de nouveaux impôts.
Parallèlement, la loi prévoit un gel des taux d’imposition d’une part, et une absence de revalorisation forfaitaire des valeurs locatives des résidences principales d’autre part, de 2021 à 2023. Cette disposition a pour objectif d’éviter la hausse de taxe d’habitation sur les résidences principales pour les contribuables encore soumis à la taxe d’habitation.
Suppression de taxe habitation pour tous les Français en 2023
La réforme présentée par le gouvernement et votée par le Parlement vise à faire en sorte que plus aucun foyer ne paie de taxe d’habitation sur sa résidence principale en 2023. C’est que ce que prévoit la loi à ce stade, sachant que le gouvernement a fermé la porte au report éventuel évoqué par Emmanuel Macron lors de son interview télévisée du 14 juillet 2020.
Le 20 juillet 2020, sur RMC et BFM TV, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a confirmé « maintenir le calendrier de suppression totale de toute la taxe d’habitation pour tous les ménages », hors résidences secondaires, c’est-à-dire, pour la dernière tranche, les 20% de contribuables qui doivent encore la payer en 2020, « plus de taxe d’habitation pour personne » en 2023.
Au total, les foyers payaient la taxe d’habitation sur leur habitation principale bénéficieront d’un gain moyen estimé à environ 730 euros par foyer selon les estimations de Bercy, sur la base des valeurs locatives revalorisées au titre de 2019.
Pas de substitution de la taxe d’habitation par un nouvel impôt
A l’origine, le président de la République avait annoncé le 17 juillet 2017 la constitution d’une commission de travail associant les collectivités territoriales en vue de réfléchir à « une refonte de la fiscalité locale et en particulier en substitution de la taxe d’habitation », éventuellement à l’affectation d’une « part d’impôt national qui pourrait être attribuée aux communes, une part de CSG ou de CRDS qui est un impôt proportionnel, plus intelligent que ne l’est aujourd’hui l’actuelle taxe d’habitation ».
Toutefois, son ministre de l’Economie Bruno Le Maire a tenu à affirmer, le 12 janvier 2018 sur RMC et BFM TV, qu’il n’y aurait pas de substitution de la taxe d’habitation par un autre impôt.
« On ne supprime pas impôt pour en rétablir un autre. On ne prend pas dans la poche des Français ce qu’on vient de leur donner d’une autre main. C’est un principe fondamental. Il n’est pas question d’augmenter la TVA, il n’est pas question d’augmenter une taxe locale, il n’y aura pas de nouvel impôt en France dans le quinquennat. »
Une volonté réaffirmée par l’ancien ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, dans une interview donnée au Parisien le 26 avril 2018. Il soulignait que la suppression de la taxe d’habitation se ferait sans compensation « il n’y aura pas de tour de passe-passe où l’on supprime des milliards pour aller les chercher ailleurs ». Il estimait que « le manque à gagner sera compensé par le dynamisme des recettes de TVA ou de CSG ».
Le dispositif présenté dans la loi de finances 2020 ne prévoit en effet aucune taxation supplémentaire en remplacement, mais il est question pour Bercy d’améliorer le recouvrement de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS), notamment par la mise en place d’un portail déclaratif que les propriétaires devront alimenter.
Qui paie ou ne paie pas de taxe d’habitation ? Et combien ?
La taxe d’habitation est un impôt local, dû par un contribuable occupant au 1er janvier de l’année une habitation en tant que résidence principale ou secondaire. Contrairement à la taxe foncière dont seul le propriétaire est redevable, la taxe d’habitation est due que l’on soit locataire ou propriétaire occupant.
Environ 30 millions d’avis d’imposition sont émis chaque année, mais certains concernent uniquement la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (plus de 3,3 millions en France, source Insee) ; désormais une large partie de la population est non imposable.
En moyenne, la taxe d’habitation a atteint 662 euros par ménage en 2016, tous ménages confondus, dont 583 euros en moyenne, au titre des résidences principales. En ne retenant que les foyers effectivement imposables, ceux-ci ont payé en moyenne une taxe d’habitation de 705 euros (source : évaluations préalables du PLF 2018) ou 783 euros (chiffres OFCE – Observatoire français des conjonctures économiques).
Baisse de la taxe d’habitation, pour qui ?
En 2021, environ 80% des ménages n’ont pas payé de taxe d’habitation sur leur résidence principale. Qui sont les 20% restants qui la paient encore, avec une réduction ?
La baisse de taxe d’habitation prévue dans la loi de finances 2020 est accordée sous conditions, au-delà d’un certain seuil de revenus (sous ce seuil, on ne paie pas de taxe d’habitation sur sa résidence principale).
Critères d’exonération : les conditions de revenus pour un célibataire, un couple…
Le seuil d’exonération, au-delà duquel on paie encore la taxe d’habitation en 2022, dépend de la composition du foyer fiscal selon les critères choisis par le gouvernement. Ces plafonds, basés sur le revenu fiscal de référence et actualisés chaque année, sont les suivants pour l’année 2022 :
- personne célibataire sans enfant (1 part fiscale) : RFR inférieur à 28.150 euros
- personne seule avec 2 enfants – famille monoparentale (2 parts fiscales) : RFR inférieur à 44.830 euros
- couple sans enfant (2 parts fiscales) : RFR inférieur à 44.830 euros
- couple avec 1 enfant (2,5 parts fiscales) : RFR inférieur à 51.085 euros
- couple avec 2 enfants (3 parts fiscales) : RFR inférieur à 57.340 euros
- couple avec 3 enfants (4 parts fiscales) : RFR inférieur à 69.850 euros
- puis +6.255 euros de RFR par demi-part supplémentaire
Le revenu pris en compte est le RFR de l’année précédente :
- revenus 2020 pour la baisse de taxe d’habitation 2021
- revenus 2021 pour la baisse de taxe d’habitation 2022
- en 2023, tout le monde sera exonéré
Exonération partielle : quel plafond de revenus ?
La loi prévoit un mécanisme de lissage de sorte qu’un contribuable puisse bénéficier partiellement de l’allègement de la taxe d’habitation si ses revenus le situent juste au-dessus du plafond de revenu fiscal de référence ouvrant droit à l’exonération totale. Ces contribuables bénéficient ainsi de deux allègements d’impôt simultanément en 2021 et en 2022 :
- exonération partielle dégressive : allègement spécifique pour les personnes dont les revenus se situent entre les bornes ci-dessous
- exonération partielle fixe : baisse de taxe d’habitation de 65% en 2022 (après -30% en 2021)
Ces seuils conditionnant l’octroi d’une exonération partielle, qui dépendent du nombre de parts fiscales du foyer, sont les suivants pour l’imposition de 2021 :
- 1 part fiscale : revenu fiscal de référence (RFR) compris entre 28.150 et 29.192 euros
- 2 parts fiscales : RFR compris entre 44.830 et 46.914 euros
- 2,5 parts fiscales : RFR compris entre 51.085 et 53.169 euros
- 3 parts fiscales : RFR compris entre 57.340 et 59.424 euros
- 4 parts fiscales : RFR compris entre 69.850 et 71.936 euros
Calendrier de suppression de taxe d’habitation de 2018 à 2023
A partir de quand la réforme s’applique-t-elle ? Le calendrier de mise en place de l’exonération de la taxe d’habitation a été fixé :
- dans la loi de finances pour 2018 pour les premiers 80% des ménages (article 5)
- dans la loi de finances pour 2020 pour les 20% restants qui la paient encore (article 16)
Calendrier de suppression de taxe d’habitation pour tous
- 2018 : allègement de 30% sous conditions de ressources (sauf hausse des taux depuis 2017)
- 2019 : allègement de 65% sous conditions de ressources (sauf hausse des taux depuis 2017)
- 2020 : suppression totale de taxe d’habitation (et taxes annexes) pour 80% des ménages
- 2021 : baisse de 30% pour les contribuables payant encore la taxe d’habitation
- 2022 : baisse de 65% pour les contribuables payant encore la taxe d’habitation
- 2023 : suppression de taxe habitation sur la résidence principale pour tous les Français, maintien d’une taxe d’habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l’habitation principale
Baisse de taxe d’habitation 2022 en cas de mensualisation dès janvier
Il est possible de bénéficier de la baisse de la taxe d’habitation immédiatement, sans attendre l’avis d’imposition de novembre ou décembre. Cela concerne les contribuables ayant opté pour la mensualisation de leur impôt.
Dans ce cas, la diminution n’est pas automatique : il faut effectuer une démarche dans son espace personnel sur impots.gouv.fr (rubrique « Modifier mes prélèvements, moduler mes mensualités »). La modulation à la baisse s’applique en indiquant le montant annuel de la taxe d’habitation 2022. La prise en compte de toute modification du contrat de prélèvement mensuel intervient le mois suivant.
Les dernières mensualités de l’année feront l’objet d’un ajustement par l’administration, en fonction du montant définitif de la taxe d’habitation et des prélèvements mensuels déjà effectués.
Il est encore possible de devenir mensualisé pour l’année 2022. La date limite pour adhérer au prélèvement mensuel de la taxe d’habitation 2022 est fixée :
- au 15 décembre 2021 pour une application dès janvier 2022
- chaque mois pour application le mois suivant (possible jusqu’au 30 juin 2022)
Exonération pour la résidence principale, pas pour la résidence secondaire
Comme l’a affirmé le président de la République, la réforme cible les classes moyennes et populaires. La suppression de la taxe a donc vocation à ne porter que sur les résidences principales. D’ailleurs, « les résidences secondaires n’entrent pas dans le champ de la réforme », a indiqué une source proche du dossier à Toutsurmesfinances.com. Un propriétaire d’un appartement au bord de la mer pour y passer ses vacances est donc susceptible d’encore payer une taxe d’habitation sur sa résidence secondaire plein pot à l’horizon 2020, même s’il respecte par ailleurs la limite d’exonération au titre de sa résidence principale.
Lors de l’émission « Le Grand Rendez-vous » Europe 1-Les Echos-CNEWS du dimanche 20 mai 2018, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire a affirmé « nous avons dit que nous supprimerions la taxe d’habitation, nous le ferons, mais (…) sur la résidence principale. Ça ne me paraît pas juste d’expliquer que l’on va la supprimer aussi sur la résidence secondaire ». Il a reconnu que, pour le moment, le gouvernement n’a pas encore pris d’arbitrage définitif sur cette question.
Une telle disposition serait en phase avec la stratégie économique d’Emmanuel Macron, qui vise à favoriser l’investissement plutôt que la rente et se traduit par des mesures d’allègements d’impôts dont ne bénéficierait pas l’immobilier (réforme de l’ISF, prélèvement forfaitaire unique).
Baisse de taxe d’habitation : simulateur de calcul sur Impots.gouv.fr
L’État a mis en ligne sur impots.gouv.fr un simulateur de calcul afin d’estimer le montant de la taxe d’habitation 2022 et les gains de pouvoir d’achat liés à la suppression de la taxe d’habitation en 2022.
Pour procéder au calcul, 2 informations sont à renseigner :
Attention ! Il ne s’agit que d’une simulation servant à calculer un pourcentage d’économie d’impôt, et non le montant réellement dû.
Conséquences de la suppression de la taxe d’habitation dans les principales villes de France
Les sénateurs membres de la commission des finances ont obtenu de l’administration fiscale une évaluation des conséquences de la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des ménages commune par commune.
Dans 206 petites communes, plus aucun habitant ne paierait la taxe d’habitation en 2020, d’après cette évaluation.
Dans les 10 villes de France les plus peuplées, l’impact de la réforme serait le suivant :
Taxe habitation supprimée : un geste de Macron pour compenser la hausse de CSG sur les retraites
Pour les contribuables salariés qui n’étaient pas déjà exonérés de taxe d’habitation en 2017, la suppression de la taxe d’habitation représente un gain de pouvoir d’achat pur et simple. Pour certains retraités en revanche, il s’agit d’une mesure de compensation pour éviter que la hausse de CSG (contribution sociale généralisée) au 1er janvier 2018 décidée en parallèle ne pèse sur leur niveau de vie.
En effet, les allocataires d’une pension de retraite soumis à la CSG à taux plein ont vu le montant versé par leur caisse de retraite amputé d’une retenue à la source de 8,3% contre 6,6% à cause de l’augmentation de CSG entrée en vigueur le 1er janvier 2018. Pendant un temps, s’est posé la question du seuil au-delà duquel les retraités ne seront plus exonérés de taxe d’habitation.
Lors de la campagne présidentielle, dans un argumentaire intitulé « Convaincre vos grand-parents », l’équipe d’Emmanuel Macron avait évoqué un plafond d’exonération spécifique pour les retraités :
- moins de 2.000 euros par mois pour une personne seule
- moins de 4.000 euros par mois pour un couple de retraités
Cependant, à la lumière des textes finalement votés, les retraités ne bénéficient pas d’un seuil d’exonération spécifique puisque le dispositif de dégrèvement n’est pas fondé sur l’âge mais uniquement sur le revenu fiscal de référence.