Le Conseil d’analyse économique, qui dépend de Matignon, préconise de supprimer les dispositifs en faveur des demandeurs d’emploi proches de la retraite pour les inciter à se maintenir en activité.
Bientôt moins d’indemnités pour les chômeurs seniors ?
En matière d’emploi des seniors, le Conseil d’analyse économique (CAE) n’y va pas avec le dos de la cuillère. Alors que les partenaires sociaux, gestionnaires de l’Unedic, négocient actuellement une nouvelle convention sur l’assurance chômage, cette institution placée sous l’autorité du Premier ministre a présenté le 31 mai 2016 une série de recommandations iconoclastes pour combattre le sous-emploi des quinquas et sexagénaires français.
Certes, sous l’effet de la suppression des préretraites et du recul progressif de l’âge légal de départ de 60 à 62 ans, le taux d’activité des 55-64 ans a sensiblement augmenté en France ces dernières années, reconnaît le CAE. 47% de cette classe d’âge étaient en poste en 2014, contre 38% en 2008. Il n’empêche, ce pourcentage est inférieur de 10 points à la moyenne des pays développés et de 20 points à celle des pays scandinaves, souligne le Conseil.
Durée d’indemnisation abaissée à 2 ans
Pour cet aéropage d’économistes de tous bords, le problème est que le système actuel d’indemnisation chômage serait trop favorable aux demandeurs d’emploi seniors et ne les pousserait donc pas à retrouver du travail. En conséquence, le CAE propose de supprimer purement et simplement les dispositions spécifiquement mises en place pour cette population. Ainsi, la durée d’indemnisation des chômeurs de 50 ans et plus ne serait plus de trois ans, mais de deux ans comme pour les autres catégories de demandeurs d’emploi.
En outre, il serait mis fin à l’extension des droits au chômage jusqu’à l’âge de retraite à taux plein. Aujourd’hui, un chômeur indemnisé qui atteint l’âge légal (62 ans) sans disposer de tous les trimestres de retraite requis pour percevoir une pension complète a la possibilité de toucher les Assedics jusqu’à l’âge d’annulation de la décote (67 ans). Un dispositif qui compte seulement 20.000 bénéficiaires mais coûte la bagatelle de 360 millions d’euros par an, a calculé le CAE.
Des malus pour les entreprises qui licencient
Des chômeurs âgés de 59 ans sont assurés à la fois d’être indemnisés durant 8 ans par Pôle Emploi et de partir à la retraite à 67 ans sans abattement. « Si ce mécanisme n’est pas très connu des Français, il l’est des DRH (direction des ressources humaines, NDLR) qui l’utilisent pour inciter les salariés de 59 ans et plus à partir de l’entreprise », observe Corinne Prost, chef du département des études économiques à l’Insee et membre du CAE. Du coup, ces dispositifs qui visaient à l’origine à compenser la grande difficulté des chômeurs seniors à retrouver du travail génèreraient paradoxalement davantage de demandeurs d’emploi proches de la retraite, d’après le Conseil.
Reste que les experts du CAE sont conscients qu’une partie des entreprises souhaitent se débarrasser de leurs salariés quinquas aux motifs qu’ils seraient moins productifs et surtout plus chers comparés aux jeunes. C’est pourquoi l’institution souhaite l’instauration d’un « bonus-malus » pour les employeurs. Les entreprises dont le turn-over est élevé (y compris chez les jeunes salariés) subiraient une majoration de leurs cotisations chômage et inversement. « Ce système est mis en place depuis longtemps dans certains Etats américains et fonctionne très bien », constate Jean-Olivier Hairault, professeur d’économie à la Sorbonne. Pas sûr que le patronat tricolore reprenne cette idée dans la négociation Unedic…
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