Les locataires le savent, l’état des lieux de sortie se prête facilement à des litiges. La fin d’un bail de location s’avère parfois tendue, notamment quand il est question de déterminer le montant des réparations à la charge du locataire. Là où un bailleur va voir une moquette mal entretenue par exemple, l’occupant va plutôt avoir tendance à mettre en avant son ancienneté pour justifier sa détérioration.
Autrement dit, il faut pouvoir faire la différence entre les dégradations commises par le locataire et l’état d’usure du logement. Pour ce faire, un décret publié au Journal officiel du 31 mars 2016 fixe les modalités de prise en compte de la vétusté d’un logement au moment d’établir l’état des lieux de sortie. Elle y est définie comme « l’état d’usure ou de détérioration résultant du temps ou de l’usage normal des matériaux et éléments d’équipement ».
Attention : Si un propriétaire laisse un logement se détériorer dans le temps, sans réaliser de travaux, le locataire n’est plus responsable des réparations locatives.
Aucune obligation
Plus précisément, le texte, qui entre en vigueur le 1er juin 2016, ne met pas en place une grille de vétusté unique et valable pour toutes les locations mais indique à quels documents existants locataires et bailleurs peuvent se référer.
Surtout, il faut préciser que ce décret d’application de la loi Alur sur le logement n’impose rien. « Les parties au contrat de location peuvent convenir de l’application d’une grille de vétusté dès la signature du bail », indique-t-il. Dès lors, il reste tout à fait possible de signer un bail de location, vide ou meublée, sans évoquer la question de l’usage du logement et de ses équipements.
A l’inverse, s’ils décident de se référer à un document particulier pour évaluer la vétusté, celui-ci doit définir au minimum « une durée de vie théorique et des coefficients d’abattement forfaitaire annuels affectant le prix des réparations locatives auxquelles serait tenu le locataire ».
A quoi ressemble une grille de vétusté ?
Concrètement, les grilles de vétusté listent les équipements du logement par catégories (revêtements, huisseries, plomberie, chauffage…) et déterminent quatre paramètres à prendre en compte :
– La durée de vie de l’équipement ;
– L’abattement annuel forfaitaire à appliquer au coût de la réparation ;
– La période de franchise, durant laquelle le locataire est considéré comme intégralement responsable du paiement des réparations ;
– La quote-part résiduelle du locataire, qui correspond à la part des réparations qui restent à sa charge quoiqu’il arrive, y compris si la durée de vie théorique de l’équipement a expiré.
Comment utiliser une grille de vétusté : l’exemple de la moquette
Habituellement, la durée de vie théorique d’une moquette est de sept ans. Si la période de franchise est fixée à un an, le locataire supportera le coût total de sa remise en état dès lors qu’elle intervient dans les douze mois suivant son entrée dans les lieux.
En imaginant un abattement forfaitaire annuel de 15%, celui-ci commence à s’appliquer après la période de franchise. Ainsi, si une réparation est nécessaire après quatre années passées dans le logement, le locataire paiera 55% du coût de la réparation : il bénéficie dans ce cas d’une déduction de 45% du coût (un an de franchise et trois fois 15% d’abattement).
Si le locataire quitte les lieux huit ans après son emménagement, la durée de vie théorique de la moquette est expirée. Mais dès lors qu’une quote-part résiduelle est instaurée (10% par exemple), le locataire sortant devra s’acquitter de celle-ci, même si l’équipement a excédé sa durée de vie théorique et que le locataire n’est absolument pas responsable de sa détérioration.
Les grilles de vétusté de référence
Les documents approuvés par la loi
Le décret du 31 mars 2016 détermine les grilles de vétusté existantes qui peuvent être utilisées comme référence par un bailleur et son locataire. Il s’agit des documents qui ont fait « l’objet d’un accord collectif de location » conclu au sein de la Commission nationale de concertation (CNC) qui réunit les représentants de bailleurs et locataires.
Ces accords, qui s’appliquent à toutes les parties prenantes, sont passés dans divers secteurs locatifs, à savoir :
– Le logement social ;
– Les logements loués par des sociétés d’économie mixte, des sociétés immobilières à participation majoritaire de la Caisse des dépôts et consignations, des collectivités publiques ou d’une filiale d’Action Logement (ex-1% Logement) ;
– Les logements loués par des investisseurs institutionnels (assureurs, banques et personnes morales autres que celles mentionnées ci-dessus) ;
– Les logements loués par des bailleurs particuliers ou des sociétés civiles immobilières (SCI) familiales.
En outre, il est possible de se référer aux grilles de vétusté établies dans les accords locaux conclus entre un acteur relevant d’une des catégories ci-dessus et une ou plusieurs associations de locataires.
A savoir : Dans les HLM, les occupants peuvent demander spécifiquement à faire appliquer la grille de vétusté relevant d’un accord local plutôt que celle relevant d’un accord collectif au niveau sectoriel.
Le choix de la grille
En dépit de ces différentes catégories de référence, bailleurs et locataires peuvent choisir n’importe quelle grille de vétusté s’ils parviennent à se mettre d’accord. Le décret dispose clairement qu’ils peuvent avoir recours à un document de référence « même si le logement en cause ne relève pas du secteur locatif régi par l’accord » collectif de location.
Autrement dit, un bailleur privé et son locataire peuvent décider d’utiliser la grille de vétusté établie par un organisme HLM en toute légalité.