INTERVIEW – Pour un expatrié, la déclaration de revenus n’a rien d’une évidence. D’autant que suivant sa situation, le contribuable non-résident se retrouve confronté à des démarches différentes. Le point avec Marion Chapel-Massot, directeur du pôle gestion privée du cabinet Equance.
« Trois situations à distinguer pour la déclaration de revenus des expatriés »
Toutsurmesfinances.com : Jusqu’à quand les expatriés peuvent-ils remplir leur déclaration de revenus sur Internet (impots.gouv.fr) dans les délais ?
Marion Chapel-Massot, directeur du pôle gestion privée du cabinet Equance : La date limite est fixée au mardi 7 juin 2016 pour l’impôt sur le revenu. Il en va de même pour la déclaration d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les patrimoines compris entre 1,3 et 2,57 millions d’euros, sauf si le non-résident ne touche pas de revenus de source française. Dans ce cas de figure, et au-delà du seuil de 2,57 millions d’euros, il faut retenir la date butoir du 15 juillet.
En pratique, comment les contribuables non-résidents doivent-ils déclarer leurs revenus ?
Trois situations sont à distinguer : les non-résidents qui touchent des revenus de source française, ceux qui sont partis s’installer à l’étranger en 2015 et ceux qui sont rentrés en France l’année dernière.
Pour les premiers, il faut retenir les formulaires habituels, soit le 2042 pour les salaires et pensions de retraite, le 2044 pour les revenus fonciers… En cas de départ en 2015, il faut remplir le 2042 (et autres le cas échéant) ainsi que le 2042-NR. Une personne qui a quitté la France au 1er juillet 2015 doit ainsi déclarer six mois de revenus en France sur le 2042 et six mois de revenus à l’étranger sur le 2042-NR. Elle doit également indiquer son changement d’adresse sur les deux formulaires.
« Plus de vigilance lors d’un retour en France »
Lors d’un retour en France, il faut être plus vigilant car les démarches sont plus compliquées. En réalité, il doit se prévoir bien à l’avance. Le contribuable doit notamment vérifier s’il est éligible ou non au régime fiscal des impatriés régi par l’article 155 B du code général des impôts. Il peut alors profiter d’une exonération, dans certaines limites, du supplément de rémunération directement lié à l’exercice d’une activité professionnelle en France.
En matière de déclaration, il suffit de remplir les formulaires habituels et de notifier le changement d’adresse, à moins de détenir des avoirs et de toucher des revenus de l’étranger. Une personne revenue en France qui avait souscrit un contrat d’assurance vie au Luxembourg par exemple doit ainsi remplir une déclaration 2047.
A savoir : Les non-résidents revenus dans l’Hexagone peuvent être exonérés d’ISF sur les avoirs détenus à l’étranger pendant cinq ans et n’ont pas à les déclarer à ce titre.
Que doit faire l’internaute lors de la déclaration de revenus en ligne pour retrouver les différents formulaires ?
Ils sont accessibles lors de la déclaration sur impots.gouv.fr en cliquant le bouton « Déclarations annexes ». Il se trouve en bas de page dans l’étape 3 « Revenus et charges ». Même chose pour la notice d’aide à la déclaration 2041-E.
Un expatrié installé à l’étranger doit-il déclarer la totalité de ses revenus à l’administration fiscale française ?
Sur ses revenus de source française, un non-résident est imposé sur ses salaires, traitements, pensions de retraite et rentes viagères. Il doit également déclarer ses revenus fonciers et de placements, comme les intérêts de produits d’épargne, les gains tirés d’un rachat sur un contrat d’assurance vie et les dividendes d’actions. Enfin, il est imposable sur ses plus-values immobilières réalisées en France. En revanche, ses plus-values mobilières sont exonérées d’impôt et n’ont pas à être déclarées.
« Pas de réduction d’impôt pour les non-résidents »
Quelles sont les règles à retenir en matière d’imposition ?
Concrètement, l’administration fiscale procède à une double liquidation de l’impôt. Quand elle reçoit la déclaration de revenus, elle le calcule comme si le particulier était un résident, en appliquant le barème de l’impôt sur le revenu notamment. Si le montant obtenu correspond à 20% ou plus des revenus déclarés, il est conservé tel quel.
Dès lors qu’il est inférieur, le fisc applique de fait un prélèvement de 20% à toutes les catégories de revenus imposables. Une exception existe toutefois lorsque le contribuable peut justifier que le taux de l’impôt français sur l’ensemble de ses revenus mondiaux serait inférieur à ce minimum.
Les intérêts de placements, dividendes et gains d’assurance vie font quant à eux l’objet d’une retenue à la source. Son taux dépend des conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et le pays d’accueil du non-résident.
A noter : Tous les revenus de placements des expatriés sont exonérés de prélèvements sociaux (CSG, CRDS… à 15,5%). « Il est important de le préciser car les banques ont tendance à les prélever quand même », souligne Marion Chapel-Massot. En revanche, les revenus fonciers et plus-values immobilières y sont encore soumis, en dépit de la jurisprudence européenne De Ruyter.
Existe-t-il d’autres particularités à mentionner pour la déclaration de revenus des non-résidents ?
Concernant les charges qui donnent droit à un avantage fiscal, un mécanisme spécifique s’applique. Si une charge génère une réduction d’impôt, comme l’emploi d’un salarié à domicile pour entretenir sa résidence en France, l’expatrié ne peut pas en bénéficier. En revanche, les non-résidents sont éligibles aux déductions fiscales.
Pour prendre l’exemple de l’immobilier, un expatrié peut déduire de ses revenus fonciers le montant des travaux réalisés dans un logement mis en location ou profiter du régime d’amortissement Robien. A l’inverse, il ne peut pas réduire son impôt grâce aux dispositifs de défiscalisation Pinel ou Scellier.
Propos recueillis par Thibault Fingonnet
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