Allocation aux adultes handicapés : du mieux au passage à la retraite

Par Thibault Lamy

La refonte des minima sociaux demandée par Manuel Valls est prévue en 2018 grâce à la fusion des aides existantes. D’ici là, l’allocation aux adultes handicapés devrait être simplifiée et perçue pour une durée plus longue.  

Dix pour le prix d’un ! La réforme des minima sociaux devrait passer par la fusion de 10 aides déjà existantes*. Le Premier ministre Manuel Valls a confirmé le 19 avril 2016 sur Facebook qu’elle sera « mise en œuvre en 2018 ». « Il faudra engager une refonte globale, en élargissant l’accès aux minima sociaux aux jeunes en difficulté, en les fusionnant tous (RSA, AAH, ASPA …) afin de les remplacer par une couverture socle unique pour celles et ceux qui en ont besoin », a expliqué le locataire de Matignon sur le réseau social.

Parmi les minima sociaux concernés : le revenu de solidarité active (RSA), l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) mais également l’allocation aux adultes handicapés (AAH). Et avant même la mise en place d’une « couverture socle commune », l’AAH devrait faire l’objet d’une remise à plat, comme recommandé dans le rapport du député socialiste Christophe Sirugue remis au Premier ministre le 18 avril.

Forte complexité

L’AAH, qui bénéficiait à 1,04 million de personnes en situation de handicap en 2014, est tout particulièrement dans le viseur de l’élu de Saône-et-Loire, missionné par Manuel Valls pour « repenser les minima sociaux ». Sa complexité est notamment soulignée. En cause : l’extinction des droits à l’allocation dès 65 ans, soit l’âge minimum d’attribution de l’allocation de solidarité aux personnes âgées. Seuls les bénéficiaires de l’AAH1, qui présentent un taux d’incapacité d’au moins 80%, peuvent prétendre à l’AAH, mais seulement en complément de l’Aspa.

Les personnes qui touchent l’AAH2, pour un taux d’incapacité compris entre 50 et 79%, sont exclues du mécanisme au motif que « son accès est lié à un défaut d’employabilité, qui n’a plus lieu d’être à l’âge de la retraite », explique le rapport. Elles ne peuvent dès lors percevoir que l’Aspa. Pour simplifier l’accès aux aides pour les personnes en difficulté, Christophe Sirugue soumet ainsi l’idée de « permettre aux bénéficiaires de l’AAH1 de continuer à percevoir l’AAH, sans avoir à solliciter l’Aspa, lorsqu’ils atteignent l’âge de départ à la retraite ».

A savoir : le scénario d’une couverture socle commune prévoit la mise en place d’une allocation de soutien accordée à partir de 65 ans pour les bénéficiaires de l’AAH1 et de l’AAH2. « Ce complément serait financé par l’Etat et pourrait atteindre le montant maximal actuel de l’AAH (hors socle) soit 407,65 euros. » Additionné aux 400 euros de la couverture socle commune, le montant de l’aide atteindrait ainsi 807,65 euros, soit le montant actuel de l’AAH.

Des erreurs d’attribution

Autre chantier avancé dans le document de 170 pages, celui de l’accès à l’allocation pour adultes handicapés (AAH). Attribuée par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), l’AAH pâtit d’un traitement parfois « léger ». Si 70% des disparités d’attribution relevées proviennent de différences sociodémographiques, « les divergences et erreurs d’attribution sont toutefois bien une réalité et elles doivent absolument être évitées afin de permettre à chacun de bénéficier de sa prestation à juste droit et traiter de la même manière les personnes en situation de handicap », relève Christophe Sirugue. Pour pallier les carences du système actuel, il recommande la diffusion de supports mieux adaptés sur le territoire et que l’Etat joue un rôle accru dans la procédure d’attribution de l’AAH.

Allonger la durée de perception

Dernière proposition soulevée dans le rapport, allonger la durée pendant laquelle les bénéficiaires perçoivent l’AAH. L’AAH1 est ainsi touchée pendant 10 ans au maximum, contre cinq ans seulement pour l’AAH2. Pour ne pas mettre en difficulté les allocataires dont la situation n’est pas susceptible d’évoluer, il est recommandé de ne plus limiter dans le temps la perception de l’aide. « L’AAH1 pourrait alors être perçue à titre dérogatoire pour une durée supérieure à la durée actuelle, voire à titre définitif dans les cas les plus graves. »

Outre ces simplifications, le rapport propose également un scénario alternatif consistant à regrouper les minima sociaux autour de cinq allocations. Rapprocher l’allocation pour adultes handicapés et l’allocation supplémentaire d’invalidité (Asi) est évoqué dans ce cadre. Ces deux aides peuvent concerner un même public et la compréhension du système de distribution en est troublée selon Christophe Sirugue : « Au-delà de la complexité des démarches pour l’usager et de l’illisibilité du système, les montants servis ne sont pas les mêmes », ajoute le rapport. En effet, alors que l’AAH peut atteindre 807,65 euros, l’Asi se limite à 702 euros par mois. Un différentiel qui pousse les personnes invalides à demander à tort à bénéficier de l’AAH en lieu et place de l’Asi.

Une proposition saluée par l’Association des paralysés de France (APF), qui dans un communiqué daté du 19 avril, se réjouit des avancées introduites par le rapport. « Ces mesures pourraient permettre dans l’immédiat de simplifier et de sécuriser les ressources des personnes en situation de handicap », explique l’APF, qui regrette cependant l’infime revalorisation de l’AAH, qui reste « très en dessous du seuil de pauvreté ».

*Revenu de solidarité active (RSA), allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA), allocation adulte handicapés (AAH), allocation supplémentaire d’invalidité (ASI), allocation de solidarité spécifique (ASS), allocation veuvage (AV), revenu de solidarité outre-mer (RSO), prime transitoire de solidarité (PTS), allocation temporaire d’attente (ATA) et allocation pour demandeur d’asile (ADA).

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