Copropriété : le fonds de travaux obligatoire de la loi Alur

Par Thibault Fingonnet

De nombreuses copropriétés doivent mettre en place un fonds de travaux spécifique au 1er janvier 2017. Certaines dérogations permettent d’échapper à cette nouvelle obligation qui va peser sur les charges des copropriétaires. Explications.  

Le fonds de travaux des copropriétés

Qu’est-ce que le fonds de travaux obligatoire d’une copropriété ?

Le 1er janvier 2017 marque l’entrée en vigueur d’une nouveauté issue de la loi Alur sur le logement dans les copropriétés, à savoir le fonds de travaux obligatoire. En quelques mots, les copropriétaires concernés vont devoir verser des provisions supplémentaires pour doter ce fonds de ressources financières suffisantes afin de mieux anticiper et supporter le coût de futurs travaux.

Quelles copropriétés sont soumises à cette obligation ?

En théorie, le fonds de travaux doit être constitué dans toutes les copropriétés. Mais la loi prévoit certaines dérogations pour :

Les immeubles neufs : l’obligation ne s’applique pas pendant cinq ans après la réception des travaux.
Les copropriétés de moins de dix lots : l’assemblée générale peut voter contre la constitution du fonds de prévoyance. L’unanimité des copropriétaires est requise pour prendre cette décision.

A savoir : la majorité du parc de copropriétés en France est composé d’ensembles de moins de dix lots. La plupart des copropriétaires pourront donc refuser de constituer un fonds de travaux s’ils en décident ainsi en assemblée générale.

Par ailleurs, les copropriétés dont le diagnostic technique global (DTG) montre que des travaux ne sont pas nécessaires pour les dix prochaines années peuvent également échapper au fonds de travaux. Cette exception s’avère toutefois plus théorique que concrète pour les immeubles anciens qui n’auraient pas été remis à neuf ou fait l’objet d’une lourde rénovation.

A savoir : le DTG devient obligatoire dans les copropriétés de plus de dix ans à partir du 1er janvier 2017.

Quels travaux doit financer ce fonds ?

L’épargne accumulée au fil du temps ne peut pas financer tous les travaux. La loi (article 14-2 de la loi de 1965 sur les copropriétés) vise précisément :

– Les travaux prescrits par les lois et règlements (arrêté préfectoral par exemple)
– Les travaux qui ne sont pas compris dans le budget prévisionnel, soit les travaux de conservation ou d’entretien de l’immeuble (hors maintenance), ceux portant sur des éléments d’équipement communs comme l’ascenseur, les travaux d’amélioration et les études techniques rendues nécessaires par ces différents chantiers
– Les travaux urgents pour la sauvegarde de l’immeuble, ordonnés par le syndic sans l’aval de l’assemblée générale par souci de rapidité.

Le montant alloué à un chantier ou à un autre dépend d’un vote des copropriétaires à la majorité absolue (50% + une voix de tous les copropriétaires, absents compris). Si la proposition est rejetée mais recueille au moins un tiers des voix, un nouveau vote à la majorité simple (50% + une voix des copropriétaires présents) peut être demandé.

Pour aller plus loin : Les majorités des votes de l’assemblée générale de copropriété

Qui doit constituer le fonds de travaux ?

Le syndic doit ouvrir et gérer un compte bancaire séparé dédié exclusivement à ce fonds de prévoyance. Il doit être distinct de celui du syndic et du compte dévolu au budget prévisionnel de la copropriété.

Concrètement, cela se traduit par plus de démarches administratives et de gestion, des frais bancaires pour les syndics et davantage d’opérations comptables, ce qui pourrait avoir un impact à la hausse sur les tarifs des syndics selon les professionnels.

A savoir : les prestations du syndic relatives au fonds de travaux sont incluses dans le forfait du contrat type de syndic. Elles ne doivent donc pas être facturées en supplément.

A combien s’élèvent les cotisations des copropriétaires ?

Outre une éventuelle augmentation des tarifs des syndics, le fonds de travaux alourdit les charges des copropriétaires. La loi impose une cotisation annuelle égale au minimum à 5% du budget prévisionnel. Son montant fait l’objet d’un vote à la majorité absolue des copropriétaires.

En d’autres termes, dans une copropriété où le budget prévisionnel est resté constant de 2016 à 2017, les copropriétaires devront supporter au minimum un supplément de 5% en 2017 par rapport aux provisions versées l’année précédente.

Si l’épargne accumulée au fil des années n’est pas utilisée et finit par atteindre le montant du budget prévisionnel annuel, le syndic doit inscrire deux propositions à l’ordre du jour de l’assemblée générale : le lancement d’un plan pluriannuel de travaux et la suspension des cotisations. Si les copropriétaires refusent le plan pluriannuel, ils pourront donc arrêter d’alimenter le fonds de prévoyance. Autrement dit, l’année où l’épargne placée sur le fonds devient égale ou supérieure au budget prévisionnel annuel (5.000 euros par exemple), les copropriétaires ne seront plus obligés de cotiser à ce titre.

Des copropriétaires désavantagés ? Tous les copropriétaires doivent participer au financement du fonds de travaux à part égale. Néanmoins, la loi ne dit pas que les chantiers financés grâce à cette épargne doivent profiter de la même manière à tout le monde. « Les 5% de cotisations vont être appelés sur la base des tantièmes de charges générales. Mais les chantiers financés peuvent relever d’une grille de répartition spéciale, pour des travaux sur l’ascenseur par exemple », explique le délégué général de l’Unis Géraud Delvolvé. En conséquence, certains copropriétaires pourraient se retrouver dans une situation où ils paieraient davantage qu’en l’absence de fonds de travaux, puisqu’ils n’auraient pas eu à contribuer. Une situation qui pourrait déboucher in fine sur des litiges judiciaires.

Pour aller plus loin : La répartition des charges de copropriétés (générales et spéciales)

Après la vente d’un appartement, que deviennent les cotisations versées ?

La loi est très claire à ce propos : les provisions versées au titre du fonds de travaux sont attachées au lot et non au copropriétaire. Traduction, elles ne sont pas remboursées par le syndic lorsque le copropriétaire vend son logement et quitte l’immeuble. Résultat, les cotisations du copropriétaire vendeur pourraient financer des travaux réalisés après son départ.

Néanmoins, acheteur et vendeur pourront s’entendre à l’amiable sur ce sujet, à l’aide notamment de l’état daté des charges acquittées par le copropriétaire sortant. In fine, le coût des provisions versées pour le fonds de travaux pourrait par exemple être répercuté sur le prix de vente.

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