Etat des lieux : les obligations du propriétaire bailleur

Par Thibault Fingonnet

Le constat d’état des lieux ne concerne pas que le locataire. Le propriétaire doit connaître et respecter certaines règles, en particulier s’il gère la location lui-même ou si une retenue sur le dépôt de garantie doit être effectuée.  

A l’entrée comme à la sortie, l’état des lieux est une étape cruciale dans une location. Comme son locataire, le propriétaire se doit de bien préparer ce constat. Et ce d’autant plus s’il assure lui-même la gestion locative de son logement. Mais quelles sont les obligations du bailleur lors de l’état des lieux ? Explications.

L’état des lieux est indispensable

En premier lieu, le bailleur ne doit pas faire l’impasse sur la réalisation des états des lieux, y compris s’il connaît personnellement son locataire et/ou lui fait entièrement confiance. Ces constats sont indispensables pour relever d’éventuelles dégradations dans le logement et déterminer si l’occupant peut en être tenu responsable.

Rappel : L’état des lieux doit être réalisé de manière contradictoire, c’est-à-dire en présence du propriétaire (ou de son mandataire) et du locataire.

Etat des lieux d’entrée

Si l’état des lieux d’entrée n’est pas fait, par négligence ou parce que le locataire s’y oppose, la loi considère que celui-ci a reçu le logement en bon état.

En conséquence, il est censé le rendre sans dégradations et sera présumé responsable des éventuels dommages. En cas de problème, c’est à lui de prouver qu’il n’est pas responsable, à l’aide de témoins par exemple. Si des dégradations sont relevées après son départ, il devra également démontrer qu’elles ne relèvent pas de son fait.

Pour le propriétaire, l’absence d’état des lieux d’entrée n’est pas une bonne nouvelle. Dès lors qu’un souci est relevé, il y a un risque de conflit. Et bien que la loi présume de la responsabilité du locataire, régler le litige peut rapidement devenir problématique, faute de preuve réelle de l’état du logement à son arrivée.

Attention : Si le propriétaire refuse d’établir le constat, il devra apporter la preuve que les dégâts relevés en fin de location incombent au locataire.

Etat des lieux de sortie

Sans état des lieux de sortie, le propriétaire ne peut pas retenir une partie ou l’intégralité du dépôt de garantie. Même si des dégradations sont constatées après son départ, la loi considère que le logement a été rendu en bon état.

Autre écueil à éviter pour un bailleur, le constat trop tardif. Le locataire est présumé responsable des dégradations, et doit prouver qu’il ne l’est pas le cas échéant, mais uniquement jusqu’à son départ. Si l’état des lieux est réalisé plusieurs mois après, la jurisprudence retient que c’est au bailleur de démontrer que le locataire est fautif.

Trois façons de mener l’état des lieux

Le propriétaire gère directement la location

Les états des lieux d’entrée et de sortie doivent comporter un minimum d’informations exigées par la loi. Les deux constats doivent pouvoir être comparés facilement (document unique ou présentation similaire).

A ne pas oublier : Les états des lieux doivent être datés et signés par les deux parties. Locataire et propriétaire doivent chacun repartir avec un exemplaire original.

Lorsque le propriétaire gère lui-même la location, sans passer par un professionnel, il doit procéder à l’état des lieux avec le locataire, à moins de faire appel à un huissier de justice (voir plus loin).

L’état des lieux doit donner une description précise du logement, pièce par pièce, et des équipements qui y figurent. Il ne faut donc pas se contenter de commentaires généraux et lapidaires (bon état, état moyen, etc.) mais détailler l’état du logement et le fonctionnement des équipements. Des photos peuvent compléter les descriptions. Chaque intervenant apporte les précisions qui lui paraissent nécessaires, y compris en cas de désaccord.

Exemples de descriptions précises

L’Agence nationale d’information sur le logement (Anil) propose sur son site des exemples de descriptions précises à préférer aux commentaires généraux :

  • Revêtements muraux : Tapisserie en très bon état sauf traces de meubles et cadres (plutôt que très bon ou bon état), peinture écaillée par endroits/tapisserie décolorée par le soleil (plutôt qu’état moyen) ;
  • Sols : Parquet en bon état à l’exception d’une latte fendue (plutôt que bon état), carrelage comportant un carreau cassé ou ébréché (plutôt qu’état moyen), moquette neuve ou usagée ou tachée ;
  • Plafonds : Bon état ou tachés ou fissurés ;
  • Portes, fenêtres, placards : Eclats de bois, peinture abîmée (plutôt qu’état moyen ou d’usage) ;
  • Serrures : Bon état mais dépareillées ;
  • Sanitaires : Lavabo neuf, fêlé ou présentant des éclats.

Outre ces descriptions, le propriétaire doit procéder aux relevés des compteurs d’eau, de gaz et d’électricité à l’entrée comme à la sortie.

Attention : Pour bien juger de la dégradation du logement, le bailleur doit prendre en compte la vétusté du bien et de ces équipements.

La gestion locative est assurée par un professionnel

Le propriétaire n’a pas à être présent. Son mandataire (agent immobilier, administrateur de bien) se charge de la réalisation des états des lieux avec le locataire.

Revers de la médaille, le bailleur doit payer ces prestations. Pour l’état des lieux d’entrée, le locataire ne peut pas payer plus de trois euros par mètre carré et sa facture ne peut pas être supérieure à celle du propriétaire. Le coût assumé par celui-ci varie en fonction des caractéristiques du logement (taille, dépendances…) et des professionnels.

A la sortie, le propriétaire prend en charge l’intégralité de la note. Ce constat ne peut jamais être facturé au locataire, sauf si l’une des deux parties fait appel à un huissier de justice pour trancher un désaccord.

Constat par huissier de justice

Lorsque l’état des lieux ne peut pas être réglé à l’amiable, le propriétaire ou le locataire peut faire appel à un huissier de justice. Celui-ci convoque les deux parties sept jours à l’avance par lettre recommandée afin qu’elles soient présentes et puissent faire part de leurs remarques. L’officier public se charge de la description du logement. Le coût de cette prestation est réglementé par la loi et chaque partie doit en payer la moitié.

Pour aller plus loin : Combien coûte un état des lieux fait par un huissier ?

Il est également possible d’avoir recours aux services d’un huissier de justice pour dresser un constat amiable. Dans ce cas, ses honoraires se négocient librement. Le locataire ne peut pas payer davantage que le propriétaire et plus de trois euros par mètre carré pour l’état des lieux d’entrée. Seul le bailleur règle l’état des lieux de sortie.

La restitution du dépôt de garantie ou « caution »

L’état des lieux de sortie ne marque pas la fin des relations entre propriétaire et locataire. Le premier doit en effet remettre le dépôt de garantie versé par le second à la signature du bail.

A savoir : Le terme de caution est souvent utilisé pour désigner la somme versée en dépôt de garantie. Il s’agit en réalité d’un abus de langage. La caution désigne la personne physique qui s’engage à payer le loyer lorsque le locataire n’en est plus capable.

Dès lors qu’aucune dégradation imputable au locataire n’est constatée, le montant de la « caution » doit être restitué intégralement dans un délai d’un mois à compter de la remise des clés.

A l’inverse, si la comparaison des états des lieux d’entrée et de sortie met en lumière certaines détériorations, le propriétaire dispose de deux mois pour rendre tout ou partie du dépôt de garantie.

Si le propriétaire ne respecte pas les délais légaux, le montant restant dû au locataire est majoré d’une somme égale à 10% du loyer mensuel pour chaque mois de retard. Le bailleur ne subit cependant aucune pénalité lorsque le locataire ne communique pas sa nouvelle adresse pour l’envoi du chèque.

Une particularité en copropriété : Un copropriétaire bailleur peut légalement conserver jusqu’à 20% du dépôt de garantie plus de deux mois. La somme sera restituée au locataire après la régularisation annuelle des charges de copropriété, dans un délai d’un mois après l’approbation définitive des comptes.

Cette faculté est ouverte dès lors que le contrat de bail prévoit la facturation des charges locatives pour leur montant réel. Si elles sont calculées de manière forfaitaire, le copropriétaire bailleur n’y a pas droit.

S’il le souhaite, le copropriétaire bailleur peut restituer l’intégralité du dépôt de garantie sans atteindre la régularisation des charges.

Retenue sur le dépôt de garantie

Le propriétaire qui identifie des réparations locatives à effectuer suite au passage du locataire peut lui faire payer. Comme pour le règlement d’impayés de loyers, l’indemnisation prend la forme d’une retenue, totale ou partielle, du dépôt de garantie. Elle doit être justifiée par la présentation de devis ou de factures pouvant attester du coût des travaux. Ces documents doivent être envoyés au locataire « dans un délai raisonnable » qui peut excéder les deux mois prévus pour la restitution du dépôt selon la jurisprudence.

A savoir : Si le dépôt de garantie ne suffit pas à couvrir les dépenses acquittées par le bailleur pour la remise en état du logement, ce dernier peut demander un complément au locataire ou à sa caution. Lorsqu’une résolution à l’amiable n’est pas possible, il peut saisir la justice pour obtenir gain de cause.

Recours du locataire

Le locataire peut s’opposer à la ponction de tout ou partie du dépôt de garantie ou dénoncer sa non-restitution. Si l’envoi d’une mise en demeure ne permet pas de régler le litige, le locataire peut saisir la commission départementale de conciliation avant de se tourner vers le juge de proximité.

Si le litige porte sur un montant supérieur à 4.000 euros, c’est au tribunal d’instance de statuer.

A noter : Une fois qu’il est signé, l’état des lieux contradictoire ne peut plus être remis en cause par le propriétaire. La non-restitution justifiée du dépôt de garantie est son seul moyen d’obtenir une indemnisation pour des dégâts qui ne sont pas répertoriés dans le constat.

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