Rachat de trimestres de retraite : comment procéder ?

Par Jean-Philippe Dubosc
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Il est possible dans certains cas de racheter des trimestres de cotisation à la retraite. Cette opération permet de réduire, voire de supprimer une éventuelle décote et donc d’améliorer le montant de la future pension.    

 

Qu’est-ce que le rachat de trimestres ?

Ce dispositif proposé dans tous les régimes de retraite (de base et complémentaire) permet de racheter des trimestres de cotisation vieillesse. Certaines conditions doivent toutefois être respectées. Elles dépendent du statut professionnel du demandeur.

Pourquoi racheter des trimestres de cotisation ?

Pour bénéficier d’une pension à taux plein (c’est-à-dire sans abattement) dans les régimes de retraite de base, les actifs doivent justifier d’un certain nombre de trimestres de cotisation qui évolue en fonction de leur date de naissance. S’ils ne disposent pas de la durée de cotisation requise dans leur classe d’âge, leur retraite de base est minorée de 1,25% par trimestre manquant (dans la limite de 25%). Le rachat de trimestres permet de réduire cette décote, voire d’atteindre la durée de cotisation demandée et ainsi de percevoir une pension de base pleine.

Qui peut racheter des trimestres ?

Tous les actifs, qu’ils soient salariés, salariés agricoles, fonctionnaires, travailleurs indépendants (artisans, commerçants, entrepreneurs, exploitants agricoles) ou professions libérales (médecins, avocats, architectes, experts-comptables…), ont la possibilité de racheter des trimestres de cotisation à la retraite. Les demandeurs doivent être âgés d’au moins 20 ans et ne pas avoir dépassé 66 ans. A compter de 67 ans (âge de retraite à taux plein), la décote est, en effet, supprimée, même si le nombre de trimestres exigé n’est pas atteint.

Quels sont les trimestres « rachetables » ?

Les assurés peuvent racheter des trimestres au titre des années d’études supérieures. Il s’agit des périodes durant lesquelles ils ont été étudiants et n’ont donc pas pu cotiser à la retraite. Seules les années ayant donné lieu à la délivrance d’un diplôme d’enseignement supérieur reconnu par l’Etat sont prises en compte. Il existe toutefois une exception : les années de classes préparatoires aux concours d’entrée des grandes écoles (écoles de commerce, écoles d’ingénieurs, Sciences Po, ENA, écoles normales supérieures, Beaux Arts, Arts déco…) sont comptabilisées alors qu’elles ne délivrent pas de diplôme. A noter : depuis le 22 janvier 2014, les actifs peuvent racheter des trimestres au titre des années d’études même s’ils ont travaillé (et donc cotisé à la retraite) quand ils étaient étudiants.

Dans le privé, il est également possible de procéder à un rachat de trimestre au titre des années incomplètes de cotisation. Lorsque le salarié, le salarié agricole, l’indépendant ou le professionnel libéral n’a pas cotisé quatre trimestres dans l’année (en cas de temps partiel, d’intérim, de travail saisonnier, de job étudiant, de chômage non indemnisé) et n’a donc pas pu valider une annuité complète dans son régime de base, il peut racheter les trimestres manquants. Que ce soit au titre des années d’études et/ou des années incomplètes, le rachat ne peut être inférieur à 1 trimestre et excéder 12 trimestres (3 ans).

Qu’en est-il dans les régimes complémentaires ?

Les régimes de retraite complémentaire du privé (il n’existe pas de régime complémentaire dans le secteur public) donnent la possibilité de racheter des points de cotisation. Ce ne sont en effet pas des régimes par annuités comme les régimes de base, mais des régimes en points.

Jusqu’au 31 décembre 2018, à l’Arrco (le régime complémentaire des cadres et des non cadres) et à l’Agirc (le régime complémentaires des seuls cadres), il était autorisé d’effectuer un rachat seulement au titre des années d’études supérieures et uniquement s’il y a eu un rachat préalable dans le régime de base. Le nombre de points « rachetables » était limité à 70 par an dans la limite de trois ans (soit 210 points).

Depuis le 1er janvier 2019, il est possible racheter des points à l’Agirc-Arrco, le nouveau régime complémentaire issu de la fusion de l’Arrco et de l’Agirc, également au titre des années incomplètes de cotisation. Que ce soit pour les études ou pour les années incomplètes, le rachat demeure conditionné à un rachat au régime de base. Le nombre de points rachetable a été porté à 140 dans la limite de de trois ans (soit 420 points). Un salarié non-cadre peut ainsi racheter jusqu’à 420 points, contre 210 points auparavant.

Quelles sont les limites au rachat ?

Les trimestres rachetés ne sont pas comptabilisés dans les trimestres pris en compte dans les dispositifs de départ anticipé à la retraite au titre des carrières longues ou du handicap. Les rachats de trimestres ne peuvent pas non plus permettre de dépasser la durée de cotisation requise dans sa génération et ainsi de bénéficier dune surcote (une majoration de 1,25% de la pension par trimestre civil supplémentaire travaillé).

 Quelles sont les options proposées ?

Trois options sont proposées dans le cadre du rachat de trimestre. La première permet uniquement d’améliorer le taux de pension qui entre dans le calcul de la retraite, sachant que le taux plein s’élève à 50% dans le privé et à 75% (80% dans certains cas) dans le public. La seconde augmente à la fois le taux de pension et le nombre de trimestres cotisés. L’impact de l’option 2 est plus important sur le montant de la pension perçue. C’est pourquoi elle coûte plus cher que l’option 1. Enfin, il existe une troisième option, uniquement proposée dans le secteur public, qui porte uniquement sur le nombre de trimestres cotisés.

 Comment est calculé le prix du rachat ?

Plusieurs critères entrent dans le tarif du trimestre racheté. Outre l’option choisie, l’âge du demandeur et son niveau de salaire annuel sont pris en compte. Il existe trois niveaux de rémunération : moins de 75% du plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS), entre 75% et 100% du PASS et au-delà de 100% du PASS. Plus l’assuré est âgé et dispose d’un salaire et plus le prix est conséquent.

Par exemple, un salarié de 61 ans, gagnant plus de 43.992 euros par an (soit l’équivalent du PASS fixé au 1er janvier 2023) et ayant choisi l’option 2 (taux de pension et durée d’assurance) devra payer 6.578 euros pour racheter un trimestre. A 20 ans, avec l’option 1 (taux de pension uniquement) et un salaire annuel inférieur à 32.994 euros (75% du PASS 2023), un assuré déboursera 1.055 euros pour acquérir un trimestre. Soit six fois moins. Pour connaître les barèmes 2023 des rachats de trimestres, cliquez ICI.

Comment connaître le coût d’un trimestre ?

L’Assurance retraite, le régime de retraite de base des salariés du secteur privé, des travailleurs indépendants (artisans, commerçants, chefs d’entreprise) et des agents non titulaires de la fonction publique (contractuels, vacataires), propose sur son site Internet un simulateur en ligne du coût d’un rachat de trimestres. Pour l’utiliser, l’internaute doit disposer d’un compte personnel. Si tel n’est pas le cas, il peut, grâce à la plateforme sécurisée France Connect, utiliser ses identifiants fiscaux (impots.gouv.fr), d’Assurance maladie (ameli.fr) ou d’identité numérique (idn.laposte.fr).

L’assuré n’a plus ensuite qu’à indiquer l’option de rachat choisie (au titre des années incomplètes de cotisation, des années d’études, des années d’apprentissage…), puis le montant annuel des revenus des trois dernières années. Le simulateur lui donne alors l’estimation du coût d’un trimestre avec l’option 1 (taux de pension) ou de l’option 2 (taux de pension et durée d’assurance). L’internaute peut imprimer la simulation et ainsi l’accompagner à sa demande de rachat (voir plus loin). Attention: le simulateur concerne uniquement les rachats au régime de base des salariés et agents publics non titularisés. Il n’existe pas (pour l’instant) d’outil analogue dans les autres régimes.

 Quelle est la procédure à respecter ?

L’assuré doit faire une demande d’évaluation du rachat auprès de sa caisse de retraite en précisant à quel titre il souhaite racheter des trimestres et en joignant les pièces justificatives. Dans les deux mois, la caisse indique si la demande est ou non recevable (au-delà de deux mois, elle est considérée comme rejetée).

Si la demande est acceptée, la caisse adresse une évaluation du coût du rachat. L’assuré renvoie le formulaire de confirmation de la demande en stipulant le nombre de trimestres qu’il souhaite acquérir ainsi que le mode de paiement choisi. Attention : toute décision de rachat est définitive.

Quels sont les modes de paiement ?

Le paiement des trimestres peut être échelonné sauf si l’assuré rachète un seul trimestre. Entre 2 et 8 trimestres rachetés, il est possible d’étaler les remboursements sur 1 ou 3 ans. Entre 9 et 12 trimestres, l’échelonnement peut s’opérer sur 1, 3 ou 5 ans.

A savoir : si le versement est lissé sur 3 ou 5 ans, le montant à payer est majoré chaque année en fonction de l’évolution prévisionnelle des prix à la consommation (hors tabac). Cette majoration a été fixée à 4,3% au 1er janvier 2023.

Quelle est la fiscalité ?

Les rachats de trimestres sont entièrement déductibles des revenus à déclarer à l’administration fiscale. En cas de paiements étalés dans le temps, la déduction fiscale est également échelonnée. Cerise sur le gâteau : cet avantage fiscal n’est pas comptabilisé dans les niches fiscales plafonnées à 10.000 euros par an, qui intègrent notamment la réduction d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié à domicile (ménage, repassage, jardinage…) ou les dispositions d’investissement locatif partiellement défiscalisés, du type Pinel.

Les aides au rachat

Depuis le 11 janvier 2015, les jeunes actifs peuvent racheter jusqu’à 4 trimestres au titres des années d’études supérieures à un prix préférentiel dans les 10 ans suivants la fin de leur cursus. Le montant du rabais octroyé dépend de l’option choisie mais aussi du statut professionnel du demandeur. A titre d’exemple, un jeune salarié bénéficie d’un abattement de 670 euros avec l’option 1 ou de 1.000 euros avec l’option 2. Un jeune agriculteur devra quant à lui se contenter d’une réduction de 600 euros avec l’option 1 et de 890 euros en option 2.

Il est possible de racheter jusqu’à 2 trimestres de stage en entreprise (déduits des 4 trimestres d’études à tarif préférentiel) à condition que le stage ait été effectué à partir du 15 mars 2015, fasse partie du cursus, dure au moins 2 mois et donne lieu à une gratification ne permettant pas de valider de trimestre. La demande de rachat doit intervenir moins de 2 ans après la fin du stage. Deux mois de stage rémunérés donnent droit à un trimestre, pour un tarif équivalent à 12% du plafond mensuel de la Sécurité sociale en vigueur au moment de la demande arrondi à l’euro supérieur, soit 440 euros par trimestre en 2023. Seule l’option 1 peut être choisie et le rachat est limité à deux trimestres.

Les assurés en contrat d’apprentissage entre le 1er juillet 1972 et le 31 décembre 2013 ou qui ont été assistant maternel entre le 1er janvier 1975 et le 31 décembre 1990, c’est-à-dire des périodes où ils ne pouvaient pas valider 4 trimestres dans l’année, bénéficient d’un tarif unique préférentiel de rachat de trimestres d’années incomplètes. Celui-ci s’élève à 1.464 euros par trimestre en 2023 (quels que soient l’âge et le niveau de salaire du demandeur) et compte pour l’option 2. Les anciens apprentis et assistants maternels peuvent racheter jusqu’à 12 trimestres de cette manière.

Les rachats particuliers

Depuis 1995, les artisans, commerçants et chefs d’entreprise ont la possibilité de racheter des trimestres manquants. Ces rachats dits « Madelin » (introduits par la loi Madelin de 1994) doivent être effectués dans les 6 ans suivants la confirmation des revenus professionnels. Tous les trimestres manquants doivent être rachetés. Toutefois, par rapport aux rachats « Fillon » (instaurés par la loi Fillon de 2003), les rachats « Madelin » présentent trois avantages : ils coûtent souvent moins cher, les trimestres rachetés sont intégrés dans les trimestres pris en compte pour la retraite anticipée pour carrière longue (RACL) et ils améliorent non seulement le taux de pension et la durée de cotisation, mais aussi le revenu annuel moyen (RAM) qui entre également en compte dans le calcul de la pension.

À noter : Les conjoints collaborateurs, qui travaillent pour leur époux ou partenaire de PACS qui est artisan, commerçant ou profession libérale sans être rémunérés, pouvaient racheter 24 trimestres (6 ans) pour les périodes antérieures à 2005 (date de création du statut). Ils devaient justifier de leur participation à l’activité de l’entreprise via une déclaration au Centre de formalité des entreprises (CFE) ou en obtenant l’attestation de 2 témoins indépendants (n’ayant pas de lien avec eux). Ce dispositif a pris fin le 31 décembre 2020. Plus aucune demande de rachat ne peut être déposée depuis cette date.

La loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2022, promulguée le 24 décembre 2021, a instauré un nouveau cas de rachat de trimestres pour certaines professions libérales. Les professionnels de santé, qui ont été affiliés tardivement à une caisse de retraite car leur activité n’a pas été reconnue pendant longtemps, vont pouvoir racheter des trimestres pour les années où ils n’ont pas pu cotiser. Il s’agit principalement des ostéopathes, des naturopathes, des chiropracteurs, des acupuncteurs, des sophrologues ou encore des hypnotiseurs. Un décret va préciser la liste des professions concernées et les conditions du rachat, notamment les barèmes et les modalités de versement des cotisations, les conditions de leur prise en compte dans le calcul de la pension ainsi que la nature des pièces justifiant des périodes d’activité en cause. La demande de rachat devra être effectuée entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2026.

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