La loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2018 a supprimé le Régime social des indépendants (RSI) pour le remplacer par la Sécurité sociale des indépendants (SSI), un régime adossé au régime général de la Sécurité sociale qui gère la protection sociale de base des salariés du secteur privé et des agents non titulaires de la fonction publique. Cette suppression avait été promise par Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle, le RSI étant très décrié depuis sa création en 2006. La SSI a été totalement intégrée au régime général depuis le 1er janvier 2020.
Le RSI, c’était quoi ?
Le Régime social des indépendants est né le 1er juillet 2006 de la fusion de trois caisses de protection sociale : la Caisse nationale d’assurance maladie des artisans (Canam), la Caisse nationale d’assurance vieillesse des artisans (Cancava) et l’Organisation autonome nationale de l’industrie et du commerce (Organic). L’objectif était de créer un « guichet unique » pour les travailleurs non-salariés (TNS) concernant leur protection sociale.
Concrètement, le RSI gérait la couverture maladie et maternité des travailleurs indépendants (artisans, commerçants et chefs d’entreprise), des professions libérales (médecins, notaires, pharmaciens, architectes, experts-comptables…), des micro-entrepreneurs (la nouvelle appellation des autoentrepreneurs) et des conjoints-collaborateurs.
Ce dernier statut est réservé aux conjoints mariés ou aux partenaires de Pacs des TNS qui travaillent pour eux sans être rémunérés, ni détenir des parts dans l’entreprise. Les conjoints-collaborateurs acquièrent des droits, à condition que le chef d’entreprise verse des cotisations sociales forfaitaires en leur nom.
Le RSI assurait le remboursement des dépenses de soins (consultations, analyses médicales, médicaments, hospitalisation) et le versement des indemnités journalières (IJ) au titre de la maternité des TNS et éventuellement de leurs conjoints-collaborateurs, comme le fait l’Assurance maladie pour les salariés.
Par ailleurs, le RSI constituait le régime de prévoyance et de retraite, cette fois-ci uniquement des travailleurs indépendants et de leurs conjoints-collaborateurs (toujours en contrepartie du versement de cotisations afférentes), ainsi que des micro-entrepreneurs exerçant une activité artisanale ou commerciale. Les professions libérales (et leurs conjoints-collaborateurs) et les micro-entrepreneurs proposant des prestations intellectuelles ou de services cotisent à des caisses spécifiques pour l’invalidité-décès et l’assurance vieillesse obligatoires. Il existe 11 caisses libérales de prévoyance et de retraite.
Le RSI versait aux travailleurs indépendants, aux conjoints-collaborateurs des artisans et commerçants et aux micro-entrepreneurs artisans ou commerçants une pension en cas d’invalidité consécutive à une maladie ou un accident. Il attribuait également un capital-décès au conjoint survivant marié à un artisan ou un commerçant (retraité ou non) à la suite de la disparition de ce dernier.
Le RSI servait aux indépendants leur retraite de base. Depuis 2013, les artisans et commerçants disposent d’un régime unique de retraite complémentaire, le Régime complémentaire des indépendants (RCI), géré par le RSI et qui verse des pensions de vieillesse complémentaires qui s’ajoutent aux pensions de vieillesse de base. Au décès des travailleurs indépendants, le RSI octroyait aux veufs et veuves des pensions de réversion, c’est-à-dire une part de la retraite de base et de la retraite complémentaire que l’artisan ou le commerçant touchait ou aurait dû toucher s’il avait quitté la vie active de son vivant. Depuis le 1er janvier 2020, le RCI a été placé sous la tutelle de l’Assurance retraite.
Pourquoi le RSI a-t-il été supprimé ?
Depuis sa création, le RSI a été fortement décrié par les travailleurs indépendants et les professions libérales pour sa piètre qualité de services. En septembre 2012, la Cour des comptes a publié un rapport au vitriol dénonçant notamment les difficultés d’affiliation, les nombreuses erreurs dans les appels de cotisations et les retards récurrents dans le versement des pensions de vieillesse. Les Sages de la rue Cambon n’ont pas hésité à parler de « catastrophe industrielle ».
Suite aux rapports des députés socialistes Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier en juin et septembre 2015, plusieurs mesures ont été mises en place pour réduire les dysfonctionnements. Les efforts mis en œuvre n’ont, semble-t-il, pas suffi. Outre Emmanuel Macron, d’autres candidats à la présidentielle de 2017 (dont Marine Le Pen et François Fillon) avaient d’ailleurs proposé de supprimer le RSI.
Quel régime remplace le RSI ?
La LFSS pour 2018 a instauré l’adossement du RSI au régime général. A partir du 1er janvier 2018, il a été rebaptisé Sécurité sociale des indépendants (SSI). La SSI n’existe plus aujourd’hui puisqu’elle a été totalement absorbée par le régime général le 1er janvier 2020.
Quand est prévue la suppression totale du RSI ?
Si la fin du RSI est officiellement entrée en vigueur le 1er janvier 2018, la suppression s’est, en réalité, étalée sur une période transitoire de deux ans. Depuis le 1er janvier 2019, les travailleurs indépendants nouvellement installés et précédemment salariés sont affiliés à l’Assurance maladie. Depuis le 1er janvier 2020, l’ensemble des artisans, commerçants, entrepreneurs et professions libérales dépendent du régime général pour la couverture maladie et, pour les indépendants, pour la retraite de base.
Quelles sont les conséquences de la suppression du RSI ?
– Pour les cotisations des travailleurs non-salariés
L’affiliation des travailleurs non-salariés au régime général n’a pas entraîné un alignement des cotisations sociales des TNS sur celles versées par les salariés. Si tel avait été le cas, les cotisations des TNS auraient augmenter en moyenne de 30%, sachant qu’ils cotisent proportionnellement moins (à rémunération équivalente) que les salariés.
– Pour la couverture maladie des TNS
Pour se faire rembourser leurs dépenses de santé, les travailleurs indépendants et les professions libérales doivent désormais s’adresser à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de leur lieu de résidence. C’est notamment auprès de leur CPAM qu’ils doivent demander leur carte Vitale ou leur attestation d’assurance maladie.
– Pour la prévoyance et la retraite des TNS
Les impacts en matière d’invalidité-décès et d’assurance vieillesse ne sont pas les mêmes selon l’activité du travailleur non-salarié.
* Des artisans, commerçants et chefs d’entreprise
Les règles de prévoyance différentes par rapport à celles des salariés sont maintenues. A titre d’exemple, le capital-décès versé aux conjoints survivants des affiliés au régime général est attribué sans conditions de ressources et de manière forfaitaire (identique quel que soit le niveau de salaire du salarié défunt). Il s’élève à 3.476 euros en 2021. Pour les artisans et commerçants, le veuf ou la veuve touche l’équivalent de 20% du plafond annuel de la Sécurité sociale (8.227,20 euros en 2021) si le défunt était en activité au moment de son décès ou 8% du Pass (3.290,88 euros en 2021) s’il était retraité, à condition de ne pas dépasser le plafond annuel de revenus demandé (identique pour bénéficier du minimum vieillesse, soit 10.836 euros en 2021).
En revanche, les règles de calcul de la retraite de base (âges de départ, durée d’assurance, taux de pension…) sont les mêmes pour les salariés et les travailleurs indépendants depuis 1973. Seuls les appels de cotisations sont différents, sachant que les cotisations vieillesse des salariés sont prélevées directement sur leur salaire, tandis que celles des artisans et commerçants sont appelées deux fois par an et sont calculées en fonction du chiffre d’affaires réalisé deux ans avant. Par ailleurs, la durée d’indemnisation du congé de maternité des indépendantes et des libérales ont été alignées sur celles des salariées depuis le 1er janvier 2019.
En ce qui concerne la retraite complémentaire des artisans et des commerçants, le Régime complémentaire des indépendants (RCI) est maintenu. Les cotisations, les règles de liquidation et les prestations demeure les mêmes. Le RCI est géré de manière autonome au sein du régime général. Les pensions complémentaires sont calculées et versées par l’Assurance retraite depuis le 1er janvier 2020.
* Des professions libérales
Les professionnels libéraux cotisent, comme avant le 1er janvier 2018, à leur caisse de prévoyance et de retraite libérale que ce soit pour eux ou pour leur conjoint-collaborateur.
A savoir : depuis le 1er juillet 2021, les professionnels libéraux disposent d’un régime commun d’indemnités journalières (IJ). En cas d’arrêt de travail à la suite d’un accident ou d’une maladie, ils perçoivent des IJ à partir du 4ème et jusqu’au 90ème jour d’arrêt. L’indemnité est versée par leur CPAM. Les caisses de retraite et de prévoyance des médecins, des avocats, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes, des experts-comptables et des auxiliaires médicaux (infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes, orthoptistes) continuent de verser des IJ à leurs affiliés à compter du 91ème jour d’arrêt.
* Desmicro-entrepreneurs (ex-autoentrepreneurs)
La prévoyance et la retraite des micro-entrepreneurs exerçant une activité artisanale ou commerciale relèvent désormais de la Sécurité sociale des indépendants. Les cotisations et prestations sont restées inchangées.
En revanche, il y a du nouveau pour les micro-entrepreneurs exerçant des activités intellectuelles ou de services (rédaction, traduction, formation, conseil, coaching…). Ceux qui ont démarré leur activité depuis le 1er janvier 2018 ne cotisent plus à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (Cipav) pour l’invalidité-décès, la retraite de base et la retraite complémentaire, mais à la Sécurité sociale des indépendants. Depuis le 1er janvier 2019, les micro-entrepreneurs libéraux, qui ont créé leur entreprise avant 2018, sont autorisés à quitter la Cipav pour rejoindre le régime général d’ici 2023.
* Des retraités
La suppression du RSI ne bouleverse pas le quotidien des artisans et commerçants retraités. Le montant de leurs pensions de base et complémentaires ne change pas. La seule différence est qu’ils ne doivent plus s’adresser, depuis le 1er janvier 2020, à leur caisse de RSI, mais à la caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) s’ils sont franciliens, à la caisse d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat) s’ils vivent en région ou à la caisse générale de Sécurité sociale (CGSS) s’ils habitent à la Martinique, en Guadeloupe, à La Réunion ou en Guyane.
Les professions libérales retraités doivent eux-aussi contacter leur CPAM pour leurs dépenses de santé. En revanche, ils dépendent toujours de leur caisse de prévoyance et de retraite libérale en ce qui concerne l’invalidité et les pensions de vieillesse, y compris depuis 2020.